Une chute de plus de moitié des populations mondiales d’espèces sauvages en l’espace d’à peine quatre décennies : tel est le constat auquel aboutissent les calculs du Rapport Planète Vivante 2014 du WWF. Ce déclin continu de la vie sauvage souligne plus que jamais la nécessité de solutions durables pour mettre fin à une véritable hémorragie planétaire.
Le Rapport Planète Vivante 2014 montre parallèlement que l’Empreinte écologique (indicateur exprimant la demande de ressources naturelles de la part de l’humanité) poursuit sa tendance à la hausse. Si l’érosion de la biodiversité et le maintien d’une empreinte insoutenable menacent tous deux les systèmes naturels et le bien-être humain, ils nous invitent aussi à prendre des actions pour inverser les tendances à l’œuvre.
« La biodiversité est une composante cruciale des systèmes permettant la vie sur Terre, mais elle est aussi le baromètre de ce que nous faisons subir à notre planète, notre unique demeure. Ce qu’il nous faut de toute urgence, c’est une action planétaire dans tous les secteurs de la société pour bâtir un avenir plus durable », déclare le Directeur du WWF-International, Marco Lambertini.
Le Rapport Planète Vivante 2014 est la dixième édition de la publication bisannuelle phare du WWF. Intitulé Des hommes, des espèces, des espaces, et des écosystèmes, il suit l’évolution de plus de 10 000 populations d’espèces vertébrées (regroupées dans une base de données tenue par la Zoological Society of London) entre 1970 et 2010 pour établir l’Indice Planète Vivante. Le calcul de l’Empreinte écologique de l’humanité est quant à lui effectué par le Global Footprint Network.
L’Indice Planète Vivante calculé cette année s’appuie sur une méthodologie révisée qui reflète plus fidèlement la biodiversité mondiale et brosse un tableau plus précis de l’état de santé de notre environnement naturel. Si elle révèle une nouvelle dégradation du sort des espèces du globe depuis la publication des rapports précédents, l’étude s’attache aussi à exposer plus en détail les solutions existantes.
« Les conclusions de ce Rapport Planète Vivante montrent plus que jamais que la complaisance n’a pas lieu d’être. Pour nous, il est essentiel de saisir l’occasion (tant que nous le pouvons) de nous développer durablement et de créer un avenir où les individus peuvent vivre et prospérer en harmonie avec la nature », avertit Marco Lambertini.
Recul critique des espèces sauvages
Selon le rapport, les populations de poissons, d’oiseaux, de mammifères, d’amphibiens et de reptiles ont régressé en moyenne de 52 % depuis 1970. Les espèces d’eau douce sont les plus touchées, puisqu’avec une baisse de 76 %, elles subissent un déclin près de deux fois supérieur à celui des espèces terrestres et marines. Ces pertes sont survenues pour l’essentiel dans les régions tropicales, l’Amérique latine ayant payé le plus lourd tribut.
De l’étude, il ressort que la première menace pesant sur la biodiversité est constituée par les impacts combinés de la disparition et de la dégradation des habitats. Si la pêche et la chasse représentent aussi des facteurs notables, le changement climatique tend néanmoins à devenir de plus en plus préoccupant, au point que les études citées dans le rapport en font l’une des causes possibles de l’extinction des espèces.
« L’ampleur de la perte de biodiversité et les dégâts subis par des écosystèmes tout simplement essentiels à notre existence sont alarmants », conclut Ken Norris, Directeur scientifique à la Zoological Society of London. « Ces dégâts ne sont pas inévitables, car ils sont une conséquence du mode de vie que nous choisissons. Certes, le rapport montre que la situation est grave, mais il y a encore de l’espoir. La protection de la nature passe par une action de conservation ciblée, par la volonté politique et par le soutien de l’industrie. »
Même si le recul de la biodiversité dans le monde atteint un niveau critique, le Rapport Planète Vivante 2014 montre comment la gestion efficace de certaines aires protégées a permis de soutenir les espèces sauvages, en évoquant entre autres l’exemple du Népal, où la renaissance des populations de tigres est bien réelle depuis plusieurs années. Il insiste aussi sur le fait que, de manière générale, les populations des aires terrestres protégées connaissent un rythme de déclin moitié moins rapide que celles des zones non-protégées.
Une Empreinte écologique sans cesse plus large
Selon le rapport, la demande de ressources planétaires de l’humanité dépasse de plus de 50 % l’offre renouvelable de la nature : en d’autres termes, il nous faut 1,5 Terre pour produire les ressources correspondant à notre Empreinte écologique du moment. Cet état de « dépassement global » signifie, par exemple, que le rythme auquel nous exploitons les forêts, pompons l’eau douce et rejetons du CO2 dépasse celui auquel les arbres repoussent, les aquifères se reconstituent et la nature séquestre nos émissions.
