À peine découvert, le cheval de Przewalski frôle l'extinction : début 1980, environ quatre cents individus survivent dans quelques dizaines de zoos éparpillés tout autour du monde. Progressivement, des programmes de reproduction et de préservation émergent et des projets de réintroduction sont mis sur pieds. Chaque étape fait l'objet d'une préparation minutieuse, depuis le choix des animaux et leur acclimatation dans des semi-réserves jusqu'au délicat transfert et aux premiers galops sur la steppe. Voici l'aventure incroyable des derniers chevaux sauvages et de leur retour dans leur pays d'origine, la Mongolie. Les auteurs (Sally Zalewski - écologue -, Claudia Feh - étho-écologiste, spécialiste des équidés - et Frédéric Joly - agroécologue spécialiste des écosystèmes pastoraux) sont des scientifiques impliqués dans le projet de réintroduction de l’association française Takh.
Préface de Allain Bougrain Dubourg
Nous avons rencontré Sally Zalewski pour nous parler de son livre :
Votre parcours au service du projet de réintroduction du cheval de Przewalski, comment ça s'est passé? : le WWF France a été "relancé" fin 1970s / début 1980s avec une nouvelle équipe, comprenant Pierre Pfeffer à la présidence (Prof au CNRS, spécialiste des mammifères, notamment l'éléphant d'Afrique) et un conseil scientifique notoire (Théodore Monod, JJ Petter etc). A l'époque plusieurs espèces françaises à protéger/réintroduire: gypaète barbue, cerf du Père David, lynx d'Europe, cigogne, vautour fauve, castor etc. Le projet cheval de Przewalski a suivi peu après. D'après les peintures rupestres des grottes de Lascaux, il vivait autrefois en Europe.
Au début des années 80 le WWF France a reçu un dossier sur la réintroduction du cheval de P. et une demande pour financement. J'ai démarré le projet dans le PN des Cévennes avec Claudia Feh et le directeur du Parc, Pierre Granier, vétérinaire et passionné de chevaux (lui aussi)!) En 1992 avec la création de l'Association Takh et l'achat d'un hameau, Le Villaret (sur le causse Méjean), le projet a redémarré plus sérieusement avec un troupeau de 11 chevaux en provenance de différents zoos européens.
D'où vient ce cheval et pourquoi le réintroduire? Le cheval de P a été découvert en 1879, ce qui est tard pour un mammifère de sa taille. Mais en 1970 l'espèce est déclarée éteinte dans la nature; il existait une population dans les parcs animaliers. Il y avait une volonté en Europe, et en Mongolie, de repeupler les steppes asiatiques de ce cheval sauvage. Les raisons : maintenir la diversité biologique mais aussi tout simplement la beauté de l'espèce que l'homme a si bien su exterminer dans son milieu naturel par la chasse, les captures et la concurrence pour les pâturages. Quel droit avons-nous d'éliminer des espèces de faune et de flore? Les mongols sont très fières de leurs traditions liées étroitement aux chevaux.
Quels obstacles avez-vous rencontrés durant ce programme? Les obstacles les plus difficiles ont été :
. obtenir les meilleurs chevaux pour la reproduction,
. un terrain suffisamment grande pour la création d'une semi réserve,
. l'identification d'un site de réintroduction en Mongolie,
. la reproduction après la réintroduction - il a fallu attendre 3 ans après le voyage Cévennes - Khovd.
Comment marche le programme et qu'en est-il d'autres espèces de cheval? Le cheval de Przewalski est le seul cheval sauvage et le projet Takh en Mongolie marche plutôt bien. Depuis les 22 individus introduits, ils sont 77 aujourd'hui. Le plus grand menace réside dans le grand nombre de chevaux domestiques mongols, qui entraîne une concurrence pour le pâturage et un risque de reproduction entre les deux espèces. Les 6 autres espèces d'équidés sauvages sont zèbres et ânes, dont l'âne sauvage d'Afrique (Equus africanus) qui est en danger critique d'extinction (moins de 1000).
Le troupeau Takh appartient désormais à une association mongole qui gère le projet depuis l'année dernière. L'avenir? Time will tell!!