Personnalités à découvrir

HERMIEU Yann, responsable de l’Oiseau Magazine

Depuis 30 ans, Yann Hermieu -  naturaliste, photographe, journaliste -  préside aux destinées de l'Oiseau Magazine, la revue de la LPO. Avec son équipe rapprochée, Antoine Barreau, Directeur artistique et Cécile Bruderer, Secrétaire de rédaction (photo ci-dessous), il nous offre chaque trimestre des nouvelles de l'avifaune -  des bonnes, des moins bonnes - mais aussi de la biodiversité dans son ensemble.

Depuis 30 ans à la tête du magazine, il a été à côté de tous les combats de la LPO pour que les oiseaux continuent de voler au dessus de nos têtes.

REDAC OISEAU MAG

A l'occasion de la sortie du numéro spécial (n°120) de l'Oiseau Magazine, qui fête ses trente ans, en même temps que le festival de Ménigoute, à peine plus âgé, nous l'avons rencontré pour qu'il nous raconte son parcours et celui de cette revue qui compte tellement dans le paysage de la nature.

Pour commencer, votre parcours en quelques étapes ? Né en Franche-Comté, j’ai été, dès 8 ans, attiré par la nature, les oiseaux; On n’habitait pas loin d’une forêt, je partais m’y balader; Puis ça a continué à l’adolescence, les bois, les champignons, les ruisseaux à la recherche de fossiles. Etudes de sciences à Besançon, puis un fils est né, puis l’armée, 9 mois de parenthèse à Angers, difficile ensuite de reprendre les études.

Faisant déjà de la photo animalière (je disposais d’un 600mm), j’ai croisé la route de gens qui créaient un hebdo local sur Vesoul dont je suis devenu journaliste-reporter photographe (1981).

En 82, j'ai l'opportunité de partir en Charente Maritime, pour travailler dans une société d’édition et de photocomposition à façon où je faisais des maquettes, de la photogravure. C’est à cette époque (84) que j’ai eu mes premiers contacts avec la LPO à l’occasion des RIENA (Rencontres Internationales de la Nature et de l’Environnement) à Royan pour réaliser quelques travaux. Puis, avec le temps, les discussions avec Michel Métais, directeur d’alors, Michel Cramois, directeur administratif, ont conduit à l’idée de créer le propre magazine de la LPO qui faisait alors revue commune avec la Ligue royale belge pour la protection des oiseaux sur le magazine « L’homme et l’oiseau »;

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Et donc dès 84/85, une fois par semaine à Rochefort, j’ai commencé à travailler sur le projet de revue qui a été présenté au CA en juin 1985 ; projet accepté ! Et en septembre 1985 j’intégrais les effectifs de la LPO pour créer l’Oiseau Magazine dont le numéro 1 (ci-dessous) est sorti en octobre 1985 !

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Quasiment en même temps que le festival de Ménigoute où j’ai d'ailleurs présenté ce n°1 !

Un peu votre bébé! Quand vous vous retournez sur ces trente ans, quelles évolutions vous frappent? Peut-être avant tout l’évolution technologique; On est passé du montage manuel – table lumineuse, bandes de papier qu’on collait, photogravure sur un banc photo… -, à la PAO en 1996, une véritable révolution; On a gagné une grande souplesse au niveau de la mise en page et donc du message au lecteur.

Et l’évolution du lectorat, au-delà de la boule de plumes qu’est l’oiseau; Aujourd’hui, les gens se préoccupent aussi de leur environnement, de leur santé, de celle de leurs enfants, et de l’avenir de la planète.

On a suivi cette évolution, on l’a même devancé, par des reportages sur les plantes, les batraciens, sur la nature en tant que tout.

L’Oiseau Magazine c’était « agir pour l’oiseau libre ; Aujourd’hui, c’est « agir pour la biodiversité ».

30 ans, 120 numéros, toujours debout, qu’est ce qui fait encore voler l’Oiseau magazine ? L’investissement et la passion des uns et des autres ! Ça fait 30 ans que je fais ce magazine et je vois arriver des jeunes avec une envie décuplée - dans une période de dégradation rapide -, de sauver ce qui est encore sauvable. Et la LPO a dépassé le stade de l’oiseau pour s’impliquer dans la défense de la biodiversité parce que protéger l’oiseau seulement ça ne sert à rien si on ne protège pas les lieux de nidification, les insectes ou les plantes dont il a utilité, les zones de halte migratoire, les zones d’hivernage. C’est un tout.

