Personnalités à découvrir

FULCONIS Renaud

Baroudeur, aventurier ayant bourlingué aux quatre coins de la planète à pied, en VTT, à la nage, et engagé au service de la biodiversité, Renaud Fulconis a créé Awely au service des espèces et des écosystèmes qui les accueillent, sans jamais oublier l'Homme. D'où son intérêt et sa spécialisation dans la problématique des conflits entre Homme et faune sauvage.

Lulonga RDC

Australie-VTT

En Australie

Perou

Au Pérou

Nous avons voulu en savoir davantage sur ce personnage fonceur et bienveillant.

Rencontre!

Votre Parcours en quelques dates ? Diplômé en Relations Publiques, j’ai d’abords passé plus de 10 ans à effectuer des expéditions sportives comme la descente de la Loire ou du fleuve Maroni (en Guyane) à la nage, ou encore deux traversées de l’Australie en VTT, en solitaire et par les déserts ; des voyages extrêmes suivis de conférences. Une première vie bien remplie, avant que je ne souhaite m’impliquer pour la préservation d’un environnement que je trouvais malmené, mais auquel je ne connaissais pas encore grand-chose. Ce hormis le sujet des bonobos auquel je m’intéressais depuis plusieurs années déjà. Une rencontre avec John Fa, alors directeur de la conservation au zoo de Jersey, alors que je m’impliquais bénévolement en 2001, au sein du projet grand singes du zoo d’Anvers au Cameroun, a été déterminante. J’ai peu après grâce à lui participé au Summer School à l’International Training Center du zoo de Jersey.

Bonobo

(photo Renaud Fulconis)

Un tremplin qui m’a permis de réaliser à quel point la conservation des espèces me passionnait et de commencer mon implication en travaillant en parc zoologique. En coordonnant la pédagogie et les programmes de conservation au zoo d’Amnéville, j’ai fait connaissance d’une manière concrète avec le terrain, et découvert de l’intérieur des projets passionnants, aux quatre coins du monde.

Rhino

(photo Renaud Fulconis)

J’ai ensuite travaillé un an et demi durant pour Save The Rhino International à Londres, comme coordinateur de la campagne rhinocéros de l’association européenne des zoos (EAZA). Nous avions alors recueilli plus des 750 000€ pour 13 programmes en Afrique et en Asie. C’est également l’époque à laquelle je créais Awely, l’organisation non gouvernementale que je préside.

Par ailleurs, je partage mon temps entre Saïga, le secteur voyage biodiversité de l’agence Secret Planet, basée à Lyon, et mon métier de coach dans le cadre duquel j’accompagne particuliers et professionnels dans la résolution de leur problématiques. Je me spécialise surtout sur les déterminants du succès. 

 En quelques mots, pouvez-vous expliquez-nous la problématique conflit homme/vie sauvage et les solutions win-win possibles? Il suffit de s’attarder quelques instants sur la coexistence si conflictuelle entre loups et éleveurs en France, pour comprendre à quel point cela peut être difficile quand des animaux aussi imposants que des éléphants ou des rhinocéros font face aux biens et aux cultures de paysans pauvres. Les conflits entre villageois et animaux sont nombreux, fréquents, et ont des conséquences désastreuses, tant pour des paysans qui peuvent perdre en une nuit toutes leurs cultures, quand ce n’est pas la vie, que pour les animaux dont l’écosystème est détérioré et qui peuvent être tués en représailles.

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Des conflits qui concernent aussi les carnivores qui s’attaquent au bétail. Il existe face à ces conflits de nombreuses solutions possibles : organisations de gardes en tours d’observation, barrières et répulsifs divers, propulseurs à piment faisant fuir les éléphants, abris à grains renforcés… Aucune de ces solutions existantes ne marche seule et durablement. Limiter un conflit est un processus complexe qui doit prendre en compte l’écologie de l’espèce, mais aussi l’ensemble des paramètres humains (facteurs sociaux, économiques ou encore politiques) comme la manière dont ces populations se comportent au quotidien et réagissent aux changements proposés. 

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Dans le cas de destructions des cultures par les éléphants, nous avons mis en place des cultures alternatives. Des plantes pouvant être vendues localement ou régionalement, notamment sous forme d’huiles essentielles, mais n’attirant pas les animaux ; parmi elles par exemple, la citronnelle, le basilic, le gingembre. Une solution efficace qui préserve homme et animal.

