Rapport Planète Vivante Océans 2015 : le déclin des océans met en péril la sécurité alimentaire de l'humanité

Pêcheurs en mer dans les Îles Kai, Indonésie<br />© Juergen Freund / WWF

Il est urgent d'agir ! Publié ce jour, le Rapport Planète Vivante Océans du WWF tire la sonnette d'alarme. Tenant un rôle critique en matière de sécurité alimentaire, les populations de poissons connaissent un tel déclin à l'échelle mondiale que certaines risquent de s'effondrer. Le rapport du WWF estime cependant qu'il est encore temps d'agir contre les menaces pesant sur les océans pour inverser la tendance : des solutions existent et nous les connaissons !
 

Des stocks de poissons en déclin

Les populations d'animaux marins (mammifères, oiseaux, reptiles et poissons) se sont contractées en moyenne de moitié sur la planète au cours des quatre dernières décennies. Certaines ont même vu leur effectif fondre de près de 75 % et les espèces les plus prisées comme le thon, le maquereau et la bonite subissent le déclin le plus marqué. Si ces conclusions constituent une mauvaise nouvelle pour toutes les nations, elles le sont plus encore pour les plus exposées, notamment les populations côtières dépendant entièrement des produits de la mer.

 

« Face à nos constats et à la mesure de l'urgence d'un changement de trajectoire, nous avons avancé la date de publication de notre rapport dressant le portait le plus fidèle possible de la santé de nos océans », explique Marco Lambertini, Directeur général du WWF International. « En l'espace d'une seule génération, les activités humaines ont gravement dégradé les océans en capturant les poissons à un rythme supérieur à celui de leur reproduction et en en détruisant les nourriceries. De profonds changements sont indispensables si l'on veut rétablir l'abondance de la vie océanique pour les générations futures », ajoute Isabelle Autissier, Présidente du WWF France.

 

« Ce à quoi nous assistons, est une course au poisson qui pourrait bien se terminer par l'épuisement d'une source alimentaire vitale pour les individus et par la disparition d'un moteur économique majeur. L'effondrement des écosystèmes océaniques est en mesure de déclencher une grave crise économique et de compromettre les résultats de la lutte que nous menons pour éradiquer la pauvreté et la malnutrition », prévient Marco Lambertini.

 

Le rapport révèle un déclin de 49 % des populations marines entre 1970 et 2012. Effectuée sur une base d'observation de 5 829 populations appartenant à 1 234 espèces, l'analyse s'appuie sur une série de données près de deux fois plus riche que celle des analyses passées et dresse ainsi un tableau plus clair, mais aussi plus inquiétant de l'état des océans.

 

Outre la chute libre des stocks de poissons, le rapport met aussi en évidence le déclin prononcé des récifs coralliens, des mangroves et des herbiers marins qui accueillent nombre d'espèces de poissons et rendent de précieux services aux populations. Les récifs coralliens et prairies sous-marines pourraient ainsi disparaître du globe d'ici 2050 sous l'effet du changement climatique. Sachant que plus de 25 % de toutes les espèces marines en sont les hôtes et que près de 850 millions de personnes bénéficient directement de leurs services économiques, sociaux et culturels, la perte des récifs coralliens représenterait une extinction catastrophique, aux conséquences dramatiques sur les communautés.

 

Si la surexploitation apparaît comme la première menace pour la biodiversité océanique, l'étude estime que le changement climatique est également à l'origine de mutations océaniques plus rapides qu'à n'importe quelle autre époque depuis des millions d'années. L'élévation des températures et de l'acidité des océans, attribuable au dioxyde de carbone, aggrave les impacts négatifs de la surpêche et des autres grandes menaces, telles la dégradation des habitats et la pollution.

 

« Bonne nouvelle tout de même : des solutions existent et nous les connaissons. L'océan est une ressource renouvelable capable de répondre aux besoins de toutes les générations futures si les pressions auxquelles il est exposé sont efficacement atténuées », précise Isabelle Autissier. « Si nous respectons des limites, l'océan contribuera pleinement à la sécurité alimentaire, aux moyens d'existence, aux économies et à nos systèmes naturels».

 

Que pouvons-nous faire ?

Les principales mesures visant à préserver les ressources océaniques consistent à sauvegarder et à reconstituer le capital naturel marin, à consommer plus raisonnablement et à donner la priorité au développement durable.

 

Pour inverser cette triste tendance, les dirigeants du monde entier doivent se mobiliser et faire en sorte que la santé des océans et la préservation des habitats côtiers tiennent une place de premier plan dans la mise en œuvre des Objectifs de développement durable de l'ONU, officiellement approuvés à la fin du mois (Agenda 2030 pour le développement durable) et dont l'objectif réside dans la lutte contre la pauvreté et le renforcement de la sécurité alimentaire. Il est essentiel que l'application politique et financière de l'agenda remédie à la destruction des habitats, à la surpêche, à la pêche illégale et à la pollution marine.

 

En début d'année, le rapport du WWF: Aires marines protégées, un bon investissement pour la santé des océans, montrait ainsi tout l'intérêt environnemental mais également économique d'un accroissement des AMP à l'échelle internationale pour protéger les actifs océaniques. L'étude démontrait  ainsi que  chaque dollar investi dans la création d'aires marines protégées peut tripler les bénéfices qui en sont retirés, notamment en matière d'emploi, de protection côtière et de pêches. L'analyse révélait enfin que la protection accrue des habitats critiques, si elle devenait effective, se traduirait par des bénéfices nets compris entre 490 et 920 milliards d'US$ au cours de la période 2015-2050.

 

Les décisions prises lors de la conférence mondiale pour le climat se tenant à Paris dans quelques semaines auront un impact décisif sur l'avenir des océans. Or les engagements internationaux existants sont très loin de suffire à éviter des niveaux de réchauffement et d'acidification jugés désastreux pour les systèmes océaniques dont, en fin de compte, nous dépendons tous.