Photographes animaliers

Séverin ROCHET

J’ai 45 ans je suis jurassien et pratique la photographie animalière depuis bientôt 10 ans.

La photographie me permet de montrer que si la nature est belle elle est surtout fragile…

Nos photographies de nature doivent émouvoir les gens mais surtout alarmer sur le fait que cette nature est par notre faute devenue plus que précaire… Et qu’il faut réagir !!!!

J’aime la recherche esthétique et artistique que va donner mon image… j’essaie de ne pas me contenter d’une belle image… j’aime que cette image parle aux gens, leur évoque une histoire , et les interpelle…

Pour parvenir à certaines d’images j’aime me mettre dans la difficulté et préfère échouer sur une image originale et délicate plutôt que de ramener des images classiques.

Entretien avec...

Votre rapport avec la faune

Quel parcours jusqu'à l'animal sauvage et la photographie ?

Je fais de la photographie animalière depuis maintenant 9 ans… C’est après un safari en Tanzanie que j’ai acheté mon premier reflex… c’est devenu une passion complètement addictive qui me permet de couper de mon métier de chirurgien.

Une passion que j’ai d’ailleurs réussi à intégrer dans mon métier puisque les infirmières de mon service d’urgence utilisent mes cliches de nature pour réaliser de l’hypnoanalgésie lors de la pratique de certains soins ou gestes.pour ceux que ça intéresse vous pouvez retrouver un reportage de France 3 sur mon site. 

Jusqu’a cette année je ne faisais que de l’animalier mais avec cette période COVID j’ai réalisé une série de « regards de soignants » dans les services de réanimation… une expérience photographique qui m’a changé de l’animalier et qui m’a humainement bouleversé. Mais je suis quand même mieux seul dans une forêt !!! 

Un maître à penser ? 

Je n’irai pas jusqu’ a dire qu’il est mon maitre à penser car cela lui ferait trop plaisir !!!

Mais mon ami Fabien Bruggmann  m’a appris la technique nécessaire à la pratique de la photographie animalière et depuis 10 ans nous partageons chaque année des voyages toujours aussi épiques ( Italie , Andalousie ,canada ou Biélorussie ). 

J’aime son travail et surtout toute l’énergie qu’il est capable de mettre depuis des années pour rapporter des images de loups extraordinaire…

Une œuvre marquante ? (qui vous a rapproché de la nature et de la faune) NON 

Une belle rencontre / émotion avec la faune  ? 

La rencontre avec ce renardeau qui a fait la couverture de mon livre et de mon bras gauche…

Dans sa peau… 

Ce matin, il est encore là. Cela fait plusieurs jours qu’on le voit. Il arrive à l’aube en même temps que la rosée, toujours par le même endroit, sans un bruit... Il croit probablement qu’on ne le voit pas. C’est un peu vrai parfois... Mais souvent on le sent.

Cette odeur... Maman nous dit depuis quelques jours qu’il faut pourtant s’en méfier plus que tout. Moi, je suis né dans ce terrier il y a cinq semaines, mais c’est seulement depuis neuf jours que j’en sors.

Maman, la première fois qu’elle l’a vu, c’était il y a cinq jours ; elle était en train de muloter dans le champ à coté. Soudain une voiture s’est arrêtée, il en est sorti et l’a regardée, pensif et émerveillé... Puis le lendemain il a trouvé notre cachette, mais il est resté à distance. Maman était surprise qu’il soit là, elle l’a surveillé mais n’avait pas l’air trop inquiète. Il a l’air gentil, il nous regarde et ne bouge pas. Alors que nous, ce qu’on aime le plus, avec mes quatre frères et soeurs, c’est bouger partout et faire les fous !

Pourtant, Maman nous a dit de ne pas nous approcher car il paraît que lui et ses copains pensent que nous sommes des nuisibles... Mais bon, moi je comprends pas trop ce que ça veut dire nuisible...

Du coup ce matin, en le voyant je décide de m’approcher de lui... Maman est partie chasser, elle n’en saura rien. Il est comme souvent couché par terre, immobile... Plus je m’approche, plus j’entends ce petit bruit qu’il fait régulièrement « clic, clic ». Au début on a eu un peu peur avec les autres, puis finalement on s’est habitué.

Quand je suis à quelques mètres de lui je n’entends plus les bruits... Alors, intrépide, je continue à m’approcher... Il a levé un peu la tête. J’aperçois juste ses yeux, il me regarde... Je vais renifler l’objet tout rond qui est posé devant lui et j’y mets même la tête... C’est rigolo je me vois dedans...

J’entends juste sa respiration qui s’accélère... C’est bizarre il a l’air paniqué que je sois si près de lui... Pourtant je ne suis qu’une petite boule de poils roux de vingt centimètres. Puis je m’arrête tout près de son visage. Je le renifle... Il ne bouge pas.

Avant de rejoindre les autres, il me semble voir une larme couler de ses yeux... Maman m’a dit plus tard qu’on peut pleurer de bonheur...Ça devait être le cas car il avait l’air heureux.

Tellement heureux qu’il m’aurait tatoué dans sa peau... 

Si j'étais un animal sauvage ?

Je serais le lynx boréal… animal mythique de ma région… fantôme des bois invisible que je n’ai pas encore réussi à voir… Sa sérénité et confiance me fascinent…

Un animal disparu qui reviendrait ?

L’ours des cavernes… imaginez le mélange d’adrénaline et de peur lorsqu’il apparaitrait dans notre objectif.

Un animal fantastique qui existerait ?

La licorne sans hésiter

 

Photographie animalière

Votre photo à laquelle vous tenez particulièrement ? 

