Le ministre de la Transition écologique et solidaire consulte le public sur le nouveau projet d’arrêté fixant pour les 3 prochaines années les listes et les modalités de « destruction des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts » (anciennement dits « nuisibles ») dans chaque département de France.
Envoyez votre avis avant le 27 juin minuit via le formulaire situé en bas de la page qui présente le projet d’arrêté.
Les nouveaux condamnés à mort
Renards, fouines, martres, putois, belettes, corneilles, corbeaux freux, étourneaux, pies, geais : tous ont le malheureux point commun de figurer malgré eux sur la nouvelle « liste de la mort » du Ministère, établie tous les 3 ans. Si l’on se fie aux bilans de piégeage réalisés de 2015 à 2018, ce seraient plus de 2 millions d’animaux sauvages qui pourraient être à nouveau tués, piégés, déterrés d’ici le 30 juin 2022 !
Selon la loi, une espèce peut être classée « susceptible d’occasionner des dégâts » dans un département pour protéger la santé et la sécurité publiques, la faune et la flore sauvages, les activités agricoles, forestières et aquacoles et la propriété en général.
Mis à part une légère amélioration du sort de la fouine, dont le piégeage serait autorisé dans 68 départements (contre 79 précédemment), de l’étourneau (36 départements contre 44) et dans une moindre mesure du corbeau freux (56 contre 58) et de la corneille noire (82 contre 84), le projet d’arrêté est un quasi copier-coller de l’arrêté en vigueur depuis le 1er juillet 2015… Les choses sont même pires pour le renard, puisqu’il redeviendrait « destructible » en Savoie, ainsi que dans… 90 autres départements de France !
Le Ministère de la Transition (de l’Immobilisme) écologique, n’a décidément d’yeux et d’oreilles que pour le lobby chasse, et continue à tourner le dos aux associations de protection animale qui ne cessent de dénoncer l’absurdité de tels classements, qui vont à l’encontre de toutes les études scientifiques sérieuses.
Seule bonne nouvelle : le nombre de piégeurs et de chasseurs diminue d’année en année, et les Français sont de plus en plus sensibilisés à la cause animale et au respect de la biodiversité en général, une pression citoyenne qui finira bien par faire éclater la petite bulle de destructeurs qui lutte pour la survie de ses intérêts macabres.
Les positions de l’ASPAS
L’ASPAS s’oppose de manière générale à la destruction illimitée d’espèces animales autochtones. En plus d’être inutiles, ces abattages portent atteinte aux équilibres écosystémiques et sont à l’origine de souffrances eu égard aux modes d’abattage et aux périodes d’abattage autorisées (pièges non sélectifs et mutilants, déterrage pour le renard, abattage en période d’élevage des jeunes, etc.).
Concernant ce projet en particulier, l’ASPAS demande :
- l’interdiction du déterrage du renard,
- l’arrêt total du piégeage et du tir de la belette et du putois dans les rares départements qui l’autorisent encore,
- la reconnaissance du rôle bénéfique de toutes ces espèces dans les écosystèmes et vis-à-vis des activités humaines,
- une refonte de la procédure de classement qui est une instruction à charge menée par les chasseurs et dont les données sont invérifiables,
- l’impossibilité de tuer ces espèces pour satisfaire les intérêts liés à la chasse,
- la mise en œuvre de méthodes alternatives à la destruction pour toutes les espèces,
- un zonage beaucoup plus précis de l’interdiction de tuer ces espèces en dehors des activités sensibles à leur présence.
Une refonte de notre rapport à la faune commune
Si la notion de « nuisible » a enfin définitivement disparu de nos textes en 2018, ce projet démontre que dans les faits, rien n’a changé. Ce projet reprend mot pour mot les termes de l’arrêté de 2015 qu’il est censé remplacer. Les abattages pourront continuer avec les mêmes méthodes dans quasiment les mêmes départements. Naturellement présentes dans le milieu naturel, ces espèces participent aux équilibres des écosystèmes, et sont bénéfiques aux activités humaines en prédatant d’autres espèces animales ou en disséminant des végétaux. Pour la plupart, elles jouent un rôle de police sanitaire en débarrassant la nature de cadavres d’animaux, évitant ainsi la propagation de maladies.
Des modes de destruction barbares, non sélectifs, aux conséquences non contrôlées
Ce projet d’arrêté continue à autoriser le piégeage de l’ensemble des espèces toute l’année ainsi que le déterrage du renard. Or les pièges tuants, qui provoquent la mort de l’animal dès sa capture ou après de longues minutes de souffrance, sont toujours autorisés en France malgré les risques que cela fait courir aux espèces non ciblées, potentiellement protégées, et aux animaux domestiques.
Le déterrage, quant à lui, engendre des heures de souffrances pour le renard traqué, et pour sa portée lorsque le déterrage a lieu en pleine période d’élevage des jeunes. Ces pratiques barbares et non sélectives devraient être interdites.
