Saisi par l’ASPAS, l’ASFA et la LPO, le Tribunal administratif de Basse-Terre, dans son jugement n°1900952 du 12 mars 2020, annule les arrêtés du préfet de la Guadeloupe du 17 juin 2019 en ce qu’ils autorisent la chasse de la grive à pieds jaunes et du pigeon à couronne blanche en Guadeloupe et à Saint Martin (ces arrêtés avaient été suspendus en urgence le 31 octobre 2019), en considérant que :
- En premier lieu, s’agissant du pigeon à couronne blanche, il ressort des pièces du dossier, non contesté par le préfet, que le pigeon à couronne blanche est une espèce endémique du bassin caribéen, dont l’aire de répartition, centrée sur les Grandes Antilles, s’étend de la Floride à la Guadeloupe. Cette espèce est classée « quasi-menacée » sur la liste mondiale et « en danger » sur la liste régionale pour la Guadeloupe de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), la chasse étant identifiée par les experts de l’UICN comme l’une des principales menaces pesant sur l’espèce. Seul le statut « en danger critique » la sépare du statut d’espèce « éteinte à l’état sauvage ». Enfin, il n’existe aucune évaluation certaine de la population locale et de sa dynamique.
- En second lieu, s’agissant de la grive aux pieds jaunes, il ressort des pièces du dossier que cette espèce endémique des petites Antilles qui aurait récemment disparu de Sainte-Lucie, ne serait plus présente, au niveau mondial, qu’à la Guadeloupe, la Dominique et Montserrat. De plus, le comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’a inscrite sur la liste des espèces menacées d’extinction. Les listes rouges de l’UICN élaborées sur la base d’éléments scientifiques montrent le risque d’extinction de ces espèces au niveau local et, de fait, au niveau mondial pour la Grive à pieds jaunes. Enfin, comme pour le pigeon à couronne blanche, aucune étude ne permet de connaitre les prélèvements que peut soutenir actuellement cette espèce. En 2016, le conseil scientifique régional du patrimoine naturel de Guadeloupe (CSRPN) a rendu un avis favorable à la protection, par arrêté ministériel de ces deux espèces. Enfin, il n’est pas contesté que la situation de ces espèces a été aggravée par les évènement météorologiques violents qu’a connu la Guadeloupe en septembre 2017 avec les ouragans Irma et Maria.
- Dans ces circonstances, compte tenu d’une part des connaissances scientifiques actuelles et d’autre part de l’importance au niveau mondial du rôle de la zone de peuplement de Basse Terre pour la conservation de ces espèces, la chasse du pigeon à couronne blanche et de la grive à pieds jaunes en Guadeloupe et à Saint-Martin apparaît susceptible de menacer gravement le maintien de l’espèce sur ces territoires. Par suite, en autorisant cette chasse dans ces conditions le préfet de la Guadeloupe, représentant de l’État à Saint-Martin, a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’application du principe de précaution résultant de l’article 5 de la Charte de l’environnement et de l’article L. 110-1 du code de l’environnement.
- Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que les associations requérantes sont fondées à demander l’annulation des arrêtés attaqués en tant qu’ils autorisent la chasse à tir du pigeon à couronne blanche et de la grive à pieds jaunes en Guadeloupe et à Saint-Martin et la chasse du pigeon à couronne blanche en Guadeloupe.
Télécharger le jugement : CHASSE GRIVE A PIEDS JAUNES & PIGEON A COURONNE BLANCHE – 2019-2020
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