Alors qu’une étude de l’OFB pointe les risques de la gestion des loups par les tirs, la France autorise à nouveau l’abattage de 110 individus en 2021… L’ASPAS saisit à nouveau la justice.
En 2020, au moins 105 loups été volontairement tués en France (97 par tir officiel, 8 par braconnage). Or « plusieurs signaux montrent une dégradation de la dynamique de la population » de loups, selon une « note technique* » mise en ligne par l’OFB juste avant le réveillon de Noël 2020, passée totalement inaperçue dans les médias. Cette publication confirme ce que nous dénonçons depuis toujours : abattre une telle proportion de la population de loups met en péril la viabilité de l’espèce sur le long terme, et ne règle pas le problème des dommages à l’élevage. Les scientifiques admettent que « s’il est tentant d’aborder la question en indexant un nombre de loups à prélever sur l’effectif total de la population, cette approche est à éviter car les risques observés pour les troupeaux ne sont pas forcément directement proportionnels aux densités d’animaux, particulièrement sur les espèces territoriales et sociales comme le loup »
Pour eux, « la gestion de l’espèce par les tirs – si telle était la volonté de l’État – doit avant tout reposer sur un objectif de gestion des attaques aux troupeaux et non de contrôle des effectifs. »
Pourtant, l’arrêté du 23 octobre 2020 adopté par le Ministre de l’Écologie augmente encore le taux de loups pouvant être abattus en le portant à 19 % voire 21 % de la population de loups en France…
L’ASPAS saisit une nouvelle fois la justice
Face à cette nouvelle augmentation du plafond et la poursuite de cette politique de gestion par le tir, deux recours ont été déposés devant le Conseil d’État, l’un contre l’arrêté du 23 octobre 2020 fixant le protocole des tirs contre les loups, l’autre contre celui adopté le même jour fixant le nombre maximum de spécimens de loups pouvant être « détruits » (19 % à 21 % de la population) chaque année. Ces recours demandent l’annulation de ces arrêtés, mais proposent également au Conseil d’État de poser une « question préjudicielle » à la Cour de Justice de l’Union Européenne sur l’interprétation de la directive « Habitats ».
Le changement c’est maintenant
La France doit se rendre à l’évidence : la gestion par les tirs est inefficace, et contraire à ses engagements internationaux. L’ASPAS réaffirme alors l’impérieuse nécessité d’un changement complet de paradigme : arrêtons de faire croire aux éleveurs que les tirs règleront leurs problèmes, portons véritablement l’effort sur le développement de mesures de protection des troupeaux, et travaillons sur l’acceptation sociale des dommages résiduels que la présence du loup peut occasionner.
30 ans après le retour spontané du loup en France, les nouvelles générations de bergers et d’éleveurs intègrent de plus en plus la donnée « loup » dans leur métier, cherchent à mieux le comprendre, et se démènent pour ne plus « subir le loup ».
Signe que les choses bougent – doucement… – la Confédération paysanne de Côte d’Or a pour la première fois appelé, via un communiqué publié fin décembre 2020, « chaque éleveur » à « intégrer autant que possible la présence des loups comme un paramètre constant dans son système ». À aucun moment dans ce texte le syndicat ne parle d’abattre les loups, ce qui est proprement nouveau et réjouissant ; au contraire, priorité est faite à l’urgence d’informer et de former (aux chiens de protections, notamment), et aux réflexions sur l’adaptation des systèmes d’élevage, car « les loups, qui ne connaissent pas les frontières, n’attendront pas que l’on veuille bien s’organiser ».
Que ses opposants le veuillent ou non, les loups continuent en effet de recoloniser des territoires desquels ils avaient été éradiqués au début du XXe siècle, et il est urgent pour le monde agricole des régions concernées de s’y préparer. Le triste feuilleton des trois loups échappés d‘un parc en Poitou-Charentes en novembre dernier, accusés de s’en être pris lors de leur cavale à plusieurs troupeaux non gardés, devrait servir de signal d’alerte, d’autant que cette région avait déjà recueilli des indices de passage de loups sauvages.
*Drouet-Hoguet, N., Gimenez O. & Duchamp C. MISE A JOUR DES EFFECTIFS ET PARAMETRES DEMOGRAPHIQUES DE LA POPULATION DE LOUPS EN FRANCE : conséquences sur la viabilité de la population à long terme. Note technique OFB / CNRS – novembre 2020
> Le retour du loup en France : une chance pour toute la biodiversité
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