Pour la Journée mondiale sur les océans, le WWF France présente les premiers résultats de son étude pilote sur la pollution par les phtalates, composés chimiques présents dans les matières plastiques, dont sont victimes les mammifères marins en Méditerranée.
A cette occasion, l’ONG revient également sur une de ses victoires de plaidoyer : l’obligation pour tous les bateaux battant pavillon français d’être équipés à partir du 1er juillet du système de navigation REPCET ou tout système équivalent pour prévenir les risques de collision avec les navires.
Les mammifères marins menacés par la pollution par les phtalates
Selon les premiers résultats d’une étude pilote réalisée en 2016 par le WWF, les rorquals communs, les cachalots et les globicéphales noirs qui vivent en Méditerranée sont contaminés par les phtalates, composés chimiques présents dans les matières plastiques.
Le WWF a réalisé des biopsies (prélèvements de peau et de gras) sur près de 90 cétacés dans le sanctuaire Pelagos en Méditerranée. Trois espèces ont fait l’objet de ces prélèvements : le rorqual commun, le globicéphale noir et le cachalot. Ces échantillons ont été analysés en partenariat avec l’Université Aix-Marseille selon une grille de dix phtalates particulièrement dangereux et/ou très utilisés.
Couramment utilisés pour assouplir les matières plastiques, notamment le polychlorure de vinyle (PVC), les phtalates sont partout : dans les films plastiques, emballages, revêtements de sol, rideaux de douche, tuyaux et câbles, matériaux de construction, peintures ou vernis, mais aussi dans certains dispositifs médicaux. Les phtalates sont aussi incorporés comme fixateurs dans de nombreux produits cosmétiques : vernis à ongles, laques pour cheveux, parfums…
Les effets nocifs des phtalates portent essentiellement sur la fertilité, le développement du fœtus et du nouveau-né. Certains phtalates sont également suspectés d’être des perturbateurs endocriniens.
Des résultats alarmants
Le DEHP, le plus toxique des phtalates occupe la deuxième place du classement en termes de concentration, après le DEP. Ainsi, le rorqual présente une concentration en DEHP de 799 µg/kg, le cachalot de 631 µg/kg et le globicéphale noir de 739 µg/kg. Pour comparaison, on considère qu’une source alimentaire a une concentration élevée lorsque la quantité de phtalate passant du plastique dans l’aliment est supérieure ou égale à 300 µg/kg.
Isabelle Autissier, Présidente du WWF France :
« Près de 269 000 tonnes de déchets plastiques formés de plus de 5 000 milliards de particules flottent sur les océans. L’étude pilote du WWF confirme une nouvelle fois l’intensité de cette pollution en Méditerranée, là où la densité de micro-plastiques est parmi les plus élevées au monde et touche l’ensemble des espèces, jusqu’aux cétacés du grand large. Les résultats que nous présentons aujourd’hui, à l’occasion de la Journée des océans, démontrent que s’il est urgent de nettoyer les océans de leurs plastiques, il est tout aussi prioritaire de prendre des mesures de réduction de la pollution par toutes les sources de contamination par les phtalates. »
Un dispositif obligatoire au 1er juillet pour protéger les cétacés des collisions avec les navires
Pour prévenir les risques de collision des cétacés avec les navires, le WWF a appelé les compagnies maritimes à s’équiper du système de navigation REPCET qui permet de partager en temps réel la position des grands cétacés repérés par les équipages.
Son action de plaidoyer a permis, dans le cadre de la loi sur la biodiversité adoptée en 2016, de rendre obligatoire l’adoption d’un dispositif anti-collision (REPCET ou autre) pour tous les navires de plus de 24 m battant pavillons français ayant circulé plus de 10 fois dans les zones protégées Pelagos (Méditerranée) et Agoa (Antilles). Cette obligation sera effective au 1er juillet 2017 et concernera 60 à 80 navires français.
Deux compagnies maritimes transportant des passagers sont principalement concernées par cette obligation. La Méridionale, tout d’abord, qui est un acteur vertueux et précurseur sur ce sujet. Non seulement la compagnie a équipé tous ses bateaux il y a plus de 10 ans, bien avant la loi, mais elle a également pris des mesures pour diminuer la pollution de ses navires quand ils sont stationnés au port de Marseille. Quant à la société Corsica Linea, ancienne SNCM, elle est en train de se conformer à ses obligations légales en équipant ses cinq bateaux.
Aujourd’hui, à l’occasion de la Journée mondial des océans, c’est la compagnie Corsica Ferries, société française dont les navires battent pavillon italien et ne sont donc pas soumis à l’obligation légale, qui annonce qu’elle va équiper quatre de ses navires de façon volontaire.
Denis Ody, responsable océans et côtes au WWF France :
« Le WWF France salue l’initiative de la société Corsica Ferries qui pourrait concerner encore plus de navires l’an prochain et plus largement l’engagement des compagnies maritimes qui ouvre la voie à un déploiement international du dispositif REPCET. Les collisions avec les navires sont une des premières causes de mortalité non naturelle chez les grands cétacés, particulièrement dans le sanctuaire Pelagos. Nous appelons le secteur maritime, et notamment les compagnies italiennes, à se mobiliser pour la protection de nos de rorquals communs et de nos cachalots en s’équipant de système anti-collision de façon volontaire avant l’été 2018. »