Il y a des associations de défense du loup, de l’ours, du renard, du hérisson, des oiseaux… il y a même des associations de défense de la Nature ! Mais la Nature, est-ce réellement autre chose qu’un dispositif idéologique pour justifier la domination d’une espèce sur les autres ?
L’idée, de séparer les humains des non-humains, est née de celle de séparer la nature divine de la nature humaine : séparer Dieu des Hommes, puis l’homme de la femme, l’adulte de l’enfant, l’humain du non-humain. Cette vision ségrégationniste du monde fait toujours rage sur la planète.
Séparer pour mieux régner
À ce jeu des séparations et des divisions, la distance qui nous sépare du ver de terre est considérable.
Nous le voyons comme un sous animal, alors qu’il partage avec tous les autres animaux de manger par la bouche et faire caca par un trou du cul. Contrairement aux plantes qui ne font pas caca et mangent par les pieds ! Je n’irai pas jusqu’à dire que nous sommes cousins avec les vers de terre, même si nous partageons la moitié de notre patrimoine génétique, mais il y a une filiation… Nous venons ad minima du même laboratoire voire du même moule ! Le plus étonnant, c’est qu’au 19e siècle, le dictionnaire « Littré » (1863-1877) définit la Nature comme l’ensemble de tous les êtres qui compose l’univers. Émile Littré ne sépare pas, il unifie.
Le 22 avril, Jour de la Terre
Créé le 22 avril 1970 aux États-Unis, pour sensibiliser à l’environnement, la nature, la terre nourricière, ce jour met en lumière celui qui règne en maître dans le sol : le ver de terre. La communauté des vers de terre en est la première biomasse animale, pas la première biomasse animale terrestre, l’erreur est souvent commise, répétée, récurrente.
Mais voilà, le 28 février 1970, soit 2 mois avant la création de cet évènement planétaire, il y a ce discours profondément écologiste de Georges Pompidou alors président de la République : « La nature nous apparaît de moins en moins comme la puissance redoutable que l’homme du début de ce siècle s’acharne encore à maîtriser, mais comme un cadre précieux et fragile qu’il importe de protéger pour que la terre demeure habitable à l’Homme. » Précurseur, il annonce la création du premier ministère de l’Environnement, chose sera faite le 7 janvier 1971 (source). Pompidou pourrait aujourd’hui être qualifié d’écoterroriste pour notre ministre de l’Intérieur… 😉
Sans oublier le Président Chirac, avec sa célèbre phrase prononcée le 2 septembre 2002 lors du IVe Sommet de la Terre à Johannesburg : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. »
Comment l’idée est née ?
Elle a germé d’un mythe iroquois raconté par le philosophe Baptiste Morizot dans Philosophie magazine en 2013 :
Un mythe iroquois raconte qu’un jour, la tribu prit la décision de chasser tous les élans, en négligeant l’avis des autres vivants : les loups furent affamés et commencèrent à disparaître. Saison après saison, la santé de la terre périclita, comme celle du gibier, des rivières et des cœurs. Depuis ce jour, à chaque palabre, avant de parlementer, un Iroquois se lève et demande : Qui, dans cette assemblée, parle au nom du loup ?
Qui parle au nom du ver de terre ?
La Ligue de protection des vers de terre va parler au nom des vers de terre
2 associations 🪱 dans le monde
La Earthworm Society of Britain (Société britannique des vers de terre) fondée en 2016, en référence aux travaux de Darwin et pour promouvoir une Journée mondiale des vers de terre, et Le Jardin-vivant. Depuis 2020, nous portons cette Journée en France où elle connaît un vif succès.
La même année, en 2016, Le Jardin vivant s’engage dans la reconnaissance juridique des vers de terre. L’année suivante, nous bénéficions du soutien de l’État sur un programme de réhabilitation des vers de terre dans le modèle agricole pendant 3 ans. En 2021, notre travail paye… puisque l’État reconnait officiellement les vers de terre comme l’un des piliers de notre souveraineté alimentaire.
Toutefois, le chemin vers leur intégration dans nos lois sera long et tortueux. Ce pour quoi nous avons créé La Ligue de protection des vers de terre, car même lorsque la loi vise à protéger leur habitat, elle n’est pas appliquée. À l’instar de la loi n° 2021-1104 du 22/08/2021 qui définit l’artificialisation : « comme l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage. »
Combien de sols agricoles tombent sous le coup de cette loi, leur fonctionnement biologique étant durablement altéré par la raréfaction des vers de terre ? Mais la loi ne peut s’appliquer, puisque juridiquement les vers de terre n’existent pas… contrairement à une route, un parking ou une zone industrielle !