Le commerce mondial représente une menace croissante pour les espèces animales et végétales ; menace qui peut désormais être mesurée et détaillée, selon une cartographie effectuée par des chercheurs et publiée hier.
Des chercheurs ont publié mercredi un « atlas mondial des menaces », détaillant par nuances de couleurs l’impact des exportations destinées aux Etats-Unis, en Chine, au Japon et à l’Union européenne.
Pour produire le café ou le soja, des forêts ont été rasées à Sumatra (Indonésie) et dans le Mato Grosso (Brésil), ajoutant aux pertes d’habitat menaçant déjà des dizaines d’animaux et de plantes dans ces régions, montre par exemple cette carte, parue dans le journal Nature Ecology and Evolution. Des iPhone aux meubles Ikea, toute la chaîne mondialisée de produits manufacturés contribue ainsi au déclin de la faune et de la flore sauvages : un tiers
des menaces sur les espèces sont liées au commerce international, avait souligné une précédente étude. Pour mieux identifier ces « points chauds », les scientifiques ont passé en revue près de 7 000 espèces jugées menacées par l’Union internationale pour la
conservation de la nature (UICN) ainsi que les origines et les destinations de centaines de produits.
L’étude permet ainsi de voir qui menace le plus qui. Par exemple, environ 2 % de la menace pesant sur la grenouille Atelopus spumarius du Brésil peuvent être attribués aux coupes du bois utilisé pour des biens destinés aux Etats-Unis. Le bois de Malaisie, largement commercialisé en Europe et en Chine, a, lui, un peu plus privé d’abri l’éléphant, l’aigle criard et l’ours malais. Tandis qu’au Brésil l’élevage bovin entraîne la déforestation, avec parmi les victimes le brachytèle, singe endémique de cette région. Autre exemple : la demande croissante d’huile d’olive en provenance d’Espagne et du Portugal pourrait bien faire disparaître le lynx, directement affecté par la construction de barrages nécessaires à l’irrigation. « Nous avons identifié des “points chauds” alimentés essentiellement par un petit nombre de pays », souligne Keiichiro Kanemoto, de la Shinshu University à Matsumoto (Japon). Pour lui, ce travail « devrait faciliter les coopérations directes entre producteurs et consommateurs » et permettre de cibler les zones prioritaires. Aujourd’hui, 90 % des quelque 6 milliards de dollars mobilisés annuellement pour protéger les espèces en danger sont dépensés dans les pays riches. Or « ce sont rarement dans ces pays que se trouvent les “points chauds” », relève M. Kanemoto. La Terre est confrontée à une nouvelle extinction de masse, la sixième depuis un demi-milliard d’années : faune et flore s’y éteignent jusqu’à mille fois plus rapidement qu’il y a quelques centaines d’années. Tous ces calculs n’incluent pas le florissant commerce illégal d’animaux (dont le trafic international est estimé à 150 milliards de dollars annuels). Ils ne couvrent pas non plus d’autres facteurs d’extinction, comme l’urbanisation ou le changement climatique. Edouard Pflimlin/Le Monde/5 juillet 2017
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