LE CHOCOLAT RASE DES FORÊTS : DISTRIBUTEURS ET CONSOMMATEURS, SURVEILLEZ VOS ACHATS

FNE communique : Calendrier de l’avent, cadeau, gourmandise… Le chocolat est devenu un incontournable de Noël. La pression pour fournir l’Europe est telle que l’impact social et environnemental de la culture du cacao en devient dramatique. Pourtant, les distributeurs ont le pouvoir de faire évoluer les industriels en augmentant leurs exigences sur les conditions de production du chocolat. France Nature Environnement s’est associée à l’ONG Mighty Earth pour demander aux plus gros distributeurs français les démarches mises en place. Si certains sont motivés pour faire évoluer les pratiques, d’autres restent à la traîne… Parmi eux, le distributeur Système U, qui rassemble les enseignes Hyper U, Super U et U Express. L’engagement de tous est primordial pour éradiquer l’impact social et environnemental du chocolat, France Nature Environnement lance donc une campagne d’interpellation pour demander à Système U de s’engager.La filière chocolat, premier facteur de déforestation en Côte d’Ivoire et au Ghana

Les trois quarts de la production mondiale de cacao proviennent d’Afrique de l’Ouest. Pour répondre à la demande croissante en chocolat, des forêts tropicales y sont rasées afin de planter de nouvelles cultures de cacaoyers. En Côte d’Ivoire par exemple, alors que les forêts recouvraient une bonne part du pays en 1960, elles occupent aujourd’hui moins de 11% du territoire. Et la tendance est loin de s’inverser : en moins d’un an (entre novembre 2017 et septembre 2018), environ 13 748 hectares de forêt ont été détruits, soit l’équivalent de 15 000 terrains de football[1]… L’impact de cette déforestation massive sur le climat et la faune sauvage est désastreux. Chimpanzés, éléphants, écureuils volants, léopards et toute une myriade d’espèces animales et végétales habitent ces forêts tropicales et sont donc menacés de disparition.

Le bilan social n’est pas plus réjouissant. En Afrique de l’Ouest, les cultivateurs de cacao gagnent moins d’1$ par jour, 54 centimes en Côte d’Ivoire. Ils ne perçoivent que 6% de la valeur d’une barre chocolatée. Le secteur du chocolat est également connu pour ses violations régulières du droit du travail, l’esclavage et le travail des enfants n’y est pas rare. Plus de 2 millions d’enfants travaillent ainsi dans la dangereuse et pénible récolte de cacao en Afrique de l’Ouest. Comble du paradoxe, ces enfants, comme la plupart des cultivateurs de cacao, n’ont jamais gouté au chocolat.

Face à la catastrophe écologique et humaine, les distributeurs doivent s’engager

À l’autre bout de la chaîne, les distributeurs perçoivent plus d’un tiers du prix d’une tablette de chocolat… ils ont donc le pouvoir et la responsabilité de faire évoluer les pratiques. Depuis le vote de la loi sur le devoir de vigilance, les distributeurs (et autres groupes) de plus de 10 000 employés sont même tenus de présenter un plan de vigilance présentant les mesures prises pour identifier et prévenir les atteintes graves aux droits humains et à l’environnement dans leurs chaînes d’approvisionnement. Pour qu’ils se saisissent enfin du problème, France Nature Environnement s’est associée à l’ONG Mighty Earth pour demander aux plus gros distributeurs français leur engagement dans la lutte contre la déforestation et le travail des enfants.

Parmi les 8 distributeurs contactés[2], seul Système U n’a pas répondu à la demande de rencontre. Il fait pourtant partie de ceux qui ne se sont pas encore engagés dans une démarche de lutte contre la déforestation et le travail des enfants. Face à cette absence de réponse, France Nature Environnement lance donc une campagne d’interpellation de Système U, avec une demande : que le distributeur s’engage publiquement en excluant de ses fournisseurs ceux qui se livrent à la déforestation et au travail forcé. En attendant que l’ensemble des distributeurs et chocolatiers se lance dans la lutte contre la déforestation et le travail des enfants dans la filière cacao, la meilleure solution reste de privilégier le chocolat éthique, provenant de marques engagées contre ces pratiques[3].

Pour Michel Dubromel, président de France Nature Environnement : « la France s’est engagée dans une Stratégie Nationale de lutte contre la Déforestation Importée qui mentionne explicitement le cacao. C’est un premier pas important, mais cette stratégie n’est pas contraignante pour le moment. Il est urgent que les distributeurs prennent le problème à bras le corps et se tournent vers des fournisseurs qui ne participent pas à la déforestation, ni au travail des enfants. A l’heure actuelle, la pression des consommateurs semble être la seule arme à notre disposition ».

Voir le dossier de France Nature Environnement : « Déforestation due au chocolat : un désastre évitable »


[1] Voir le rapport de Mighty Earth : « Chocolat : mensonges sous emballage »
[2] Mighty Earth est entrée en contact avec Auchan, Biocoop, Carrefour, Casino, Intermarché – Les Mousquetaires, Lidl, Mark & Spencer et Système U. Auchan, Biocoop, Casino et Système U ne se sont pas encore engagés dans une démarche de lutte contre la déforestation importée. Tous ont répondu à la demande de contact de Mighty Earth, à l’exception de Système U.