Personnalités à découvrir

ROQUES Hervé, animateur de réserve naturelle

Sur l’île de Ré - paradis des oiseaux, il y a deux "entités" de nature : la réserve naturelle de Lilleau des Niges et la maison du fier.

Hervé Roques est l'un des animateurs de la réserve naturelle de Lilleau des Niges. Depuis plus de 20 ans.

IMG_3559

Hervé Roques installe l'information de l'été sur la maison du fier

Ce qu’il aime ? Les oiseaux bien sûr, mais surtout le terrain, les sorties, la pédagogie, la sensibilisation : bien connaître, bien respecter!

Il prépare actuellement une exposition sur le changement climatqiue que lui a confiée la LPO.

Mais comme il aime aussi écrire, il a publié de nombreux articles et commis quelques ouvrages qui font référence dont un dictionnaire de l’île de Ré (Editions Sud-Ouest : voir ici), très apprécié par les amateurs et amoureux de nature, et "Ile de Ré, découvertes nature" (avec la LPO aux Editions Ouest-France).

Nous l'avons rencontré un matin de début mai au seuil de la réserve qu'il anime avec passion.

DSC_0451

(photo JBDumond)

Pouvez-vous nous donner quelques étapes clés de votre parcours de vie ? Je suis Bordelais, au niveau études je n’ai rien fait qui soit lié à l’environnement. Plutôt un parcours chaotique : technicien emballage et conditionnement, BTS décorateur étalagiste, puis arrêt des études et objecteur de conscience sur des réserves gérées par la SEPANSO (fédération régionale des associations de protection de la nature de la région Aquitaine) où j’avais été bénévole auparavant : le Banc d’Arguin, la réserve de Bruges, l’étang du Cousseau. Puis reprise des études : DUT animation socio-culturelle, et licence d’ethnologie.

Depuis l’adolescence j’avais envie de travailler dans l’environnement; mais à l’époque – les années 80 -, ce n'était pas simple de trouver du travail dans ce secteur, les associations ne tournaient qu’avec des bénévoles.

Puis j’ai eu un jour l’opportunité d’arriver ici, par le plus grand des hasards. J’avais l’habitude d’aller tous les dimanche à la Pointe de Grave et un jour, le responsable local m’informe qu’Hervé Robreau, conservateur à l’époque de la réserve de Lilleau des Niges cherchait un animateur. Je me suis présenté, j'ai rencontré Hervé : le lendemain, j’étais pris! Le hasard. Il ne faut jamais désespérer.

Et j’y suis toujours, depuis 23 ans !

DSC_0425

(photo JBDumond)

Vous avez des maîtres à penser ou croisé des gens ou des moments déclencheurs? Pas de grand maîtres à penser style Jean Dorst ou Haroun Tazieff ou...

Comme tous les enfants, j’aimais les animaux, préhistoriques surtout ; pas particulièrement les oiseaux.

Et puis une année, on est partis avec ma famille en vacances en Algérie, c'était en mars. Et il y avait des cigognes partout, dans les champs, sur les toits des maisons; et comme tous les gamins, je les faisais s'envoler. C'est ça qui a déclenché ma passion des oiseaux. Et la cigogne est devenue mon animal fétiche.

images

Côté famille aussi, ma mère avait la fibre nature.

Au collège on était trois copains, dont deux chasseurs ! On s’entraînait mutuellement, le weekend on allait se balader. Un jour, on a rencontré un taxidermiste qui avait des canards chez lui près de Bordeaux. Tous les soirs on allait chez lui, il nous montrait ses canards, on passait une heure ou deux à les observer; j’ai même appris à naturaliser des oiseaux.

Et puis quelques rencontres de gens, pas forcément connus.

Pourquoi la faune sauvage? Parce que je trouve ça beau, parce que je suis sans doute un peu sauvage moi-même. Pourquoi ne suis-je pas devenu chasseur, taxidermiste ? Je ne sais pas.