 Quels sont vos maîtres à penser, vos références culturelles ? Ils sont assez nombreux. St Ex et son petit prince que je crois connaître quasiment par cœur, en particulier depuis que June, ma fille de cinq ans en est elle aussi devenue inconditionnelle. Et puis « Ishmael » de Daniel Quinn, qui reste sans doute à ce jour le livre m’ayant le plus fait réfléchir sur notre condition et notre place dans la nature, comme sur ce que nous imposons à cette dernière.

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Et puis également "Les Racines du ciel" de Romain Gary, "le lion" de Kessel, ou les bouquins de Wilbur Smith qui ont renforcé mon goût de l’Afrique. Et puis encore les livres de Richard Dawkins ; ceux de de Jared Diamond que j’ai dévorés, avec une préférence pour «De l’inégalité parmi les sociétés» ; ceux de Noam Chomsky (tous) ; d’Howard Zinn ; de Christopher Hitchens, mais aussi d’Esther Duflo dont l’approche des questions de pauvreté me semblent si pertinentes. Et puis "Wildlife" de Richard Leakey et plus récemment "Sapiens" de Yuval Noah Harari. Des lectures qui démontrent il me semble, l’intérêt à peu près équivalent que je porte à des sujets aussi variés que la conservation de la faune sauvage, le voyage, la réduction de la pauvreté, les origines de l’homme, la géopolitique, la liberté d’expression… Les livres m’ont toujours accompagné, et ont incontestablement contribué à mon engagement.

Pourquoi l’animal sauvage, ou la nature sauvage ? Plus que l’animal sauvage lui-même, je crois que ce qui me passionne et me guide dans mon implication quotidienne, c’est le besoin de contribuer à sa préservation. Je vois l’animal sauvage comme la partie d’un tout, et n’imagine pas par exemple œuvrer à la préservation d’une espèce sans impliquer les communautés humaines vivant à proximité. Pour moi conservation et développement sont indissociables, et s’intéresser à l’animal, même menacé, alors que les villageois qui partage le même environnement manquent des biens les plus fondamentaux m’a toujours semblé difficile. Ce également parce que je considère qu’une telle approche est inefficace sur le long terme. Ce qui m’attire donc, c’est de m’impliquer autant que possible pour contribuer à préserver un tout, indissociable.

Si vous étiez un animal sauvage, lequel ? Sans doute un des rares qui connait encore à ce jour une paix forcement fragile. Un oiseau probablement, un condor des Andes par exemple, pour la liberté dont il peut encore se prévaloir.

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La ou les deux plus belles rencontres de faune sauvage ? En 2003, avec mon ami Jean-Marc Vichard, j’ai réalisé à la demande de Kenya Wildlife Service, des photos de rhinocéros noirs dans le sanctuaire de Ngulia, au sein du parc de Tsavo Est au Kenya.

Ngulia

(photo Renaud Fulconis)

Ces images avaient pour but d’établir un état des lieux de la population, en comparaison aux résultats obtenus plus tôt avec les jumelles à vision nocturne. Nous avons passé deux nuits au point d’eau, à la pleine lune, à attendre la venue des animaux. Debout derrière l’appareil des heures durant, nous avons vu des troupeaux d’éléphants, de buffles, des girafes, des léopards, des chacals et bien sûr des rhinocéros. Nous avons vu également de nombreuses interactions entre espèces, notamment entre rhinocéros noirs (ils étaient parfois trois à boire en mêle temps) et buffles. Ces moments étaient tout à fait exceptionnels parce que la nature est très différente la nuit et le silence par moment vraiment intense. Il m’est arrivé de tourner la tête pour réaliser qu’une trentaine d’éléphants passait à quelques mètres de moi seulement sans un bruit, dans un calme absolu et sans le moindre signe de peur.

Renaud Rhino noirEt puis sinon sans doute, mes premiers bonobos sauvages. En 2007, je me suis rendu accompagné de Claudine André, du réalisateur Alain Tixier (qui préparait le film Bonobos) et de ma collègue Eva Gross, dans la réserve de la Lomako en RD Congo, distante d’une trentaine d’heures de pirogue. Un matin, partis bien avant le lever du soleil, nous avons crapahuté longtemps en forêt pour rejoindre les bonobos encore endormi dans leurs nids et pistés la veille, afin de les observer et de les suivre un peu, dès leur réveil. Ce fût bref, tant progresser dans une forêt dense avec du matériel photo peut être difficile. Les bonobos pour leur part sautaient d’un arbre à l‘autre avec la plus grande facilité. Cette rencontre cependant fût magique et elle reste un souvenir très fort.

Et encore une si je peux, ma première rencontre avec les panthères des neiges en novembre 2019 au Ladakh avec un petit groupe que j’accompagnais pour Saïga. J’aime l’idée que l’animal puisse nous observer des jours durant avant même que nous ne devinions sa présence. 

