La mairie de Paris choisit de ne pas déplacer une famille de renards repérée fin avril dans le cimetière fermé au public depuis le début de l’épidémie.
Pas de déconfinement forcé pour les renards du Père-Lachaise : la nouvelle est officielle et ravit Paris Animaux Zoopolis. Cette association était en effet montée au créneau le 28 avril pour s’opposer à tout déplacement de ces renards. «Le risque qu’ils soient écrasés s’ils sortent du cimetière a été évoqué par la mairie pour envisager de les déloger. Mais ce n’est pas un argument, car ce risque existe partout», souligne Amandine Sanvisens, cofondatrice de Paris Animaux Zoopolis. «Il faut que l’humain arrête d’intervenir en permanence sous couvert de bien-être animal.»
Saisis par l’objectif du conservateur du Père-Lachaise, ce sont quatre renardeaux ainsi que leurs parents qui ont élu domicile dans le célèbre cimetière parisien. Les petits étant âgés d’environ un mois et demi, le couple aurait emménagé là avant le début du confinement. «Ils sont probablement venus par la petite ceinture», avance Pénélope Komitès, ajointe chargée des espaces verts, de la nature en ville, de la biodiversité et des affaires funéraires à la mairie de Paris. Selon l’élue, des renards ont déjà été aperçus dans d’autres cimetières en banlieue, mais jamais dans la capitale.
«Mieux vaut ne pas chercher à les nourrir»
«La présence de renards en ville est courante. Londres, par exemple, abrite une population abondante. Déplacer cette famille serait insensé et présenterait des risques réels pour elle, notamment pour les petits», estime Pierre Rigaux, administrateur de la Société française pour l’étude et la protection des mammifères (SFEPM). «Au-delà du problème de leur capture, ils seraient très perturbés dans leurs habitudes et pourraient entrer en conflit territorial avec d’autres individus», ajoute le naturaliste.
Les renards adaptent leur régime alimentaire au territoire dans lequel ils vivent. En ville, à défaut de souris ou de rats, ils peuvent lorgner nos poubelles. «Ils ne possèdent pas de mâchoires puissantes, précise Pierre Rigaux, mais mieux vaut ne pas chercher à les nourrir.» Ce qui, de toute façon, paraît difficile, dans la mesure où cet animal craint l’homme.
Un animal officiellement considéré comme nuisible
Et pour cause : battues, tirs de nuit, piégeage ou déterrage, entre 600 000 et un million de renards sont victimes chaque année de la chasse, selon les chiffres avancés par l’Association pour la protection des animaux sauvages (Aspas). Aucun quota ne limite la destruction de cet animal officiellement considéré comme nuisible, alors qu’il participe à réguler les petits rongeurs et à éliminer animaux malades ou cadavres.
Pour Amandine Sanvisens, «les animaux sont exclus de notre conception des villes. Or, tous y sont légitimes, et une cohabitation pacifique est possible. Ce que nous demandons, c’est un partage des territoires entre nous et eux».
Les clichés des renardeaux du Père-Lachaise ont émerveillé les amis des animaux. Mais pas qu’eux. Georges Salines, père d’une jeune femme morte dans la tuerie du Bataclan, a laissé sur Twitter ces quelques mots émouvants : «J’espère qu’ils iront gambader sur la tombe de ma fille.»
Sarah Finger/Libération 3 mai
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: Des renardeaux au cimetière du Père-Lachaise à Paris. Photo Benoît Gallot