Un petit mail reçu un matin de janvier : " Je suis Lisa Mezghenna, professeur d'anglais de formation et photographe animalière par passion. Je fais des photos animalières en qualité professionnelle car je suis amatrice d'aventure et très sensible à la protection de la faune sauvage que je rencontre lors de mes voyages. Je pense que montrer la beauté de mes rencontres peut amener le public à avoir envie de protéger ce monde si beau mais si fragile. Je suis débutante et je consulte régulièrement le site faunesauvage.fr. Je me demandais si vous seriez intéressés par mon travail.
Photographes animaliers
Lisa MEZGHENNA
Entretien avec...
Votre Parcours en quelques étapes ? Je suis née le 25 août 1989 et j’ai grandi dans une ferme dans les Cévennes. Au contact de la nature, j’ai développé une passion pour les animaux dont je me suis toujours senti très proche. Petite, j’étais fascinée par les photos que je voyais dans les livres dédiés à la faune sauvage. En grandissant, j’ai voulu étudier l’anglais afin de pouvoir voyager facilement et aller au contact de ces espèces magnifiques, les observer de mes propres yeux dans leur milieu naturel. A la suite d’un master en langues et en éducation, je suis devenu professeur d’anglais en 2013. J’ai effectué mon premier long voyage à l’âge de 20 ans où j’ai passé six mois en Australie au plus proche de la nature et où j’ai pris des photos amateurs de toutes les
espèces que j’ai eu la chance de rencontrer dans leurs milieux naturels afin d’immortaliser ces moments magiques et d’en montrer la beauté à mon entourage. Les réactions suscitées par mes photos m’ont amené à penser qu’elles pouvaient contribuer à la protection de ces créatures fragiles. Sur les conseils de Masa Ushioda, j’ai acheté mon premier appareil photo professionnel, un Sony RX10 III, en 2017.
Vos actions en cours en quelques mots ? Les priorités ? Objectifs poursuivis ? Je suis actuellement contributeur pour « Blue Planet Archives » et je suis à la recherche de lieux de publications en France et à l’étranger car la beauté d’un animal dans son milieu naturel peut émouvoir, fasciner et mener à sa protection. L’humain n’a malheureusement pas envie de protéger ce qu’il ne connaît pas et il y a urgence concernant la protection de la planète et des êtres qui la peuplent. A travers mes photos je souhaite montrer la beauté de la nature et sensibiliser le public à l’importance de préserver la faune sauvage.
Quels sont vos maîtres à penser, vos références culturelles Le respect est une valeur centrale pour moi: celui de la vie, de notre planète, de l’espace vital, de ce que chacun est prêt à donner ou à garder pour soi... cela devrait s’appliquer à tout ce qui nous entoure.
Parmi mes lectures, j’ai beaucoup aimé «Into the Wild – voyage au bout de la solitude» pour l’esprit de liberté qui s’en dégage, pour la description de la beauté et de la fragilité de la vie menée en dehors des sentiers battus. Dans le domaine photographique, je suis admirative du travail de Frank Deschandol, ses clichés d’animaux souvent craints et pourtant magnifiques sont incroyables !
©frank deschandol/philippe sabine
Pourquoi la faune/l’animal sauvage, la vie sauvage ? Les animaux sauvages sont un mélange parfait de complexité et de simplicité, ce paradoxe me fascine.
La complexité de leur métabolisme, de leurs capacités sensorielles, cognitives, d’adaptation à leurs milieux... contraste avec la simplicité des moments partagés auprès d’eux. Derrière mon appareil, j’admire cette complexité tout en ressentant une simplicité de contact apaisante.
Si vous étiez un animal sauvage ? J’adorerais être un paradisier pour pouvoir voler, voir le monde sous un angle différent et admirer les belles parades nuptiales des mâles (rires).
La ou les deux plus belles rencontres de vie/faune sauvage ? Ma rencontre la plus mémorable est sans doute celle faite avec un groupe de dugongs sur la côte Est de l’Australie. Près du petit village presque désert de Clairview, je pouvais voir des formes sombres remonter à la surface à un kilomètre de la plage. J’ai pensé qu’il s’agissait de gros dauphins à cause de leur manière de respirer à la surface et de la mauvaise vue que j’avais du bord. J’ai emprunté un kayak et j’ai pagayé un moment avant de m’arrêter pour reprendre du souffle. Un dugong a sorti sa tête de l’eau juste à côté de moi et m’a regardé avec un regard que je n’oublierai jamais. Cinq autres dugongs nous on rejoint, ils étaient accompagné d’un petit. Je n’ai jamais ressenti autant de bienveillance de la part d’un animal, c’était un rêve d’enfant de les rencontrer dans leur milieu et ce moment de partage est inoubliable.
D’autres rencontres m’ont beaucoup marquées : celle d’un python tapis, d’un wombat, d’un élan et d’un bison sont autant de moments merveilleux qui me poussent à continuer ce que je fais.
