COP16 : LE COMITE FRANÇAIS DE L’UICN APPELLE A ACCELERER LA MISE EN ŒUVRE DU CADRE MONDIAL DE LA BIODIVERSITE

A l’approche de la COP 16 Biodiversité qui s’ouvre le 21 octobre 2024 à Cali en Colombie, le Comité français de l’UICN appelle la France et les autres Etats à renforcer la mise en œuvre du nouveau Cadre mondial de la biodiversité et ses 23 cibles, deux ans après son adoption. Ce renforcement doit se faire à travers des stratégies nationales pour la biodiversité conformes aux objectifs internationaux, des ressources financières augmentées, une réforme des financements néfastes, et avec un cadre de suivi et d’évaluation des actions commun et robuste.

DECLINER LES ENGAGEMENTS INTERNATIONAUX EN STRATEGIES ET OBJECTIFS NATIONAUX

Le Comité français de l’UICN appelle à ce que les Etats accélèrent la déclinaison du Cadre mondial de la biodiversité en stratégies nationales pour la biodiversité et objectifs nationaux, à l’image de la stratégie française. Ces stratégies sont indispensables à la mise en œuvre d’actions permettant d’atteindre les 23 ciblesi du cadre mondial dans les différents pays. Une dynamique est en cours mais elle est actuellement insuffisante car seuls 31 Etats et l’Union européenne ont publié leurs stratégies et 99 d’entre eux ont publié des objectifs nationaux, sur les 196 Parties à la Convention sur la diversité biologique.

Il est urgent que les Etats poursuivent la dynamique lancée à la COP15 à Montréal en 2022 car le déclin de la biodiversité se poursuit à un rythme alarmant et il ne reste que 6 ans pour inverser la tendance d’ici 2030. Selon la Liste rouge des espèces menacées de l’UICN, 28% des espèces sont toujours menacées dans le monde et près de 17% en France.

ACCROITRE LES FINANCEMENTS POUR LA BIODIVERSITE ET REFORMER LES SUBVENTIONS NEFASTES

Le Comité français de l’UICN demande à ce que les Etats adoptent une stratégie de mobilisation des ressources financières permettant d‘atteindre, d’ici 2030, une augmentation de 200 milliards de dollars par an des financements directs pour la biodiversité (cible 19) et une suppression progressive ou réforme des financements néfastes à hauteur de 500 milliards de dollars par an (cible 18). Ces financements doivent aboutir à combler le déficit évalué à 700 milliards de dollars par an.

En France, le besoin d’augmentation des financements publics a été évalué à 372,4 millions d’euros pour la mise en œuvre de la stratégie nationale pour la biodiversité en 2025ii. Le montant des subventions publiques dommageables à la biodiversité a lui été chiffré à 10,2 milliards d’euros, soit plus de 4 fois supérieur celui des dépenses favorables. Ces subventions concernent surtout les aides à des pratiques agricoles dommageables (6,7 milliards d’euros, notamment au titre de la PAC) et celles favorisant l’artificialisation des sols (2,9 milliards d’euros). La réduction et la réorientation de ces dépenses permettraient à la fois de financer les politiques de la biodiversité, diminuer les pressions sur la nature, et réaliser des économies budgétaires.

Plus largement, il est urgent de « verdir » la finance en alignant les flux fiscaux et financiers sur les objectifs du Cadre mondial (cible 14), sachant que les financements publics et privés néfastes à la nature ont été évalués à 6 700 milliards de dollars par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement dans son dernier rapport sur l’état des financements pour la natureiii.

SUIVRE ET EVALUER LES OBJECTIFS ADOPTES A LA COP15 EN 2022

Le Comité français de l’UICN appelle à finaliser le cadre de suivi pour rendre compte régulièrement des progrès réalisés dans la mise en œuvre des actions. Ce cadre propose des indicateurs pour les 23 cibles afin de vérifier si l’atteinte des objectifs est en bonne voie. Il doit être complété et adopté sur la base des connaissances disponibles pour ne pas prendre de retard, même s’il doit être amélioré par la suite. L’UICN propose déjà de nombreux outils de connaissance pour nourrir ces indicateurs. Les modalités d’organisation du rapportage de chaque Etat doivent également être précisées, ainsi que la possibilité d’inclure les contributions des acteurs non-étatiques (ONG, collectivités locales, peuples autochtones et communautés locales, entreprises…).

Ceci est indispensable pour que le premier bilan mondial, basé sur tous les rapports des Etats, soit réalisé et présenté en 2026 à la prochaine COP17.

ASSURER UN PARTAGE JUSTE ET EQUITABLE DES RESSOURCES GENETIQUES

Le Comité français de l’UICN appelle à finaliser le mécanisme multilatéral assurant un partage juste et équitable des avantages tirés des Informations de Séquençage Numériques (ISN) des ressources génétiques, avec la création d’un fonds mondial. Ce mécanisme doit apporter des avantages financiers mais également non monétaires et les fonds doivent être affectés au soutien de la conservation et de l’utilisation durable de la diversité biologique, conformément aux objectifs de la Convention sur la diversité biologique.

La COP16 Biodiversité doit permettre d’engager des modifications profondes pour renouveler nos relations et interagir autrement avec le vivant. Comme le Costa Rica qui a montré la voie, nous devons « faire la paix avec la nature » tel que le propose la Colombie, pays hôte de la conférence internationale.

Le Comité français de l’UICN participera à la COP16 en Colombie avec la présence de Maud Lelièvre, présidente, Sébastien Moncorps, directeur, Florence Clap, responsable des politiques de la biodiversité, Nicolas Salaün, responsable coopération internationale, Magali Pausin, chargée de mission « pays en développement et biodiversité » et Manon Bourhis, assistante pour les relations internationales. Plusieurs de ses organisations membres seront également présentes.

Photo : mante religieuse, ©JBDumond2024