En outre, les destructions induisent nécessairement une réponse comportementale des animaux visés : ceux-ci peuvent se déplacer, adapter leur fécondité ou encore laisser une place libre que d’autres animaux vont rapidement occuper. Ces réponses rendent les destructions inutiles, voire contre-productives (propagation de maladies du fait du déplacement d’animaux porteurs d’un germe fuyant les destructions, élevage des jeunes rendu plus facile du fait de l’élimination d’animaux parasites augmentant ainsi les populations, etc.). Les pouvoirs publics, conseillés par le monde cynégétique, continuent d’appliquer des méthodes d’apprenti-sorcier, sources de grande souffrance, sans en étudier les conséquences sur le comportement des animaux.
Des prédateurs naturels tués pour satisfaire le plaisir des chasseurs
L’ASPAS l’a longtemps dénoncé, et certains tribunaux l’ont même sanctionné. Pourtant, aujourd’hui, le ministère l’assume et l’écrit noir sur blanc : les prédateurs naturels peuvent être tués pour protéger le gibier des chasseurs. Cet arrêté prévoit en effet que renard, pie bavarde, belette et autres mustélidés peuvent être tués à proximité des enclos destinés aux lâchers de gibier et dans les territoires où les chasseurs mènent des actions pour favoriser leur gibier préféré. Autant de zones dans lesquelles nos prédateurs naturels sont inévitablement attirés par une nourriture abondante et facilement accessible car peu habituée à la vie sauvage. Un simple loisir, qui plus est aussi funeste que la chasse, ne devrait pas primer sur la préservation de notre patrimoine naturel.
Protéger les activités plutôt que détruire une espèce animale
Les mustélidés peuvent être piégés uniquement à proximité de certaines activités, mais tirés en tout lieu. Le renard peut être tiré partout, mais uniquement près des élevages avicoles à partir du 31 mars. L’étourneau sansonnet peut être tiré uniquement près de certaines cultures, mais être piégé partout. Le geai des chênes peut être piégé dans les vergers et vignobles mais tiré partout, etc. Exceptée la pie bavarde qui ne peut être tuée qu’à proximité de certaines activités quel que soit le mode de destruction choisi, les espèces peuvent être détruites indépendamment des activités à protéger, même dans des lieux où aucun dégât n’a été causé, et même dans des lieux où aucun dégât n’est susceptible d’être causé. L’objectif est donc de détruire un spécimen de l’espèce parce qu’il appartient à cette espèce, et non de trouver une solution à un problème posé par la présence de cet individu. Il est temps de recentrer les réflexions sur les moyens techniques à développer pour protéger efficacement et dans la durée certaines activités, plutôt que de privilégier le recours au fusil, facile mais inutile et dénué de toute éthique.
Des méthodes alternatives obligatoires mais incontrôlables
Les oiseaux sont protégés par la directive « Oiseaux », la martre et le putois par la directive « Habitats ». À ce titre, leur destruction ne peut être autorisée qu’après recherche, étude et mise en œuvre infructueuse de méthodes alternatives qui permettraient de protéger les activités humaines au moins aussi efficacement que leur destruction. Pourtant, ce projet n’impose pas que la réalité de cette mise en œuvre soit constatée par une personne indépendante, laissant à chacun la responsabilité de respecter les dispositions européennes. Or la difficulté à initier ces alternatives et la facilité de recourir aux armes n’incitent pas les acteurs à préférer la méthode douce, pourtant plus efficace que la destruction.
Campagnols : une lutte naturelle reconnue mais non exploitée
Ce projet entérine l’interdiction de tuer des renards et des mustélidés dans les zones où sont mises en œuvre des luttes chimiques contre les campagnols, reconnaissant ainsi le rôle d’auxiliaires que peuvent jouer ces petits prédateurs. Cependant, la lutte chimique est toujours de rigueur, ce qui présente le problème de l’utilisation de substances nocives en pleine nature et favorise l’ingestion de poisons par les prédateurs de campagnols. En outre, lutte naturelle et lutte chimique coexistent alors que la lutte naturelle est bien plus efficace en amont des pics de pulluation, soit avant que la lutte chimique ne soit engagée.
Interdire l’utilisation des armes en pleine ville
La destruction à tir des mustélidés est interdite dans les zones urbanisées. Pour des questions de sécurité évidentes, cette interdiction devrait être étendue à toutes les espèces.
Le renard, une espèce classée partout en France
Le renard est classé dans 91 départements (contre 90 la saison précédente, contrairement à ce qu’écrit le ministère). Cette espèce autochtone peut donc être détruite par piégeage et déterrage sur la quasi-totalité du territoire français. Pourtant, cette espèce joue un rôle utile sur les populations de certains micro-mammifères et contre la propagation de maladies en éliminant cadavres et animaux malades.
Les dégâts causés aux poulaillers interviennent en général sur des installations vétustes qui ne sont pas correctement protégées, et ne justifient pas le classement du renard partout en France.
Le tort réel de cette espèce prédatrice et opportuniste est de s’attaquer un peu trop souvent au « gibier » des chasseurs, qui voient en elle une concurrente insupportable.
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Cet article URGENT : L’Etat s’apprête à autoriser le massacre de 2 millions d’animaux ! est apparu en premier sur ASPAS : Association pour la Protection des Animaux Sauvages.