François Terrasson, né le 3 juillet 1939 à Saint-Bonnet-Tronçais (Allier) et décédé le 2 janvier 2006 est un écrivain et naturaliste français.
Chercheur et maître de conférences au Muséum national d'histoire naturelle où il était entré en 1967, il s'intéressait tout particulièrement au rapport qu'entretient l'homme avec la nature (la géonomie) sous l'angle philosophique, scientifique, politique et agricole. Il était aussi membre fondateur des Journalistes-écrivains pour la nature et l'écologie ("JNE").
- Œuvre :
La réflexion de Terrasson, non seulement embrasse l'ensemble des rapports entre l'environnement et l'humanité (géonomie), mais oblige ses lecteurs à interroger leur rapport individuel à la Nature. Son approche est tout à la fois naturaliste, sociale, économique, historique et psychologique, elle décrit aussi bien les mécanismes physiques, biologiques ou les aspects techniques, que les ressorts aussi bien rationnels qu'émotionnels, culturels ou idéologiques de notre compréhension et de nos décisions.
Dans les années 1980, lors de ses conférences, François Terrasson, alors responsable du service Conservation de la Nature du M.N.H.N., procédait à la projection de son montage de diapositives: c'était l'ébauche de son premier livre, "La peur de la nature". Le livre est déjà saisissant à la première lecture, car il dérange un certain nombre d’idées toutes faites. Mais l’impression donnée par le montage diapo, démarrant volontairement dans un noir total, était plus forte encore.
François Terrasson organisait aussi des stages de "découverte de la Nature". Voici en quoi consistait l’un de ces stages : chaque stagiaire était déposé de nuit en forêt (par exemple de Fontainebleau), avec un duvet mais sans lampe de poche, pour passer isolé une nuit à la belle étoile. Le lendemain matin, après le petit-déjeuner, discussion collective sur la nuit précédente : comment cela s’est-il passé, qui a eu peur, qui s’est éclaté ? Réponse dans le chapitre intitulé “Tépamazo” du deuxième livre de Terrasson, "La civilisation anti-nature". En deux mots, le groupe des gens qui se sont inquiétés toute la nuit était beaucoup plus nombreux que celui des personnes qui avaient vécu le bonheur de fusionner avec "Mère Nature". Ce second groupe existe pourtant. On évoquait aussi, sans faux-semblants, des aspects pratiques: confort, soif, miction et défécation, moustiques, fourmis, bruits... et les rapports de chacun à l'environnement, en ces circonstances, étaient décortiqués. Les "mieux à l'aise", les "mieux adaptables" n'étaient pas forcément les personnes d'origine rurale.
Les stages, montages et livres conçus par Terrasson ont pour rôle d’illustrer sa thèse principale : à la question « pourquoi l’homme occidental détruit-il la Nature ? », sa réponse était : « parce qu’il a peur de la nature sauvage » ; une peur profonde et en grande partie inconsciente. Et ses livres donnent de nombreux exemples de la psychologie complexe et parfois contradictoire de "l'homo occidentalis" dans son rapport à la Nature. Il citait volontiers René Jeannel: l'Homme est fils de la forêt et père du désert et Jared Diamond: l'Homme occidental a eu de la chance géographiquement, et prend l'avance technique qu'il doit à cette chance pour de la supériorité, mais les civilisations premières lui survivront peut-être ou bien reviendront, s'il ne prend pas conscience de ses préjugés et s'il ne réajuste pas son rapport à la Nature.
Une réserve ne peut par définition pas être naturelle insistait-il, de manière parfois provocante à l'égard des gestionnaires de réserves naturelles ou de l'ONF.
De nombreuses expressions et fausses attitudes de protection de la nature sont ainsi, selon François Terrasson, la source de profond dissensus cognitifs (de type paradoxaux, dits liens de « double contrainte », qui peuvent générer de l'agressivité voire de la violence chez ceux qui y sont soumis sans en prendre conscience).
François Terrasson faisait la part des choses entre "Hominisation" (qu'il définissait comme la capacité à échapper à la tyrannie de l'instinct et à inventer de nouveaux comportements, de nouvelles règles, et qu'il attribuait à la néoténie humaine) et "Humanisation" (qu'il définissait comme la capacité à échapper à la tyrannie de l'agressivité, de la violence, de la prédation et à inventer des comportements et des règles de respect et de coopération, à l'intérieur de notre espèce, avec les autres espèces, et avec la nature). Il pensait l'hominisation achevée il y a environ un demi-million d'années, et l'humanisation en cours d'émergence, et pensait que notre survie passée est due à l'hominisation, tandis que notre survie future est conditionnée par le succès de l'humanisation.
Travaillant dans le domaine de la mise en place d'aires naturelles protégées, parcs nationaux ou régionaux et autres réserves, il fut également un expert dans le domaine de l'aménagement de l'espace rural, participa à des études d'impact avant remembrement, et voyagea beaucoup en tant qu'expert en reconstruction écologique, voyages qui l'amenèrent aux quatre coins du monde et jusqu'aux îles Galápagos. Très actif, il s'est littéralement épuisé à la tâche.
- Bibliographie :
1988 : "La Peur de la nature", Paris, Sang de la Terre, 192 p.
1994 : "La Civilisation anti-nature", Éditions du Rocher (Paris), collection Conscience de la Terre : 297 p.
2002 : "En finir avec la nature", Monaco, Editions du Rocher, 309 p.
2011 : "Un combat pour la nature". Pour une écologie de l'homme (textes inédits), Paris, Sang de la Terre, coll. "La Pensée Ecologique", 284 p.