Les années passent et se ressemblent… Malgré des décisions de justice sanctionnant la chasse du pigeon à couronne blanche en 2016 et 2017, le préfet de la Guadeloupe a persisté à autoriser sa chasse pour la saison 2018/2019 en Guadeloupe et à Saint Martin. Mais c’était sans compter sur la persévérance de l’ASPAS et de l’ASFA(1) qui ont saisi une énième fois le juge administratif afin de faire suspendre les tirs. Le 7 septembre le verdict est tombé : le Tribunal administratif de Guadeloupe a une nouvelle fois donné raison à nos associations, l’espèce ne sera pas non plus chassée cette année !
Le pigeon à couronne blanche (Patagioenas leucocephala) est inscrit sur la liste rouge des espèces menacées en Guadeloupe parmi les espèces « En Danger », selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature. Seul le statut « en danger critique » le sépare du statut d’espèce « éteinte à l’état sauvage ». Il y a donc urgence à agir pour préserver cette espèce.
Malgré ce mauvais état de conservation, le préfet a autorisé sa chasse du 1er septembre 2018 au 6 janvier 2019, faisant fi des décisions déjà rendues par le juge administratif lors des saisons de chasse précédentes.
Comme en 2016 et 2017, l’ASFA et l’ASPAS se sont opposées à cette autorisation et ont saisi en urgence le Tribunal administratif de Basse-Terre.
La chasse de cette espèce endémique des Caraïbes faisait courir un risque grave et immédiat à la biodiversité locale puisqu’elle recouvrait notamment une partie de la période de reproduction et de dépendance des jeunes. Une violation du code de l’environnement !
Le 7 septembre, le Tribunal administratif a considéré que la suspension en urgence de la chasse du pigeon à couronne blanche s’imposait au regard :
- de l’absence d’études relatives aux populations de cette espèce et à sa dynamique notamment suite aux violents ouragans survenus l’été dernier dans cette région du monde,
- de l’intégration partielle de la période de reproduction de l’espèce dans la période de chasse autorisée,
- du principe de précaution.
Rappelons en effet que l’ensemble de la faune a été fortement touchée par les ouragans survenus l’été dernier dans les Caraïbes. Leurs habitats naturels ayant été dévastés, les oiseaux survivants ont dû utiliser leurs dernières forces pour trouver de nouveaux gîtes et sources de nourriture. Un impact grave qui n’a pas encore pu être évalué, et auquel il est irresponsable d’ajouter une nouvelle menace telle que la chasse.
Pour l’heure, la chasse est officiellement immédiatement suspendue en attendant la décision sur le fond, qui n’interviendra que dans quelques mois. Nous comptons sur les chasseurs, les administrations (2) et les services de contrôle (3) pour respecter et faire respecter strictement cette interdiction.
La protection intégrale de l’espèce serait, à terme, un minima pour aider le pigeon à couronne blanche à retrouver un niveau de conservation favorable. Nos associations réitèrent leur demande, comme l’ont fait le comité français de l’UICN et le Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel de la Guadeloupe, d’inscription du pigeon à couronne blanche sur la liste des espèces protégées de la Guadeloupe et de la Martinique.
Il est grand temps que l’État français protège réellement la biodiversité riche et fragile des îles d’outremer, singulièrement les espèces endémiques menacées. Il est donc temps que l’État ne soit plus soumis au lobby de la chasse.
(1) ASPAS : Association pour la protection des animaux sauvages
ASFA : Association pour la sauvegarde et la réhabilitation de la faune des Antilles
(2) Préfecture ; Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DEAL) ; Direction de la Mer (DM)
(3) Office National des Forêts (ONF), Service Mixte de Police de l’Environnement (SMPE), Parc National de la Guadeloupe
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