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A Ménigoute

 Quelques chiffres, l’évolution…Etes-vous satisfait ? Le magazine est tiré à 26 000 exemplaires, on peut compter sur 18 000 abonnés et au moins 60 000 lecteurs car le magazine se transmet entre personnes, associations, bibliothèques qui le mettent en avant ; ce qui n’est pas mal dans le monde associatif. C’est un peu moins qu’au début des années 2000 compte tenu de l’arrivée d’internet (sur lequel nous nous positionnerons un jour – prolongement pour montrer des photos, de la vidéo, page Facebook spécifique ou blog… -, nous y réfléchissons sérieusement). Nous le distribuons dans certaines manifestations comme Ménigoute ou Montier; Ce sera également le cas pour la COP 21 où la LPO et l'Oiseau seront présents..

On va essayer de toucher un public plus large via internet ou d’autres réseaux (médiathèques). Ce qui fait une belle offre, sans oublier l’Oiseau magazine junior, pour les plus jeunes.

Interrogez-vous votre lectorat régulièrement ? Nous n’avons pas fait d’enquête d'opinion depuis un moment mais le courrier des lecteurs (de 8 à 90 ans !) nous apporte beaucoup, nous oriente, nous fait traiter des sujets demandés. Nous avons de bons pigistes, un excellent illustrateur en la personne de François Desbordes. Beaucoup de photographes nous confient leurs clichés. Tout cela contribue à l’évolution du magazine. Et à notre motivation.

Quelles sont les grandes actualités que vous retenez de ces trente ans ? Quels combats menés ? Quelles défaites ? Un des plus grand combat, c’est le Médoc, la Pointe de Grave, la défense des tourterelles, dès 1984/85 ; des manifestations annuelles très tendues sur le terrain, avec Allain Bougrain Dubourg, Michel Métais, Jean-François Louineau et d’autres (les vedettes comme Sophie Marceau, Anémone, Hubert Reeves…), suivis d’une cohorte de journalistes, radios, télévisions pour défendre la tourterelle et les autres migrateurs. A l’époque, c’était 3 500 pylônes avec trois chasseurs par pylône qui avaient l’autorisation de tirer ! On s’est fait insulter, bombarder d’œufs avec des poussins dedans !

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Et puis il y a eu aussi le Bruant ortolan (aujourd’hui protégé), le Pinson des arbres, le Rouge-gorge, le Chardonneret, la Linotte…vendus aux grands restaurants dans les landes.

La COP 21 arrive, ce n°120 tombe en plein dedans. Ça compte beaucoup le climat dans votre action ? Oui, beaucoup. Il y a des espèces qui s’adaptent mieux que d’autres en fonction du climat. L’oiseau réagit rapidement aux changements, c’est un très bon indicateur. Le changement va avoir des conséquences sur certaines espèces, les montagnards par exemple, qui vont monter un peu plus ou monter vers le nord pour chercher des températures adaptées. C’est difficile aussi pour les insectes, les batraciens qui vont se déplacer lentement. Il y a des gagnants – comme les mésanges ou la Fauvette à tête noire qui vont bénéficier d’hivers plus doux (donc de nourriture disponible), des perdants, l’Eider à duvet reste plus au nord.

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(Gélinotte des bois/Christophe Doucet)

Quand j’étais jeune, on avait des hivers avec 60cm de neige en Franche-Comté, aujourd’hui elle est plus rare, certaines espèces vont en bénéficier, d’autres – la Gélinotte, le Lagopède alpin… - moins.

S’ajoutent à cela les dégradations de l’environnement, les installations, l’occupation… qui vont avoir un impact.

Du coup, à quoi va ressembler l’Oiseau magazine dans les prochaines années ? Continuer sur sa lancée, continuer ses combats, sa sensibilisation, sa pédagogie. Et entrer sur le net; Pour une grande interactivité entre le papier – car cela reste important de pouvoir se poser, feuilleter, prendre le temps de lire- et le numérique.

Pour conclure? Rester au service de l'oiseau et de la biodiversité. Pour que nature vive!

 

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