DSC_0508

(photo JBDumond)

Si vous étiez un animal sauvage, lequel ? On m’a souvent posé la question, je n’ai pas su quoi répondre. Je crois que je serais un prédateur quelque part. Plutôt en haut de la chaîne alimentaire. Un aigle…

Quelles sont la ou les plus belles de vos rencontres de vie sauvage ? Ma rencontre avec les cachalots aux Açores en 79, qu’on chassait encore à cette époque (l’interdiction est venue deux/trois ans après). Le jour où on est arrivés en vacances, les baleiniers revenaient de chasse dans leur baleinière (10 mètres de long, une vingtaine de personnes à bord), façon Moby Dick. C’était la même ambiance. L’année d’avant il y avait eu plusieurs morts. J’ai assisté au dépeçage d'un cétacé, ça m’a marqué.

Unknown

Une anecdote aussi. Au phare des Baleines, un labbe parasite s'était posé sur du varech et tout à coup un grand labbe est arrivé, il a retourné le labbe parasite, l’a attaqué au bréchet et l’a déchiqueté. Impressionnant

Je me rappelle aussi la vague de froid de 1985 où des oiseaux sont arrivés au rivage, souvent épuisés, qu’on pouvait bien observer..

Et puis le Banc d’Arguin. Dans la journée il y avait beaucoup de touristes mais le soir on était seuls, les animateurs, les guides ; on étaient les robinsons sur le banc de sable. Entre nous... , l’ambiance..., j’avais 18/20ans.

Quand je suis arrivé sur l’île, j’étais vraiment ornitho ; mais maintenant je m’intéresse aussi à d’autres disciplines, la botanique ou les bords de mer, l’estran, à marée basse, les rochers, les laisses, les oursins, les étoiles de mer… Il y a des surprises tout le temps.

DSC_0624

(Ophrys provincialis/photo JBDumond)

DSC_0582

(crachat de coucou et Tétragnate/photo JBDumond)

Quels sont vos lieux ou vos souvenirs de nature préféré ? Déjà sur l’île de Ré il y en a plusieurs : la réserve naturelle bien sûr, la Lasse à Loix. Le bassin d’Arcachon, le parc du Tech, la dune du Pilat. D’un côté l’océan à perte de vue, de l’autre la forêt à perte de vue, et au milieu, le désert de sable.

En Afrique, au Sénégal, au Cameroun. J’ai le souvenir d’invasions de criquets, un puis deux, puis dix, cent, puis des milliers, des nuages, que ça partout, moment incroyable.

Et LE lieu mythique où vous rêvez d’aller, sur terre, ailleurs ? J’aimerais bien aller dans le grand nord, la Norvège, l’Islande – plutôt en fin d'hiver, pour les volcans.

Une œuvre qui pourrait illustrer votre parcours ? Je fais un peu de photo, pas forcément de la photo animalière ; des gros plans, arbres, la vase, des plumes, j'aime plutôt le côté graphique.

Les livres de Paul Géroudet. Je les ais tous lus. Ils m'ont vraiment marqué. Robert Hainard aussi, et ici à Ré, le peintre sculpteur Bernard Frigière.

Vous sortez beaucoup sur le terrain. Quel matériel utilisez-vous pour saisir la vie sauvage ? Quand je sors seul : jumelles et vélo ! Plus un appareil photo dans le sac au cas ou… paysage, imprévu, rencontre.

DSC_0592

(photo JBDumond)

En tant qu’animateur : longue-vue, bouquins, jumelles. J’utilise beaucoup les bouquins, cela permet aux gens de visualiser plus facilement qu’en regardant dans la longue-vue un oiseau qui bouge. Ils ont une planche devant eux. Ils comprennent mieux.

Je ne fais pas d’affut, que de l’approche ; j’ai un peu l’œil, je sais m’y retrouver.

En parlant, je me rappelle une anecdote au Phare des Baleines : on avait confondu un cachalot avec une chaudière de bateau qui expulsait de l’eau à chaque mouvement de la houle ! Tout le monde était persuadé qu’il y avait une baleine. Même les médias.