Votre lieu de nature préféré ? La laguna Colorada dans réserve nationale de faune andine Eduardo Avaroa, dans le sud de la Bolivie, est le lieu naturel qui me fascine le plus. Il y fait froid, on est à plus de 4200 mètres, mais les couleurs du lac mêlées à celles du ciel et de la terre environnante et les flamands roses qui ponctuent ce lieu fascinant m’ont laissé bouche bée.

Laguna Colorada

 (photo Renaud Fulconis)

Egalement, la région de Puerto Madryn en Argentine, lorsque plus de mille baleines viennent se reproduire dans la baie. Enfin, le centre de l’Australie, que j’ai arpenté à pied cinq mois durant. Pas un endroit en particulier, le centre du pays dans son ensemble, dans un rayon de 500 km autour d’Alice Springs. Ce pour le rouge du sable, le bleu incroyable du ciel, les aborigènes, les marsupiaux, les perruches et perroquets, les dragons barbus, ou encore le monolithe d’Uluru ou les rochers de Kata Tjuta.

Puerto Madryn 2

Puerto Madryn

(photos Renaud Fulconis)

Et puis sinon plus près, les bords de Loire (j’habite près d’Orléans, à quelques centaines de mètres du fleuve), le golfe du Morbihan ou encore les Alpes en été. Des sujets que je vais aborder peu à peu sur mon blog de voyage : www.despassurterre.com

Le lieu mythique où vous rêvez d’aller ? La Nouvelle Guinée occidentale que jimagine encore comme une sorte dunivers fascinant et presque impénétrable. 

Quel matériel dans la nature ? Je possède deux boitiers Canon, et utilise le plus souvent l’Eos 5 Mak III. J’ai sinon 3 objectifs 2.8 (28-70, 100 macro, 70-200) et un 500mm F/4. Au moins une partie d’entre eux m’accompagne à chaque voyage ou chaque mission de terrain. Le reste du temps, et presque au quotidien, je photographie avec mon Iphone 6. Il y a quelques années, j’ai aussi fait beaucoup de photo aérienne, depuis un paramoteur que je pilote depuis 2001. Je poste des photos sur ma page Instagram : @despassurterre

Quelles techniques de rencontre avec l’animal sauvage ? J’ai finalement rarement réalisé de voyage à seul objectif photographique. Ainsi, je fais plutôt des photos quand l’occasion se présente, et sur mon parcours elle se présente souvent.

Un conseil au débutant dans votre activité ? Se dire que tout est possible et que l’on apprend bien plus d’un échec que d’une réussite. Et puis lire beaucoup, apprendre l’Anglais et rester humble. On apprend bien plus et l’on va je crois plus loin quand on se met dans la peau de celui qui ne sait pas, même si l’on sait un peu déjà. Tout cela m’a toujours bien servi, dans mon activité professionnelle comme dans les autres.  

Un animal disparu revient, lequel ? Je préfère l’idée de stopper, au moins de ralentir le rythme effréné de disparition des espèces, et pas seulement des espèces animales.

Une initiative prise ou à prendre en faveur de la faune sauvage ? J’aimerais une mobilisation collective pour la préservation de la biodiversité. Et cela signifie une lutte acharnée contre des publics aussi variés que les industriels qui polluent nos sols, le contenu de nos assiettes et nous empoisonnent ou les trafiquants qui amassent des sommes colossales en contribuant à la disparition de bien des espèces.

Renaud-Bonobo

Une association qui vous tient à cœur ? Logiquement, celle que j’ai fondée et que je dirige : Awely, des animaux et des hommes. Nous sommes présents dans six pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud où nous coordonnons des programmes destinés à améliorer la coexistence entre villageois et animaux, d’autres focalisés sur l’amélioration de la situation de certaines espèces menacées (bonobos, gorilles, tigres) et enfin le dernier né, s’intéressant à la préservation d’un écosystème tout entier au Pérou, celui d’un l’arbre, le Polylepis (voir la vidéo ici), poussant aux altitudes les plus hautes. Sur chacun de nos programmes, nous plaçons les hommes et les femmes au cœur de nos actions, et nous intéressons autant aux questions de développement qu’à la conservation : www.awely.org

Une urgence pour la faune sauvage, pour la vie sauvage ? Le réchauffement climatique, la plus grande menace sur la vie sur Terre. Toutes les espèces sont concernées, Homo sapiens y compris bien entendu.

Pour conclure : Vous disparaissez ce soir, qu’aimeriez-vous laisser comme dernier message ? 

Là, désolé, je cale !

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