Éditorial : Les zones humides urbaines, indispensables pour nos villes
L’urbanisation est l’une des grandes caractéristiques de notre époque. Elle façonne nos paysages et transforme nos modes de vie. Aujourd’hui, quatre milliards de personnes, c’est-à-dire près de la moitié de l’humanité, vit en zone urbaine. Cette tendance fait peser une menace majeure sur la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides : plus les villes grandissent, plus la demande de terres aug- mente, et plus les zones humides sont dégradées, détruites, remblayées. On estime qu’en 50 ans, l’étendue des zones humides a diminué de 35 % dans le Monde, un rythme trois fois plus élevé que la déforestation.
Or, lorsqu’elles sont préservées ou utilisées de façon du- rable, les zones humides sont des sources de multiples bienfaits économiques, sociaux et culturels, y compris pour les villes. Elles absorbent pendant les tempêtes les excé- dents de pluies, réduisant ainsi les inondations dans les villes, et empêchant les catastrophes et les coûts connexes. La végétation abondante des zones humides sert de filtre aux eaux usées industrielles et domestiques, et contribue à l’amélioration de la qualité de l’eau. Les zones humides sont donc précieuses et doivent être prises en compte dans l’aménagement des villes.
Consciente de ces faits, la Convention de Ramsar sur les zones humides, dont les 172 Parties contractantes sont convenues d’assurer la conservation et l’utilisation ration- nelle des zones humides de leur territoire, a créé un label dédié. Ce programme volontaire offre l’occasion aux villes qui attachent de la valeur à leurs zones humides naturelles ou artificielles d’acquérir une reconnaissance internationale, donnant ainsi un éclairage positif à leurs efforts.
Le label « Ville des Zones Humides » accrédité par la conven- tion de Ramsar, ou « Ville Ramsar », encourage les villes proches de sites Ramsar ou qui en dépendent à mettre en évidence et à renforcer une relation positive avec ces éco- systèmes inestimables. Notamment par une plus grande sensibilisation du public et par sa participation à la plani- fication et à la prise de décisions au niveau municipal. Le label promeut ainsi la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides urbaines et périurbaines, ainsi que leurs avantages socio-économiques pour les habitants.
À l’occasion de la COP13 en 2018, la Convention a labellisé 18 « Villes des Zones Humides ». Ces pionnières ont donné l’exemple et ainsi inspiré d’autres villes, les incitant à prendre des mesures délibérées pour parvenir à une urbanisation durable. Trois ans plus tard, lors de la COP14, 25 villes nou- velles ont été récompensées pour leurs efforts. 43 « Villes des zones humides » sont donc aujourd’hui accréditées, dont 6 en France : Amiens, Belval-en-Argonne, Courteranges, Pont-Audemer, Saint-Omer et Seltz
Gageons qu’au niveau national comme international, de nouvelles villes s’engageront dans cette voie dans les pro- chaines années !
Jérôme Bignon, Président de Ramsar France, membre honoraire du Parlement (France)