Vous donneriez quel conseil à un jeune débutant dans votre activité ? D’abord, ne pas désespérer. La vie est faite de rencontres, de hasard. C’est important de se construire un réseau.

Et se donner, car le réseau de la vie commence au stage.

Mais je constate qu’on a de plus en plus de mal à trouver des bénévoles comme avant. On trouve des stagiaires, pour un mois, à l’occasion d’études. Mais il y a moins d’engagement.  La vie est plus difficile.                                                En même temps, l’activité nature s’est spécialisée, avec des scientifiques, des gens de laboratoire… Mais des gens de terrain, comme moi, il y en a moins.

Revenons à l’animal. Un d’entre eux, disparu, revient. Lequel ? J’aime bien les dinosaures, les mammouths. J’aimerais bien voir un diplodocus, un brontosaure. On ne sait pas si il y en a eu dans le coin. On a retrouvé il y a quelques années les traces d’un crocodile marin datant du Jurassique de 6/7 mètres de long.

Côté militant, quelle initiative en faveur de la faune sauvage ? Quels enjeux, quelles urgences ? Plein de choses.

Mais d’abord la sensibilisation des gens ; Il y a de plus en plus d’urbains, ils ne connaissent pas bien la nature. Parfois même ça fait peur ! Donc, une sortie réussie c’est quand les gens ont appris à regarder au lieu de voir, écouter au lieu d’entendre.

DSC_0494

(photo JBDumond)

Au niveau de l’agriculture, de l’énergie, du climat, bien sûr, il y a aussi tellement à faire. A propos du climat, il faudrait d’ailleurs plutôt dire dérèglement ou changement que réchauffement car on assiste et on assistera également à des épisodes de froid.

La biodiversité, parce que ça me parle; mais les gens en parlent peu et ça ne leur parle pas. A la fin d’une sortie, ils ont pris conscience de certaines choses mais je préfère parler de beauté, d’adaptation des animaux au milieu, des yeux des araignées, du nourrissage des anémones de mer… Ça les marque davantage.

Une association particulière vous tient à cœur ? Avant, c'était la SEPANSO, aujourd’hui davantage, c’est la LPO bien sûr.

En conclusion, vous disparaissez ce soir, qu’aimeriez-vous laisser comme dernier message ?

J’espère que ce que j’ai fait dans ma vie a apporté une petite pierre, que ça aura servi à quelque chose.

Deuxième rencontre en juillet 2015, lors d'une sortie sur l'estran

Biodiversité et beauté du monde : Rien ne vaut une balade sur l'estran à marée descendante ou basse pour découvrir la richesse secrète du bord de mer. Sous la conduite avisée et pédagogique d'Hervé Roques - animateur, à la LPO -, c'est à quoi sont invités les vacanciers de l'île de Ré. De 9h à midi, de rocher en rocher, de mare en mare, Hervé conduit ses petits groupes d'adultes et d'enfants à la découverte d'un monde parfois inconnu qui contribue à la richesse de la mer qui délaisse le rivage deux fois par jour, découvrant des trésors.

IMG_4589

IMG_4591

Comment fonctionne la marée? Combien y a t'il d'espèces d'algues? Quels escargots de mer sont herbivores ou carnivores (les bulots, les nasses!)?

IMG_4595

Sous les rochers, des crabes - marbré, vert ou enragé, Porcelane, bras de fer ou Xantho...; étoiles de mer,  Ophiures, crevettes et bouquets, anémones en fleurs, oursins...

IMG_4604

IMG_4607

Sur les rochers, Balanes, Patèles, vers de toutes sortes, bigorneaux et autres...

IMG_4585

Bref, la biodiversité à visage ouvert et le message de la préserver, de se conduire respectueusement.

EN LIEN AVEC LE SUJET

LIVRE(S) EN LIEN AVEC LE SUJET

En rapport avec :

Faune sauvage

SITE WEB

Article précédent

DONIN

Article suivant

GAY Jean-Paul