Sept ans après les débats houleux sur la pêche profonde au Grenelle de la Mer et quatre ans après que la Commission européenne a mis une proposition de règlement sur la table, un accord sur le règlement européen encadrant la pêche profonde a enfin été trouvé aujourd’hui entre le Conseil, le
Parlement européen et la Commission. Il interdit notamment le chalutage profond au-delà de 800 mètres de profondeur.
Cette interdiction, que les ONG auraient préférée à 600 mètres, est une avancée majeure pour la sauvegarde des mers européennes. Seule ombre au tableau, le champ d’application du règlement a été restreint sous la pression de l’Espagne en excluant la plupart des eaux internationales … où pêchent les navires espagnols.
« Cette victoire a été possible grâce à une très forte mobilisation de l’opinion publique française. Cette mobilisation a permis de rendre visible ce qui se passe dans les profondeurs : personne ne pourrait défendre un tel massacre s’il avait lieu en surface à la vue de tous. Les acteurs économiques ont été les premiers à réagir : Carrefour, Casino, Auchan et surtout Intermarché, propriétaire de la première flotte française de pêche fraîche, qui a annoncé en janvier 2014 arrêter le chalutage au-delà de 800 mètres et, en mars 2016, arrêter toute pêche profonde d’ici 2025. Côté gouvernement, il aura fallu trois ans pour obtenir, en novembre dernier, le revirement de position de la France : après avoir bloqué les négociations européennes, la France a, sous l’impulsion de Ségolène Royal, soutenu l’interdiction du chalutage à 800m ce qui a été décisif. Ce combat montre la force d’une opinion publique mobilisée pour faire changer les acteurs économiques et politiques » réagit Pascal Canfin, directeur général du WWF France.
« En France, cette bataille a été marquée pendant longtemps par l’opacité sur les données scientifiques et économiques. La publication des données de l’Ifremer, réclamée depuis 2009 et obtenue en 2014, a permis d’objectiver le débat en montrant qu’un seul navire serait concerné par une interdiction à 800 mètres et en soulignant l’importance de l’impact du chalutage de fond sur des espèces menacées d’extinction. Les décisions prises par les grands acteurs économiques français ont permis au gouvernement d’avancer. C’est aussi en faisant toute la lumière sur la réalité du marché des centrales à charbon dans le monde, que les ONG ont obtenu la fin des soutiens de la France aux exportations. On gagne toujours à mettre sur la table l’ensemble des données. Si certains acteurs le craignent, les ONG le réclament » souligne Isabelle Autissier, présidente du WWF France.