Les incendies continuent de ravager la Sibérie. Vladimir Poutine a finalement décidé d’envoyer l’armée pour lutter contre les flammes. Mais pour Andrey Allakhverdov de Greenpeace, cette intervention arrive beaucoup trop tard pour les écosystèmes.
A court de solutions, Vladimir Poutine a décidé mercredi d’envoyer l’armée aux côtés des 1 200 pompiers luttant contre les feux de forêt qui ravagent la Sibérie depuis plusieurs semaines. Vendredi, près de 3 millions d’hectares étaient encore en proie aux flammes tandis que 12 millions auraient déjà brûlé d’après Greenpeace Russie, soit l’équivalent de la superficie de la Corée du Nord. Le Kremlin pourrait également accepter la proposition de soutien faite par Donald Trump mercredi.
Après la mobilisation de nombreux citoyens et associations de défense de l’environnement – une pétition a recueilli près d’un million de signatures –, Poutine a finalement décidé d’abandonner la politique d’inaction qu’il prônait depuis le début des incidents. L’incendie, dont les fumées se répandent de l’Oural jusqu’au Kazakhstan, se situe en effet sur des territoires isolés et peu habités. L’Etat estimait donc que les coûts de la lutte contre les flammes auraient été beaucoup plus élevés que les dommages matériels encourus, une stratégie régulièrement mise en œuvre en Russie. Pourtant, Andrey Allakhverdov, coordinateur des médias pour le programme de prévention des incendies de Greenpeace, estime que cette situation catastrophique aurait pu être évitée avec une action rapide.
Pourquoi les autorités ont-elles fait le choix de ne pas lutter contre les feux de forêts malgré des conditions météorologiques favorisant leur propagation ?
Elles ont estimé que seuls des territoires reculés du nord étaient touchés et pensaient qu’il n’y avait pas d’habitations. Mais la situation est bien plus compliquée, puisque en réalité, on trouve dans cette zone des petits villages et quelques industries. Les citoyens et ONG ne comprennent toujours pas pourquoi les feux n’ont pas été éteints dès leur signalement. D’autant plus que le temps était sec et ensoleillé et qu’aucune précipitation n’était annoncée. Naturellement, les incendies ont grossi et sont devenus beaucoup plus puissants…./
…..
Quels effets ont de tels incendies sur la fonte des glaces de l’Arctique et le permafrost, ces deux indicateurs de réchauffement climatique ?
Les territoires enflammés sont relativement proches de l’Arctique. Les incendies ne le touchent pas directement mais le noir de carbone affecte directement les glaces. S’il se pose sur ces dernières, il absorbe la lumière solaire, au lieu de la refléter, se réchauffe et accélère la fonte. Concernant le permafrost, il est difficile pour l’instant de savoir si les incendies le concernent directement. Mais on sait déjà qu’indirectement, ils ont un effet très négatif sur ces territoires, puisqu’ils participent au réchauffement climatique. Le permafrost russe fond déjà à de nombreux endroits, ce qui cause des dommages très importants sur les infrastructures, les écosystèmes et la vie des citoyens. Sachant qu’en dégelant, il libère des gaz très polluants, on entre dans un cercle vicieux.
Libération 3 août 2019
photo : Dans la région de Krasnoïarsk, mardi. Photo HO. AFP