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Objet : Consultation sur le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes
Monsieur le Premier ministre,
Vous connaissez notre opposition au projet de Notre-Dame-des-Landes (NDDL), en raison de ses impacts locaux et nationaux ainsi que son incohérence avec la politique nationale de transition écologique. Une incohérence encore accentuée au regard des engagements pris lors de la COP21.
Vous connaissez aussi notre implication au quotidien dans le dialogue environnemental et notre désir de le voir évoluer vers plus de démocratie. Parce que ces enjeux montrent que le projet d’aéroport NDDL nécessite un débat national le plus éclairé et transparent possible, nous souhaitons aujourd’hui vous alerter.
Le président de la République a annoncé, le 11 février dernier, la tenue d’un référendum local avant l’automne 2016 « sur ce grand projet d’aéroport pour tout l’Ouest français » dont il souhaite que l’issue puisse donner une nouvelle légitimité au projet ou conduire à son abandon. Dans cette perspective, nous serons amenés à nous prononcer, jeudi 24 mars, en tant que membres du CNTE, sur le projet d’ordonnance censé établir la base juridique et les modalités de cette consultation.
La commission présidée par le sénateur Alain Richard sur la démocratisation du dialogue environnemental a conclu au bout d’un an de discussion entre les parties prenantes à la nécessité d’entourer le recours à une consultation locale de beaucoup de précautions. L’avis du CNTE sur le projet d’ordonnance issu de ces travaux a été adopté à 2 voix près le 16 février dernier. Cinq semaines plus tard, le CNTE est de nouveau saisi cette fois sur un projet d’ordonnance taillé sur mesure pour le cas de NDDL et contenant des dispositions contraires au projet soumis au CNTE du 16 février. Pire, il institue durablement dans le droit français une procédure de consultation locale totalement improvisée sans que les conséquences n’en aient été pesées. Ne sommes-nous pas devant une véritable instrumentalisation du droit et d’instances de la République ?
Ainsi :
- La définition du périmètre de consultation est restreinte à celui de l’enquête publique, c’est-à-dire le département de Loire-Atlantique. Quelle légitimité accorder à une consultation départementale sur un projet financé nationalement et régionalement, qui relève de la politique nationale d’aménagement du territoire et dont les impacts environnementaux, économiques et sociaux sont non seulement locaux mais aussi régionaux et globaux (fermeture d’aéroports en Bretagne, émissions de gaz à effet de serre…)?
Pourquoi limiter la consultation aux seuls électeurs de la Loire-Atlantique alors que n’importe quel citoyen français (et même d’un autre pays) peut répondre à une enquête publique quel qu’en soit le périmètre ? Cette limitation du périmètre est une sérieuse régression par rapport à la précédente ordonnance soumise au CNTE qui prévoyait un périmètre plus large « en fonction de l’étendue géographique des impacts ».
- La procédure d’information préalable du public prévue dans l’ordonnance adoptée par le CNTE en février dernier est purement et simplement effacée ! Où sont passées les recommandations du rapport Richard sur le préalable d’une « information suffisamment large, vérifiée et pluraliste » ? Après 40 ans d’ « un vrai déficit de transparence et de démocratie », selon le constat de la ministre de l’Ecologie, quels moyens seront mis en œuvre pour garantir ce principe ?
- La question posée devrait permettre aux citoyens d’exprimer un choix entre plusieurs alternatives. Dans le cas de Notre-Dame-des-Landes, l’enjeu est bien d’avoir un vrai état comparatif entre la modernisation de l’existant et la construction d’un deuxième aéroport. La préférence pour l’aménagement, s’il était jugé nécessaire, de l’aéroport existant devrait pouvoir s’exprimer. Le projet d’ordonnance ne prévoit qu’une réponse binaire « par oui ou par non »
Le projet d’ordonnance sur lequel nous aurons à nous prononcer est non seulement établi en marge du processus de démocratisation du dialogue environnemental, engagé rappelons-le au lendemain de la mort de Rémi Fraisse à Sivens, mais il constitue une grave régression par rapport au projet soumis au CNTE le 16 février dernier et dessine les contours d’une consultation contestable – y compris d’un point de vue démocratique. En outre, selon un collectif de juristes, il bouscule l’Etat de droit puisqu’il déroge aux dispositions de la loi autorisant le gouvernement à procéder par ordonnance sur ce sujet : le gouvernement avait lui-même admis lors du premier projet d’ordonnance qu’il ne pouvait créer de nouvelles procédures de consultation locale que pour les projets non encore autorisés.
Autre point essentiel : des éléments d’expertise indispensables à la justification même du projet ou à la tenue d’une consultation de qualité sont, à notre connaissance, manquants. Nous vous demandons qu’ils soient rapidement publiés, notamment :
- Les projections relatives à l’augmentation du trafic aérien qui justifient la construction d’un deuxième aéroport : les hypothèses et calculs sur lesquels sont fondées les projections de 2003 et 2013 de la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) sont manifestement erronés, les projections s’étant avérées largement surestimées (dans un rapport de 1 à 2) ;
- Des données fiables sur le bruit alors que la révision du plan de gêne sonore de l’actuel aéroport est demandée depuis plusieurs années ;
- L’évaluation socioéconomique du projet à jour en 2016, conforme aux prescriptions du code des transports, donnant les coûts et avantages du projet et permettant d’évaluer son impact sur les finances publiques, à court et long terme. Ce bilan coût/avantage devrait être comparé à celui de la modernisation − si le besoin en était démontré − de l’aéroport actuel ;
- Une évaluation environnementale du projet d’aéroport et de l’ensemble du programme dans lequel il s’insère conforme aux prescriptions européennes ;
- Le contrat de concession et le cahier des charges de l’appel d’offre.
