Impossible de vous dire à quand remonte ma passion pour la faune sauvage, je crois bien qu’elle me tient depuis mon premier jour, depuis que mon regard fut capable de suivre le vol de l’hirondelle dans le ciel ou la lente escalade du limaçon le long d’un mur.
Cette passion est sans nulle doute à l’origine de ma vocation précoce, après avoir voulu être dompteur puis “gardien” de zoo, j’ai choisi à l’âge de quatre ans de devenir vétérinaire.
Coureur des bois et des champs depuis mon enfance, j’ai eu très vite l’envie de conserver une trace de mes rencontres sauvages. Un Instamatic offert pour mes onze ans m’a procuré mes premières joies de chasseur photographe mais aussi mes premières déceptions. Le magnifique rouge-gorge que j’avais eu tant de mal à approcher n’était qu’un point minuscule sur le cliché que je montrai fièrement à mon entourage. Bien des années plus tard, un reflex équipé d’un “400" de piètre qualité et appartenant à mon frère, me permit de réaliser quelques gros plans. Il s’agissait d’un vanneau huppé dont nous avions repéré le nid. Accroupi dans un carton camouflé, j’attendais le cœur battant le retour de l’oiseau.
D’un cliché à l’autre, j’ai élargi mes horizons photographiques, passant de la campagne lorraine à d’autres coins de l’hexagone puis bien plus loin sur la planète bleue.
Débusquer un animal et le saisir dans sa fuite, fixer le regard inquiet du chevreuil ne me satisfaisait pas et j’ai vite essayé de saisir un comportement, d’imprimer sur la gélatine une émotion, un moment de grâce où l’animal s’exprime dans toute sa beauté et parfois sa sauvagerie. Depuis, je n’ai eu de cesse de me faire oublier de la bête, de me fondre dans le milieu, écorce contre l’écorce, feuille parmi les frondaisons ; alors seulement l’animal acceptait de se livrer tel qu’il est.
Plus de vingt ans de divagations photographiques qui m’ont emporté sous toutes les latitudes, des brouillards glacés de la mer de Béring aux jungles étouffantes du Sabah. J’ai planqué des heures sous terre pour apercevoir le cupidon des prairies, pataugé dans les marais à la recherche de l’anaconda et patienté en équilibre instable dans un arbre géant pour admirer le vol des grands aras ; je n’en tire aucune gloire, ma passion me pousse.
La technique et le matériel ont évolué, libérant l’esprit du photographe mais ne remplaçant pas la connaissance de l’animal, le temps et la patience sans lesquels rien n’est possible.
Attendre que l’animal paraisse et qu’il s’unisse à la lumière pour un instant magique, un instant unique, instant volé ; quelques dixièmes de seconde ou quelques minutes où la Nature se donne en toute intimité à l’objectif.
De simple voyeur passif, je suis devenu VOLEUR D’INSTANTS.
C’est cette passion pour l’animal libre et le désir de vous faire partager des émotions simples et fortes qui me poussent aujourd’hui à vous ouvrir les pages de mon album “ de famille”.