Lancé en septembre 2015 dans l’objectif de comprendre et évaluer la durabilité des pêcheries méditerranéennes en France et en Espagne, le projet Medfish porté par le WWF et le MSC passe aujourd’hui à une nouvelle étape clé. 14 pêcheries (7 françaises, 7 espagnoles) viennent d’être sélectionnées pour une première évaluation de leur durabilité selon le Référentiel de Pêche Durable du MSC.
Conformément aux règles du MSC, des organismes de certification indépendants accompagnés d’experts locaux seront ainsi en charge de pré-évaluer les performances de ces pêcheries sur la base du référentiel MSC. Des plans de progrès sur-mesure seront ensuite proposés aux pêcheries impliquées.
Comprendre la diversité de la pêche en Méditerranée
La première phase du projet MedFish a consisté à mieux connaître la structuration et le fonctionnement des pêcheries en Méditerranée. Réalisée par deux organismes de certification indépendants (SAI Global en France et Acoura Marine en Espagne), une première étape de recensement a tout d’abord permis de lister l’ensemble des pêcheries existantes dans les zones couvertes par le Projet Medfish : 337 pêcheries en France et 370 en Espagne.
Aujourd’hui, les 1400 bateaux de pêche français et les 3 646 bateaux espagnols enregistrés opèrent en Méditerranée via 11 types d’engins de pêche différents, avec une grande majorité de filets maillants dans les deux pays voisins.
Suite à ce recensement, une phase plus approfondie de cartographie a permis de répertorier les pratiques et l’environnement de 47 pêcheries en France et 50 en Espagne et de décrire respectivement les 41 et 42 espèces concernées par ces pêcheries : une cartographie représentative des caractéristiques de la pêche en Méditerranée, de sa gestion et de l’environnement marin méditerranéen dans son ensemble.
La petite pêche y est majoritaire, la flotte multi-spécifique et polyvalente : 90% des pêcheries françaises pratiquent une pêche artisanale en Méditerranée, utilisant principalement les métiers du filet en Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côte d’Azur et de l’hameçon en Corse. En Espagne, 65% des pêcheries sont artisanales.
En France, 5 espèces sortent du lot puisque l’anchois, la sardine, le merlu, le thon rouge et le poulpe représentent plus de 60% des débarquements en volume. Des fiches analytiques pour les 41 espèces recensées dans les 47 pêcheries françaises sont disponibles sur notre site web.
Abri d’une grande biodiversité, la Méditerranée compte par ailleurs 677 aires marines protégées dont 100 situées dans les eaux françaises, auxquelles s’ajoutent 20 récifs artificiels favorisant une recolonisation par la faune et la flore des sols marins.
Lors de ce travail de cartographie, les organismes de certification ont dû faire face à un obstacle majeur: le manque et l’hétérogénéité des données et la disparité des sources.
Ainsi, pour la France, les auditeurs de SAI Global ont recoupé des informations provenant entre autres de l’IFREMER, des CRPMEMs, des DDTMs, des DMLs, de la FAO, de la CICTA ou de la CGPM. Contrairement à l’Espagne, l’accès aux données sur les débarquements des pêcheries françaises n’a pas été possible. En Espagne, des évaluations de stocks de poissons sont disponibles pour 10 espèces, tandis qu’en France elles sont disponibles pour 6 stocks : le merlu, le rouget barbet, la sardine, l’anchois, le thon rouge et l’espadon.
Margaux Favret, Responsable Pêcheries chez MSC France commente : « Le manque et la fiabilité des données concernant la pêche ou le marché sont aujourd’hui un des freins à la durabilité des pêcheries en Méditerranée. Sans elles, on ne peut analyser avec précision les impacts d’une pêcherie sur une population de poisson et sur les écosystèmes. Les pré-évaluations MSC des pêcheries du Projet Medfish nous permettront d’y voir plus clair sur les données à développer. »
Évaluer un échantillon de pêcheries représentatives du secteur en Méditerranée
A l’issue de ce travail de cartographie, 14 pêcheries représentatives ont été sélectionnées, en fonction des espèces, des métiers, de leur intérêt sur le marché, du volume des captures et de leur motivation, et feront l’objet d’une évaluation. Nous pourrons par exemple en savoir plus sur la durabilité de la pêcherie de poulpe, pêché au casier dans le golfe du Lion, une espèce emblématique de la Méditerranée qui se répartit sur toute la côte française et très valorisé sur le marché des produits de la mer.
Dans le golfe du Lion, ce sont également les impacts de la pêche à la sardine à la senne, du merlu au chalut, du bar et de la dorade royale au filet maillant qui seront analysés. Chaque espèce concernée par ces pêches a été sélectionnée en fonction de son importance environnementale et sociale à l’échelle locale mais aussi de leur intérêt commercial sur le marché national. D’autres espèces moins connues, mais tout aussi importantes comme le Denti à la palangre de Corse, la telline pêchée à la drague à la main dans le Golfe du Lion ou la nasse changeante, pêchée à la nasse au large du Languedoc-Roussillon seront également pré-évaluées.
Les 7 pêcheries françaises et les 7 pêcheries espagnoles ont été choisies par le WWF et le MSC, sur les conseils d’un groupe consultatif français et d’un groupe consultatif espagnol composé de représentants de pêcheurs, d’entreprises du marché, de scientifiques ou encore de fondations.
« Le projet MedFish a pour vocation de donner des clés d’amélioration aux pêcheries sélectionnées. Il prend en compte les spécificités méditerranéennes et une des clés de son succès futur est l’appropriation de l’outil par les pêcheurs concernés. Face à l’inquiétante situation des stocks méditerranéens, le projet Medfish doit développer en complète collaboration avec les professionnels des plans d’action pour aller vers plus de durabilité »
Pour que le projet tienne ses promesses, il est important que pêcheries, ONG, instituts scientifiques, administrations publiques, entreprises commerciales et distributeurs se mobilisent à nos côtés. C’est la raison pour laquelle nous invitons toute personne intéressée par la gestion des pêcheries en Méditerranée à s’investir dans ce projet.
Le Projet Medfish a été rendu possible grâce au généreux soutien de la Fondation Daniel & Nina Carasso, du Resources Legacy Fund et de la Fondation Adessium.