A ce jour, l’information sur ce projet reste très déficiente. Une consultation organisée dans de telles conditions constituer
ait un véritable déni du dialogue environnemental, des principes constitutionnels de participation du public et des exigences internationales de la Convention d’Aahrus.
Nous vous demandons donc, Monsieur le Premier ministre, de revenir sur ce projet d’ordonnance et d’établir les conditions durables d’un dialogue environnemental efficace et reconnu.
Il est temps de faire enfin de la « transparence la première condition de la démocratie participative », selon les propos mêmes du président de la République en ouverture de la Conférence Environnementale 2014. Le sursaut démocratique en matière d’environnement promis par le chef de l’Etat au lendemain du drame de Sivens, mérite mieux que cela.
Nous vous rappelons enfin l’engagement du président de la République suivant : « tant que les recours ne sont pas épuisés, le projet ne peut être lancé ». Toutes les déclarations affirmant que les travaux commenceront en octobre en cas de vote positif balaient d’un revers de main la question de la légalité du projet. En effet, les recours juridiques seront loin d’avoir été épuisés à l’automne.
Ces trois grandes questions – un dialogue environnemental construit, la transparence sur des informations essentielles, la question de la légalité – étant impératives, nous sollicitons une audience dans les plus brefs délais et vous prions d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre très haute considération.
Florent COMPAIN, Président Amis de la Terre – France,
Denez L’HOSTIS, Président de FNE,
Bernard CHEVASSUS-AU-LOUIS, Président de H&B,
Allain BOUGRAIN-DUBOURG, Président de la LPO,
Nicolas HULOT, Président de la FNH,
Pierre PERBOS, Président Réseau Action Climat,
Jacques BEALL, Vice Président de Surfrider,
Pascal CANFIN, Directeur général du WWF France.
À l’occasion de la 11e édition de la semaine pour les alternatives aux pesticides, Botanic organise deux week-ends de collecte de vos pesticides.
Alors que l’Organisation des Nations Unies a déclaré le 21 mars, journée internationale des forêts, une étude du WWF révèle que les acheteurs publics français, comme les collectivités territoriales, ont des performances très insuffisantes en termes d’application du Règlement Bois de l’Union européenne.
Représentant près de 25% de la demande de bois en France, l’achat public est un levier non négligeable en matière de lutte contre le commerce de bois illégal, mais il repose également sur lui un rôle d’exemplarité pour le secteur privé. Le WWF a ainsi choisi de centrer l’attention de son Baromètre Bois, outil d’évaluation des politiques achats des acteurs clés du marché, sur les pratiques du secteur public en 2015.
Les résultats de l’évaluation soulignent que le sujet est encore loin d’être maîtrisé par les acteurs publics. Près de cinq ans après le Grenelle de l’Environnement et trois mois après la COP21, ces insuffisances sont inquiétantes.
Le sujet de l’approvisionnement en bois est encore mal connu et ses multiples dimensions restent mal comprises par bon nombre d’acheteurs publics. 50% des organisations ayant répondues au baromètre n’ont pas de politique d’approvisionnement bois ou de document apparenté fixant des règles et objectifs, pourtant garant et clé de voute de tout dispositif de soutenabilité. Seules les métropoles de Paris et Lille ainsi que le Conseil général de Loire-Atlantique disposent d’une politique d’approvisionnement bois claire depuis de nombreuses années.
La lacune majeure de l’ensemble des collectivités enquêtées réside en premier lieu dans leur capacité à mettre en œuvre leurs engagements et à les suivre en documentant les achats de bois. En 2015, aucune organisation évaluée n’obtient une note supérieure à 2,5/10 au critère « qualité du suivi de la mise en œuvre ».
« Une telle faiblesse dans la qualité de suivi porte un coup à la crédibilité des autorités publiques dans leur lutte contre le commerce de bois illégal et les dispositifs qu’elles mettent en œuvre » affirme Jean Bakouma, directeur adjoint production & consommation durables au WWF France. « Les organisations publiques ont un devoir d’exemplarité, d’innovation et de transparence certaines y répondent déjà, mais elles sont bien trop rares. Dans la suite de grands choix planétaires comme la Déclaration de New York sur les forêts ou encore la COP21, comment imaginer des avancées réelles au niveau mondial, alors qu’en France des engagements forts ne sont pas immédiatement mis en pratique sur une question concrète comme l’achat de bois et ses répercussions sur les forêts, le développement soutenable, le bilan carbone ou l’emploi local ? » ajoute-t-il.
Il est en effet important de rappeler qu’une politique d’approvisionnement en bois responsable agit autant sur l’environnement (limitation des émissions de CO2) et l’économie (réduction des dépenses publiques) que sur le social en appliquant les principes de l’économie durable et circulaire. Les principaux acteurs publics doivent montrer l’exemple pour être suivis par les citoyens.
En 2014, l’ATIBT, le WWF et FSC coéditaient le « Guide pratique à l’usage des acheteurs : Concevoir et mettre en œuvre une politique d’achat bois responsable », afin de montrer la voie. Une politique responsable d’achats de bois et de papier est possible !