Deux photos de bouquetins que vous retrouverez ci dessous… deux photos du même animal prise à deux minutes d’écart alors qu il n’avait pas bougé, scrutant sa vallée… l’une le montre en tant que « maitre des sapins » dominateur de sa vallée et l’autre prise, en me déplaçant d’une vingtaine de mètres, à travers une trouée d’un arbre recouvert de neige et qui nous emmène dans « un rêve blanc » .

J’aime ces 2 images complètement différentes qui montrent le pouvoir de la créativité dans la photographie animalière.

J’aime la recherche permanente de réaliser des images oniriques qui permettent de faire rêver les lecteurs.

La photo animalière d’un confrère que vous auriez aimé prendre ? 

Une photo de mon ami Mehdi Acheche qui pendant que je cherchais le lynx dans les forêts biélorusses a réalisé une photo magnifique d’un lynx à quelques kilomètres de chez moi. Il me l'a offerte en grand format et elle est affiché chez moi…

Et la technique : frein ou atout ? 

Ne faisant que de l‘animalier ma technique est restreinte au minimum pour réaliser mes photos…

Malgré quelques lacunes je maitrise ce dont j’ai besoin pour me concentrer sur la créativité.

Votre « terrain de jeu » préféré ? 

Ma région franc-comtoise est une des régions françaises possédant la plus grande diversité. 

J’apprécie particulièrement un spot ou je retrouve chaque année les guêpiers.

Ce spot très fleuri m’a permis de réaliser une série de photos où les couleurs des oiseaux se mélangent à celles des fleurs et notamment des coquelicots… le tout donnant une impression parfois plus de peintures impressionnistes que de photographies.

Le voyage à faire absolument avant que le rideau de l’obturateur ne se ferme définitivement ? 

J’ai pas mal voyagé mais finalement la nature est tellement merveilleuse à coté de chez moi… 

Des conseils ? 

Bien connaitre l’animal afin de le déranger le moins possible… et surtout persévérer car c’est en multipliant les sorties que l’on progresse et qu'un jour la chance nous sourit.

Et un conseil technique important pour moi et facile à appliquer : toujours se mettre le plus près du sol possible pour prendre ses clichés… je suis régulièrement couché par terre ce qui change l’angle classique de prise de vue et apporte beaucoup plus d’émotions dans les photos.

 

Biodiversité

Des urgences ?

Enfant J’aimais observer dans le cadre idyllique de ma région tous les animaux sauvages que je retrouvais le soir dans des contes ou livres relatant leurs aventures…

Malheureusement, en grandissant, on se rend compte que la réalité est bien différente… 

Les animaux ne sont plus libres et heureux ; ils sont considérés nuisibles par certains, élevés dans des conditions déplorables pour leur chair, leur peau ou juste pour le plaisir de les tuer. Certains sont en voie d’extinction… D’autres ne sont déjà plus là… les responsables ? Nous, les hommes…

A cause de cet appât du gain, nous avons complètement négligé notre nature… Une nature que l’on est en train de détruire en déforestant les lieux d’habitat des orangs-outans afin de produire l’huile de palme la moins chère, en cautionnant et en autorisant la chasse et le déterrage des renards et blaireaux, ou en ne s’ étonnant même plus de voir des pingouins vivre sur une île de déchets plastiques…

Heureusement certains ont des convictions et se battront jusqu’au bout pour sauver ce qui peut encore l’être …

Une association de protection à mettre en avant ?

Toutes les associations ont un rôle importante mais si je dois en citer une cela serait l’Aspas évidemment et le formidable travail et dévouement de Madline.

Une suggestion pour sensibiliser le grand-public ?

 Continuer à faire lors des expositions et festivals, des exposés et présentations pour sensibiliser toujours plus les visiteurs… les choses commencent à changer dans l’esprit des gens.

Je pense que nos images ont pour but de montrer la beauté mais aussi la fragilité de la nature aux publics

Plutôt optimiste ou pessimiste pour la suite ? 

Plutôt optimiste de nature quand j’entend le président des Etats-Unis dire «  Ça va se refroidir ensuite » je perds parfois tout espoir en l’humanité pour sauver notre planète…

Mais comme dit Yann Arthus Bertrand «  il est trop tard pour être pessimiste » il faut en effet continuer à agir car ce qui est le plus important n’est pas ce que l’on a perdu mais ce qu’il nous reste encore…

Pour conclure ?

Un grand merci pour faire vivre ce superbe site sur la faune sauvage.

Distinctions & Parutions

Prix du public du premier festival photographique de Besancon en 2017

Mon premier livre vient de sortir «  Si la Nature m’était comté » 

 A l’exemple de La Vouivre ,la plus célèbre des légendes franc-comtoise , notre région a toujours inspiré nombreux contes ,fables et mythes…

Cest donc logiquement que j’ai voulu mettre en valeur notre faune locale par des images aux évocations oniriques…. Ce recueil de photographies animalières devient ainsi à travers ses images , ses anecdotes et histoires, et ses poèmes un véritable plaidoyer pour la faune extraordinaire de cette si belle région… Une éloge pour le respect de cette faune pourtant maltraitée par l’homme.

Expositions

Mon premier livre vient de sortir «  Si la Nature m’était comté »

A l’exemple de La Vouivre ,la plus célèbre des légendes franc-comtoise , notre région a toujours inspiré nombreux contes ,fables et mythes…

Cest donc logiquement que j’ai voulu mettre en valeur notre faune locale par des images aux évocations oniriques….

Ce recueil de photographies animalières devient ainsi à travers ses images , ses anecdotes et histoires, et ses poèmes un véritable plaidoyer pour la faune extraordinaire de cette si belle région…

Un éloge pour le respect de cette faune pourtant maltraitée par l’homme.

 

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