Le secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique (CCNUCC) vient de présenter la synthèse des 119 contributions climat annoncées par 147 pays - l'Union européenne représente 28 pays - en vue de la COP21. Ces contributions - Intended Nationally Determined Contributions (INDCs) - feront partie intégrante d'un nouvel accord climatique qui doit être adopté en décembre à Paris.
Sur la base de ces contributions annoncées, qui recouvrent 86% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, la synthèse témoigne d'une plus forte mobilisation mondiale contre le dérèglement climatique. Le document montre bien que ces promesses mises sur la table vers la COP21 permettraient d'enclencher - si elles sont mises en œuvre - un décrochage des émissions par rapport aux engagements pris lors de la Conférence climat de Cancún en 2010. En effet, elles donneraient lieu à un ralentissement mondial de la croissance des émissions d'ici 2025 et 2030 par rapport aux deux précédentes décennies.
Malheureusement, au vu des promesses actuelles, il ne sera pas possible d'atteindre un pic mondial des émissions dans des délais suffisants pour éviter un dérèglement climatique hors de contrôle, notamment d'ici 2020 comme le préconise le WWF sur la base des travaux scientifiques.
Selon Samantha Smith, directrice de l'initiative mondiale Climat et Energie au WWF, « Ces engagements représentent une diminution large et notable de ce qui est requis pour lutter contre le changement climatique. Toutefois, les engagements remis à ce jour ne représentent que la moitié du chemin à faire pour éviter les pires impacts du dérèglement climatique, selon les scientifiques.
Les pays doivent, sans attendre, faire plus d'efforts pour rattraper le retard et éviter une trajectoire qui nous mènerait vers une augmentation de la température moyenne mondiale de 3°C d'ici à la fin du siècle qui serait bien trop fort pour l'humanité, les peuples et les écosystèmes vulnérables. Les pays peuvent maintenant prendre leur juste part de responsabilité en agissant avec un sentiment d'urgence, de collaboration et d'équité. »
Selon Pierre Cannet, responsable du programme climat et énergie au WWF France, « Ces contributions ne sont qu'un point de départ vers l'accord et les décisions de la COP21. Pour qu'elles puissent dépasser le stade de promesses, les décideurs du monde doivent maintenant s'accorder sur un mécanisme robuste pour en assurer le suivi, autour de périodes de cinq ans et la revue à la hausse face à la science et l'équité. Il faut donc maintenant dépasser l'exercice de communication pour créer du lien au niveau mondial et rattraper le retard pris dans l'action climatique avec davantage de moyens mobilisés.
La COP21 doit maintenant aboutir à une véritable architecture mondiale qui crée ce lien nécessaire et apporte de l'engagement entre ces contributions, pour y connecter les questions de soutiens financiers et technologiques, et celles de l'adaptation.
Malgré les avancées nous voyons clairement que nous ne sommes pas dans les clous : d'ici 2030, plus de 91% du budget carbone total devrait être épuisé. Les décideurs ne pourront donc pas rester les bras croisés sur ces promesses climatiques. Ils doivent acter à Paris qu'ils sont prêts à se retrousser les manches pour travailler à plus d'ambition et de collaborations avant que la fenêtre d'action ne se referme définitivement et qu'il ne soit plus possible de limiter la hausse mondiale bien-dessous de 2°C. »
La synthèse offre aussi une perspective sur les moyens d'aller plus loin. Elle souligne qu'une grande part des efforts de réductions d'émissions annoncés par les pays pauvres dépend d'un appui de la part des pays plus riches. L'accord de Paris devra garantir ces soutiens financiers et technologiques afin d'assurer que tous les pays prennent part à l'effort général de manière équitable.
Enfin, il faut bien noter que ce rapport de synthèse ne traite que des questions de réductions d'émissions. Bien d'autres dimensions restent à prendre en compte dans les prochains états des lieux de l'action mondiale contre le dérèglement climatique : adaptation aux impacts du changement climatique, soutiens aux pays les plus vulnérables, financements et soutiens technologiques, partenariats.