« Le dépassement écologique, c’est LE défi du 21e siècle », prévient Mathis Wackernagel, Président et co-fondateur de Global Footprint Network. « Près des trois quarts de la population mondiale vit dans des pays présentant à la fois des déficits écologiques et de faibles revenus. Les contraintes de ressources font que nous devons avant tout chercher comment améliorer le bien-être humain autrement que par la simple croissance. »
C’est la raison pour laquelle le découplage entre empreinte et développement apparaît comme une priorité mondiale fondamentale. L’Empreinte écologique par habitant des pays à haut revenu a beau être cinq fois supérieure à celle des pays à bas revenu, les études prouvent cependant qu’il est possible d’accroître le niveau de vie tout en abaissant la consommation de ressources.
Les 10 pays présentant l’Empreinte écologique par habitant la plus forte sont, dans l’ordre, le Koweït, le Qatar, les Emirats arabes unis, le Danemark, la Belgique, Trinité-et-Tobago, Singapour, les Etats-Unis, Bahreïn et la Suède.
La connexion climatique
Le rapport suit de quelques mois la publication d’une étude des Nations unies soulignant les impacts croissants du changement climatique et corrobore la conclusion selon la
quelle le climat affecte déjà la santé de la planète.
Selon le Rapport Planète Vivante 2014, plus de 200 bassins fluviaux abritant quelque 2,5 milliards d’habitants connaissent une grave pénurie hydrique pendant au moins un mois par an. Sachant que près d’un milliard de personnes souffrent déjà de la faim, il montre comment l’évolution du climat, associée aux changements d’utilisation des sols, menace la biodiversité et pourrait conduire à l’aggravation des pénuries alimentaires.
La tenue de négociations constructives débouchant sur une convention climatique internationale fait justement partie des pistes portant la promesse d’une inflexion de ces tendances.
La conclusion d’un accord mondial ouvrant la voie à une économie faiblement carbonée est en tout état de cause essentielle, la consommation de combustibles fossiles étant aujourd’hui le facteur dominant de l’Empreinte écologique.
Pour Philippe Germa, Directeur général du WWF France, « les impacts du dérèglement climatique se font déjà sentir sur les espèces, les écosystèmes, et nos sociétés qui en dépendent. Si nous n’agissons pas de manière ambitieuse pour réduire nos émissions, nous franchirons les limites dans lesquelles la nature et les hommes peuvent s’adapter au changement climatique. Le sommet du secrétaire général des Nations Unies sur le climat qui vient de s’achever à New York a permis de montrer que les entreprises, les collectivités, les gouvernements qui font les bons choix pour réduire leur empreinte sont déjà nombreux et qu’ils en tirent des avantages économiques et sociaux : le WWF va entretenir cette dynamique en vue d’atteindre un accord satisfaisant lors de la Conférence des Nations Unies sur le climat qui se tiendra à Paris fin 2015 ».
Un autre cycle de négociations consacré à la définition d’une série d’objectifs de développement donne par ailleurs l’occasion aux Etats de se pencher sur les moyens de protéger les systèmes naturels d’une planète appelée à compter plus de 9,5 milliards d’habitants dans les décennies à venir.
Des solutions durables
Le Rapport Planète Vivante 2014 joue le rôle de plateforme globale de dialogue, de prise de décision et d’action pour les gouvernements, les entreprises et les sociétés civiles à une heure critique pour la planète.
Il expose la Perspective Une seule planète du WWF en proposant des stratégies visant à préserver, produire et consommer plus raisonnablement, tout en donnant des exemples de la manière dont les communautés font déjà les bons choix pour réduire leur empreinte et la perte de biodiversité.
« La nature, c’est à la fois une bouée de sauvetage et un tremplin vers la prospérité. Mais au-delà de ça, ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que nous sommes tous concernés : où que nous vivions sur le globe, nous avons tous besoin de nourriture, d’eau douce et d’air pur. A l’heure où tellement d’individus vivent encore dans la pauvreté, il est essentiel de travailler ensemble pour trouver des solutions utiles à chacun de nous », déclare Marco Lambertini.
En Asie, le rapport décrit les innovations adoptées par les villes pour réduire leurs émissions carbonées, intégrer les énergies renouvelables et promouvoir la consommation durable. En Afrique, il donne un aperçu de la manière dont les gouvernements peuvent travailler avec l’industrie pour protéger les aires naturelles. Et à travers d’autres exemples tirés de l’ensemble du globe, il présente des initiatives destinées à lutter contre la pollution, transformer les marchés et améliorer la vie de tous.
L’intérêt de la Perspective Une seule planète du WWF est unique : il s’agit de montrer que chaque coin du globe peut contribuer au maintien de l’empreinte globale dans les limites des capacités de la Terre à renouveler ses ressources. En suivant le programme du WWF, la société se donne bel et bien les moyens de commencer à renverser les tendances décrites dans le Rapport Planète Vivante 2014.
Le rapport complet, la synthèse et les supports d’accompagnement sont disponibles à l’adresse wwf.fr/lpr2014