Votre/vos lieux de nature préféré ? Je suis accro à la côte Est de l’Australie et plus particulièrement la partie Nord-Est pour son environnement tropical.
Dans Mossman Gorge - Queensland/Australie
Je m’y rend aussi souvent que possible et j’affectionne cette côte pour la variété, les spécificités et le nombres des animaux que j’y rencontre. Les animaux Australiens sont souvent endémiques et vivent dans un milieu extrême qui les pousse à avoir des particularités impressionnantes. J’aime aussi beaucoup le Costa Rica pour la diversité des ses espèces et la beauté de ses forêts, l’Ouest des États Unis pour ses grands espaces et ses espèces robustes.
Le lieu mythique où vous rêvez d’aller ? La Nouvelle Guinée pour pouvoir rencontrer un python émeraude et admirer les oiseaux qui s’y trouvent.
L’œuvre (une des vôtres ou celle d’un autre) qui vous semble illustrer le mieux votre parcours ? « Le Livre de la Jungle » me parle beaucoup. Il s’agit d’une œuvre enfantine qui révèle la beauté du partage entre un humain et des animaux et du dilemme final entre l’appel de la nature et la nécessité de vivre au milieu de sa propre espèce.
Quel matériel utilisez-vous ? Pour des raisons logistiques et vu ma corpulence et mes capacités limitées à porter mon matériel, j’ai opté pour un Sony RX10 III. Avant chaque voyage, j’utilise des field guides qui me permettent de m’informer sur les traces, les habitudes et l’habitat des espèces que je souhaite rencontrer.
Et quelles techniques de rencontre avec l’animal sauvage ? Toutes mes photos sont faites à l’approche, le plus souvent de jour. Je ne fais pas beaucoup de photos de nuit car je n’ai pas l’équipement nécessaire et le flash de mon appareil est nuisible pour la vision des animaux nocturnes. Je pratique l’approche pour les sensations que ça me procure, j’apprécie être au plus près de l’animal et ne rester que quelques instants dans leurs espaces afin de ne pas déranger.
Un conseil au débutant dans votre activité, que lui diriez-vous ? Je dirais que le plus important c’est le respect des limites de l’animal, d’abord pour la sécurité du photographe et ensuite parce que ce qui rend le moment magique c’est lorsque l’animal accepte la présence du photographe. L’humilité est aussi essentielle : il faut penser à la réussite de la photo sans demander plus que ce que l’animal veut bien donner. Pour le comportement, la discrétion sans la surprise me semble être primordial, il faut faire remarquer sa présence sans que celle-ci soit dérangeante.
Un animal disparu revient, lequel ? Ils seraient nombreux ! Tous ceux qui ont disparu avant que nous ayons eu la chance de les découvrir...
Un animal fantastique ? C’est difficile… Les espèces existantes sont déjà fantastiques, je passe plus de temps à apprendre à quel point elles le sont qu’à en inventer de nouvelles.
Une initiative prise ou à prendre en faveur de la faune sauvage ? Les créations ou les agrandissements de parcs nationaux pour que les animaux conservent leurs habitats me semblent être des initiatives primordiales.
Une urgence pour la faune sauvage, pour la vie sauvage ? Pourquoi ? Il y a urgence pour de nombreuses espèces partout dans le monde, la population mondiale augmente et l’espace est de moins en moins partagé, la pollution des cours d’eau, la surpêche, le réchauffement climatique, la déforestation, les incendies en Amazonie et en Australie pour ne citer que ceux là, la forte consommation de ressources naturelles...sont autant de choses qui devraient être stoppées pour que la nature soit protégée et que les espèces que nous avons la chance de connaître perdurent. Nous ne sommes en aucun cas supérieur à ce qui existe depuis des millénaires et qui nous permet de vivre, ne l’oublions pas... Pensons également aux générations à venir et au monde que nous leur laisserons.
Une association qui vous tient à cœur ? Je soutiens les actions menées par la « Sea Shepherd Conservation Society » qui lutte pour la protection des océans. Notre planète est en majorité composée d’eau et la vie marine est incroyable de diversité et de beauté, elle est aussi une condition sine qua non à la vie sur terre. Préserver les océans est donc primordial. Leurs actions sont courageuses et s’opposent à des lobbies commerciaux puissants. La première action de Sea Shepherd est pour moi un bel exemple de sa nécessité et de son efficacité : plus d’un millier de phoques ont été sauvés au Canada grâce aux membres de l’association qui ont peint la fourrure de ces animaux sans défense avec des produits naturels afin que les abatages sauvages ne puissent plus être pratiqués pour le commerce de leur fourrure.
Pour conclure, vous disparaissez ce soir, qu’aimeriez-vous laisser comme message aux autres ? Prenez soin de vous et de tout ce qui vous entoure. Souvenez-vous du passé, aimez le présent et préservez ce qui doit l’être pour profiter du futur.
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