Malgré un territoire encore largement intact, le Plateau des Guyanes fait l’objet de convoitise pour sa richesse en or. Selon une étude de 2014 [1], plus de 40% de la déforestation amazonienne due à l’orpaillage se déroulait dans cette région. C’est à partir de ce constat que le WWF publie aux côtés de ses partenaires régionaux [2] une étude et une cartographie détaillée des impacts de l’orpaillage sur les forêts et les cours d’eau de quatre territoires du Plateau des Guyanes (Guyana, Suriname, Guyane française, Amapá), pour la période 2001-2015.
L’étude, coordonnée par le WWF et l’ONF International en collaboration avec les institutions forestières et environnementales de chaque territoire, montre une progression régionale conséquente de la déforestation de 2001 à 2015. Ainsi, sur environ 157 000 ha de forêts détruits par l’extraction de l’or depuis 2001, il apparaît que 72% se sont produits au cours de la dernière période 2008-2015.
Les résultats de l’étude illustrent aussi un déplacement des activités aurifères d’Est en Ouest au cours des dernières années, avec une concentration de 95% de la déforestation au Guyana et au Suriname au cours de la période 2008-2015. Néanmoins, le ralentissement de la déforestation observée en Guyane française n’indique pas forcément une amélioration de la situation ces dernières années. En effet, le parc Amazonien de Guyane a récemment indiqué une augmentation de 78% du nombre de sites illégaux sur son territoire par rapport à mars 2017 et l’activité illégale bat des records historiques depuis la création du Parc, il y a 10 ans. L’augmentation alarmante de ces activités illégales souligne la nécessité d’actions transfrontalières renforcées en termes de coopération judiciaire entre les autorités guyaniennes, surinamaises, françaises et brésiliennes.
Étant donné que l’orpaillage se déroule principalement dans le lit des rivières, il a également un impact considérable sur les cours d’eau et leur contamination.
L’étude révèle ainsi que la longueur totale des cours d’eau détruits par les activités aurifères jusqu’en 2015 a été évaluée à 5 840 km sur l’ensemble de la région, s’accompagnant d’une hausse probable de la turbidité et de la concentration en mercure des cours d’eau, en aval des sites orpaillés.
Le mercure, métal neurotoxique et reprotoxique interdit en Guyane, est encore couramment employé par une majorité d’orpailleurs au Guyana ainsi qu’au Suriname. Mais ce métal est aussi naturellement présent dans les sols, d’où il est relargué du fait de la déforestation et de l’érosion du sol par les activités minières. Il se trouve alors libéré dans les écosystèmes et contamine les chaînes alimentaires des régions orpaillées jusqu’aux populations locales et autochtones, avec des conséquences graves pour leur santé [3].
Face à l’accroissement non contrôlé des impacts des activités extractives soulignés dans cette étude, il est urgent que l’ensemble des Etats concernés poursuivent les efforts de coopération et puissent ratifier et appliquer la Convention internationale de Minamata [4], visant l’abandon de l’utilisation du mercure associé aux activités d’orpaillage.
[1] Nora L Alvarez-Berríos and T Mitchell Aide, « Global demand for gold is another threat to tropical forests« , Environ. Res. Lett. 10 (2015)[2] Les partenaires de l’étude sont : au Guyana, la Guyana Forestry Commission (GFC), au Suriname le Stichting voor Bosbeheer en Bostoezicht (SBB), en Amapá, le Secretaria de Estado do Meio Ambiente do Amapá (SEMA), en Guyane le Parc Amazonien de Guyane (PAG) et l’Office National des Forêts (ONF).[3] Pour plus d’information, visitez notre page web dédiée aux impacts de l’orpaillage illégal en Guyane française.[4] Entrée en vigueur le 16 août 2017, la Convention de Minamata dont la COP1 s’est déroulée entre les 24 et 29 septembre 2017, a pour objectif de réduire progressivement l’utilisation, l’émission et le rejet de mercure à l’échelle globale.