La calotte glaciaire orientale de l’Antarctique, l’un des endroits les plus froids sur Terre, a connu ces derniers jours un épisode de chaleur sans précédent. Le thermomètre affichait des températures de 40°C au-dessus de la moyenne.
Les scientifiques n’avaient encore «jamais rien vu de tel dans l’Antarctique». Vendredi, plusieurs stations météorologiques y ont enregistré des températures records. La station Concordia, située à plus de 3 000 mètres d’altitude, affichait ainsi -12,2°C, soit environ 40°C de plus qu’en temps normal.
Même constat pour la station de Vostok, connue pour avoir répertorié la température la plus basse jamais enregistrée sur Terre (-89,2°C le 21 juillet 1983). Là-bas, la température est en moyenne d’environ moins -53°C sur le mois de mars. Mais vendredi, la température a «bondi» à -17,7°C.
Jamais une marque aussi élevée n’avait été relevée à Vostok sur la période depuis le début de la tenue des registres climatiques il y a soixante-cinq ans, le précédent record absolu étant battu d’environ 15°C. Certaines simulations suggèrent que les températures pourraient même avoir grimpé à 50°C au-dessus de la normale dans certaines régions du continent. Quant à la baie de Terra Nova, entre le cap Washington et la langue de glace Drygalski, la température relevée était bien au-dessus du point de congélation, à 7°C.
«C’est définitivement un événement inhabituel»
Des pointes anormales, signalées vendredi par le Washington Post, qui ont surpris les responsables du National Snow and Ice Data Center de Boulder, au Colorado. Ces derniers prêtaient déjà particulièrement attention aux températures enregistrées en Arctique, où il fait 50°C de plus que la moyenne et où les zones autour du pôle Nord approchaient ou atteignaient le point de fusion (la température à partir de laquelle la glace fond). Ce qui est vraiment inhabituel pour la mi-mars : «Ce sont des saisons opposées. Vous ne voyez pas le Nord et le Sud [les pôles, ndlr]fondre en même temps, insistait vendredi soir le scientifique du centre des glaces Walt Meier auprès de l’agence américaine Associated Press. C’est définitivement un événement inhabituel.»
Ces températures anormalement élevées ont entraîné des épisodes de fonte des glaces dans la région. Un phénomène assez inhabituel dans cette partie de l’Antarctique, qui ne connaît pas souvent beaucoup d‘épisodes de la sorte. Pas de quoi en revanche affecter la stabilité des glaciers dans cette région, selon les experts. Pour ces derniers, il est encore trop tôt pour lier cet événement au changement climatique. Les spécialistes estiment que ces températures anormales en Antarctique ne sont pour l’instant qu’un événement météorologique aléatoire. Si cela se répète, cela pourrait néanmoins être une source d’inquiétude.
Vendredi, la température moyenne dans tout l’Antarctique était d’environ 4,8°C plus élevée que les moyennes de référence entre 1979 et 2000, selon le site Climate Reanalyzer de l’Université du Maine, qui s’appuie sur les modèles météorologiques de l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique des Etats-Unis. Dans le même temps, l’Arctique a enregistré des températures en moyenne 3,3°C plus chaudes que les moyennes recensées sur la période 1979-2000. Si l’on compare avec la moyenne mondiale, celle-ci n’est que de 0,6°C au-dessus des moyennes enregistrées sur la même période 1979-2000.
photo : un iceberg au large des îles Shetland du Sud, en Antarctique. (David Taylor/ science photo)