Le Conseil d’Etat a rendu son délibéré ce jour concernant la demande de suspension en urgence présentée par la LPO et l’association One Voice : sans surprise il suspend les arrêtés litigieux sans perdre plus de temps.
Lors de l’audience du 21 octobre, toutes les parties semblaient s’accorder sur l’irrégularité du piégeage non sélectif des oiseaux sauvages suite aux arrêts de la Cour de Justice de l’Union Européenne le 17 mars 2021 puis du Conseil d’Etat le 28 juin 2021, confirmant l’illégalité de la chasse à la glu. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, les arrêtés ayant autorisé le piégeage des alouettes dans le Sud-Ouest, et celui des vanneaux huppés, pluviers dorés, grives et merles dans les Ardennes pour la saison 2019-2020 avaient à leur tour été annulés par le Conseil d’Etat le 6 août 2021.
La tradition ne saurait justifier le manquement aux exigences de la Directive Oiseaux
Avec une telle jurisprudence constante, qui plus est portant sur les mêmes pratiques, on aurait dû en rester là. C’était sans compter la faiblesse du gouvernement face au lobby cynégétique : le 15 octobre, le Ministère normalement en charge de la biodiversité, signait, sans tenir compte une nouvelle fois des avis rendus lors de la consultation publique, 4 nouveaux arrêtés litigieux autorisant le piégeage de :
- 106 285 alouettes aux pantes (filets horizontaux) et matoles (cages tombantes) dans 4 départements du Sud-Ouest (Landes, Gironde, Lot-et-Garonne et Pyrénées-Atlantiques)
- 1200 vanneaux huppés, 30 pluviers dorés, 5800 grives et merles à l’aide de filets rabattants ou de lacets à nœud coulissant (Ardennes).
De leur côté la LPO et One Voice ont expliqué en quoi la suspension était rendue urgente, et ce notamment en raison du mauvais état de conservation de certaines espèces visées et du caractère non sélectif des pièges en question capturant, mutilant voire tuant des espèces y compris protégées. Sans compter le risque de voir la France, déjà mise en demeure car laissant faire ces pratiques, poursuivie devant la Cour de Justice de l’Union Européenne.
Sans aucune honte, les représentants du Ministère en charge de la transition écologique ont prétendu lors de l’audience que les piégeages étaient moins violents que le fusil, et que les oiseaux ainsi capturés ne souffraient pas puisqu’on leur tordait le cou !
La fédération nationale des chasseurs avaient quant à elle osé menacer de « troubles à l’ordre public » si les arrêtés se voyaient suspendus !!
Bien sûr il faudra désormais attendre le jugement sur le fond qui prendra plusieurs mois. Mais cette décision permet de stopper immédiatement le massacre des oiseaux sauvages, dont de nombreux migrateurs.
La stratégie cynique du gouvernement qui consistait, comme trop souvent, à reprendre des arrêtés pourtant cassés les années précédentes sous de faux prétextes, la veille de leur application et de préférence un week-end afin de laisser quand même braconner le temps que justice soit rendue, a pris du plomb dans l’aile. Elle aura néanmoins permis de tuer illégalement des milliers d’oiseaux entre le samedi 16 octobre et le lundi 25 octobre.
Pour Allain Bougrain Dubourg, « à 6 mois des élections présidentielles, il est plus que temps que le gouvernement soit à la hauteur de ses prétentions en matière de biodiversité. Non seulement les promesses non tenues sont sources de défiance, mais le temps presse pour les espèces à l’agonie ».
La décision du conseil d’Etat : 457535 et suivants – One Voice et LPO
Le communiqué du conseil d’Etat
Chasse traditionnelle des oiseaux : le juge des référés du Conseil d’État suspend les nouvelles autorisations
Saisi par deux associations de protection des animaux, le juge des référés du Conseil d’État suspend les nouvelles autorisations de chasse de plusieurs oiseaux (grives, merles noirs, vanneaux, pluviers dorés, alouettes des champs) par des techniques traditionnelles. En août dernier, le Conseil d’État a annulé les autorisations des années précédentes au motif de la non-conformité au droit européen d’une réglementation de 1989. Les nouvelles autorisations étant prises sur la base de cette même réglementation, le juge des référés estime qu’il existe un doute sérieux quant à leur légalité et c’est pourquoi il les suspend en urgence.
Le 6 août dernier, le Conseil d’État a annulé les autorisations ministérielles de chasse des vanneaux huppés, pluviers dorés, grives et merles noirs à l’aide de tenderies (filets fixés à terre ou nœuds coulants selon l’espèce chassée) dans le département des Ardennes, et des alouettes des champs à l’aide de pantes (filets horizontaux) et de matoles (cages) dans plusieurs départements d’Aquitaine pour les campagnes 2018 à 20201, au motif de la non-conformité à la directive européenne « Oiseaux » du 30 novembre 2009 de la réglementation de 1989 servant de base à ces autorisations annuelles.
Le ministre de la transition écologique a pris le 12 octobre dernier de nouvelles autorisations. La Ligue pour la protection des oiseaux et l’association One Voice qui avaient saisi le Conseil d’État des requêtes pour les campagnes précédentes ont demandé au juge des référés de suspendre en urgence ces autorisations pour la campagne 2021-2022.
Le juge des référés du Conseil d’État observe que ces nouvelles autorisations ont été prises sur la base de la même réglementation de 1989.
Pour cette raison, le juge des référés du Conseil d’État suspend les huit arrêtés d’autorisation pris le 12 octobre dernier par le ministre de la transition écologique. Après cette première décision rendue en urgence, le Conseil d’État statuera au fond sur les recours contre ces arrêtés dans les prochains mois.