Les abeilles disparaissent : de quoi s'agit-il? De pollinisation, et d'insectes plus largement. Voyons cela de près : l’abeille domestique, celle que l’on élève pour son miel, n’est pas le seul insecte pollinisateur, loin de là. En France, il y en a des milliers : mouches, guêpes, abeilles sauvages dont les bourdons, papillons, scarabées…
La rédaction d'un Plan national d’actions pour les insectes pollinisateurs sauvages unique en son genre a été confié par le ministère en charge de l’écologie à l’OPIE, spécialisée dans les insectes depuis 1969. Ce plan d’action est unique tant il est global, et ne se focalise pas sur une seule espèce, mais sur l’ensemble de nos petits pollinisateurs, dans tous leurs lieux de vie.
La pollinisation, une histoire de mouche, aussi
La pollinisation n’est pas uniquement réalisée par l’abeille des ruches. En France métropolitaine, ce sont des milliers d’espèces qui l’assurent, principalement des insectes : plus de 900 abeilles sauvages (dont les bourdons), des milliers de guêpes, de mouches, de papillons, de punaises ou encore de scarabées. Il arrive même que des araignées, en chassant les pollinisateurs sur les fleurs, pollinisent à leur tour.
Cette action de pollinisation est totalement liée à la reproduction d’une grande partie des plantes à fleurs. Les fleurs sont des organes sexuels qui ont « co-évolué » avec les insectes pollinisateurs. Et vice-versa. Leurs formes, leurs couleurs, leurs odeurs et leurs goûts sont intimement liés aux insectes floricoles.
En France, on estime que 70 à 80% des plantes à fleurs sauvages et 80% des cultures (soit 35% du tonnage que nous mangeons directement) dépendent de tous ces insectes.
Sciences naturelles pour les nuls : la pollinisation kézako ?
Pollinisation = transport du pollen de fleurs en fleurs. Il s’agit de transporter le matériel génétique mâle vers la fleur femelle d’un autre pied. Cela évite de se reproduire à l’identique et assure ainsi les mutations nécessaires aux adaptations à l’environnement.
Ce transport peut être le fait du vent (chez les graminées, par exemple) ou de l’eau, mais aussi d’animaux. En France, ce sont les insectes qui transportent le pollen des plantes « à fleurs » (sous les tropiques, des chauves-souris ou des oiseaux interviennent aussi par exemple).
Résultat = fécondation de la fleur = développement du fruit protégeant les graines = miam !
Et qui dit fruit, dit : cerises, pommes, pèches, abricots… et aubergines, courgettes, melons, concombres, tomates, etc., etc.
Sans oublier toutes les fleurs sauvages qui enjolivent nos prairies et nos campagnes !
La preuve en image :
Des pollinisateurs en déclin
Malheureusement, ce déclin est incontestable, et plus ou moins marqué selon les espèces. Par exemple on considère que 70% des effectifs de papillons de prairie ont disparu en Europe… Les raisons sont multiples mais insuffisamment étudiées. Un faisceau de présomptions conduit à reconnaître que les activités humaines dans leur ensemble, sont responsables de la dégradation des habitats et des ressources alimentaires florales (agriculture intensive, urbanisation, fragmentation des paysages, biocides, désintérêt, ignorance, etc.).
Alors que faire ?
Agir à l’échelle nationale, tant au niveau de la connaissance que d’actions concrètes en faveur de ces pollinisateurs sauvages. Pour cela, l’Opie s’est engagé auprès du Ministère en charge de l’écologie comme rédacteur et animateur du Plan national d’actions (PNA) en faveur des pollinisateurs sauvages, à sortir courant 2015.
Mais c’est quoi un Plan national d’actions ?
Les plans nationaux d’actions visent à définir les actions nécessaires à la conservation et à la restauration des espèces les plus menacées. Ces outils de protection de la biodiversité ont été mis en place il y a une quinzaine d’années en France. Ils découlent de notre stratégie nationale en faveur de la biodiversité (SNB). Le loup, l’ours, des libellules et même quelques papillons bénéficient d’un plan. Mais toujours pas les pollinisateurs !
L’originalité du plan porté par l’Opie est de ne pas s’intéresser pas à une seule espèce, ou un seul petit groupe d’espèces, mais bien à un « service » global rendu par les écosystèmes.
Ce PNA s’articule autour de trois grands axes :
1) Mieux connaitre les pollinisateurs sauvages,
2) Mieux les faire connaitre,
3) Mieux faire prendre en compte cette biodiversité indispensable.
Vingt fiches actions sont proposées pour atteindre les objectifs fixés dans chacun de ces axes.
Quelques exemples :
- Diminuer l’usage des produits phytosanitaires, ou biocides, affectant les pollinisateurs sauvages (Axe 3) Fiche 13). Il est avéré que l'utilisation de ces produits est un des facteurs ayant un impact extrêmement important sur les populations d'insectes pollinisateurs. Il serait vain d'agir sur les autres facteurs (destruction des habitats, diminution de la ressource florale...) sans agir sur celui-ci !
- Evaluer les risques d'extinction des insectes pollinisateurs sauvages(Axe 1) Fiche 5). Sans une évaluation sérieuse de ces risques, impossible de prioriser les actions à mener !
- Augmenter la ressource florale, en superficie et en qualité, pour les insectes pollinisateurs sauvages (Axe 3) Fiche 14). C'est un enjeu fondamental ! Sans une ressource en fleurs sauvages diversifiée, impossible de préserver la diversité des pollinisateurs...
Tout cela, entre autres, et l’agriculture est bien sûr au cœur de ce Plan !
Nous nous appliquons bien sûr à ce que ce PNA soit cohérent et lié au Plan de développement durable de l'apiculture, mené par le Ministère en charge de l'agriculture.
Voir également la revue Insectes : Unique en son genre, la revue Insectes est entièrement éditée par l’Opie. Le dernier numéro, le n° 176, nous parle, en vrac, de la guêpe des poteaux électriques, de la petite faune des nids de guêpes sociales, des invertébrés du plantain ou encore de l’Enquête Rosalie des Alpes. Photos, illustrations, revue de presse, actu, épingles… cette revue se veut sérieuse, sympathique et dynamique, comme l’équipe de l’Opie !
François Lasserre
Retrouvez le portrait de François Lasserre dans l'univers Protéger - Les acteurs - Ils font la différence - Les scientifiques