Il ne vous aura pas échappé que l’ASPAS demande l’interdiction de la chasse en parcs et en enclos (voir notre campagne à ce sujet). Reçus par le ministère de la Transition écologique pour évoquer ce dossier, le 5 février dernier, on nous a assurés qu’un nouveau décret allait sortir et que la « réglementation allait évoluer ». Évoluer… vers un mieux ? Suspense total pendant 15 jours ! Non. Très peu en réalité. Nous le savions en sortant de la réunion : le lobby chasse a toujours la mainmise sur les décideurs politiques, et l’interdiction de ces parcs d’attraction pour chasseurs n’est visiblement, hélas, pas pour aujourd’hui.
Seul angle d’attaque possible pour nos gouvernants : celui des risques sanitaires liés à cette pratique opaque, qui concerne environ 1300 parcs et enclos partout en France.
C’est précisément cet aspect qui est abordé dans le projet de nouveau « décret relatif à la maîtrise des populations de grand gibier et de leurs dégâts* », actuellement soumis à la consultation du public jusqu’au 3 mars 2020.
Le Ministère prévoit, entre autres, d’imposer un plan de gestion annuel à tous les enclos de chasse (c’est-à-dire les zones avec habitation et grillage hermétique). Notamment :
– un descriptif des mesures de quarantaine, des mesures sanitaires et de biosécurité appliquées ;
– un descriptif des mesures relatives à l’élimination des déchets ;
– un registre des entrées des animaux, précisant l’origine de ceux-ci.
Par ailleurs, « afin d’assurer la préservation de la biodiversité », la densité maximale des animaux d’un enclos de chasse ne pourra plus « être supérieure à un animal par hectare pour les sangliers. »
Le décret vise également à interdire les introductions de sangliers dans le milieu naturel libre, dans les parcs de chasse (c’est-à-dire des zones sans habitation ou avec clôture non hermétique) et dans les enclos de chasse non commerciaux.
En résumé : les introductions de sangliers ne seront autorisées que dans les enclos de chasse commerciaux, avec un renforcement des mesures de biosécurité.
Pourquoi il faut dire NON à ce décret
L’ASPAS vous invite à vous opposer à ce projet de décret, en participant à la consultation publique jusqu’au 3 mars. Les mesures proposées ne vont pas assez loin, et le ministère ne répond pas à la majorité des points que nous soulevons dans notre campagne contre les enclos de chasse, à savoir :
Une chasse inutile
Cette pratique répond à un objectif unique de divertissement. Elle ne présente aucun intérêt, bien au contraire, du point de vu de l’équilibre agro-sylvo-cynégétique auquel la chasse est légalement censée contribuer (loi 2012-325 du 7 mars 2012).
Une chasse cruelle, contraire à l’éthique
Par définition, les animaux n’ont aucune chance d’échapper à leurs poursuivants. En l’absence de possibilité de contrôle des agents verbalisateurs (propriété privée close) les chasses pratiquées sont contraires à l’éthique et parfois illégales (chasse sans fusil, gibier tué par les chiens ou à l’épieu).
Artificialisation du milieu/ déséquilibres écologiques
Les parcs et enclos de chasse sont censés rester un milieu naturel. Or, la surdensité causée par l’introduction et le nourrissage du grand gibier crée de graves déséquilibres écologiques (surpâturage des prairies, abroutissement des forêts, prédation des sangliers sur les oiseaux nichant au sol).
Engrillagement du milieu naturel / entrave à la libre circulation
L’existence de milliers de kilomètres de clôture infranchissables pour le gibier à poil entrave la continuité écologique des milieux. Outre l’entrave à la circulation du grand gibier, l’engrillagement entrave également la circulation du petit gibier (lièvres, lapins), mais également d’espèces protégées (ex. hérisson).
La circulation des autres utilisateurs de la nature, randonneurs, cavaliers, VTTistes s’en trouve également impactée.
Risques sanitaires / pollution génétique
Le projet de décret ne réglemente que les enclos de chasse, pas les parcs. Les sangliers vont donc continuer à être élevés en France ou importés depuis l’étranger.
Je participe à la consultation
* ATTENTION ! Ce nouveau décret ne concerne pas uniquement la chasse en enclos, mais d’autres mesures réglementaires relatives à la chasse en général :
- une nouvelle mission de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage de prévention pour la formation spécialisée indemnisation des dégâts,
- la définition du nombre minimal et maximal d’animaux à prélever sur les territoires identifiés en déséquilibre sylvo-cynégétique par le comité paritaire de la commission régionale de la forêt et du bois,
- l’interdiction de tirs sélectifs,
- l’encadrement de la participation territoriale
- la suppression de l’autorisation individuelle de chasse anticipée pour le sanglier et le chevreuil ;
- la transmission des données de prélèvements et de dégâts,
- l’avis des centres régionaux de la propriété forestière lors de la création des associations communales de chasse agréées.
Dans un communiqué publié le 17 février, la Ligue pour la protection des Oiseaux (LPO) a attiré l’attention sur le fait que l’adoption de ce décret tel quel permettra aux chasseurs de tirer sangliers, chevreuils et renards dès le 1er juin ! Avec la fin de la chasse aux sangliers désormais repoussée au 31 mars, cela ne laissera à la faune (mais aussi à tous les usagers de la nature…) que 2 mois de tranquillité… Une véritable hérésie !
En plus de l’interdiction de la chasse en enclos, l’ASPAS vous invite donc, dans vos messages, de dénoncer ce nouveau cadeau fait aux chasseurs.
Cet article Chasse en enclos : l’État pas prêt de l’interdire… est apparu en premier sur ASPAS : Association pour la Protection des Animaux Sauvages.