Dragon de Komodo, requins, raies… L’Union internationale de conservation de la nature a dévoilé, samedi, la liste actualisée des espèces en danger en raison du dérèglement climatique.
Dans quelle mesure les espèces animales et végétales sont-elles sur le point de disparaître à jamais ? Réunie en congrès à Marseille, l’Union internationale de conservation de la nature (UICN) a rendu publique, samedi 4 septembre, une actualisation très attendue de sa « liste rouge », véritable baromètre de l’état du vivant sur notre planète. Sa dernière édition répertorie 138 374 espèces, dont 38 543, soit quelque 28 %, sont classées dans les différentes catégories « menacées ». Les spécialistes alertent sur un effondrement en cours de la biodiversité, certains évoquant une « sixième extinction de masse ».
« Ces évaluations de la “liste rouge” démontrent à quel point nos vies et nos moyens d’existence sont étroitement liés à la biodiversité », a souligné le directeur général de l’UICN, Bruno Oberle, dans un communiqué. Le congrès de l’UICN est l’occasion pour les décideurs politiques et la société civile de multiplier les messages sur ce lien entre l’effondrement en cours de la biodiversité et les conditions de vie des humains sur la planète, également menacées par le changement climatique.
Parmi les espèces emblématiques menacées, les dragons de Komodo, plus grands lézards au monde, ont vu leur statut passer de « vulnérable », plus basse des catégories menacées, à « en danger ». Quelques milliers de dragons de Komodo vivent sur un groupe d’îles indonésiennes, dont une partie est couverte par un parc national. Leur sort illustre le lien entre ces deux processus, de plus en plus souvent souligné par l’UICN.
Les conditions de vie de ces géants, qui mesurent jusqu’à trois mètres de long pour 90 kg, sont ainsi menacées à la fois par le réchauffement et l’activité humaine. « La hausse des températures et donc du niveau de la mer devrait réduire leur habitat d’au moins 30 % dans les quarante-cinq prochaines années », prévient l’UICN. Et si les dragons présents dans le parc national sont « bien protégés », ceux à l’extérieur « sont menacés d’une perte importante de leur habitat en raison des activités humaines ».
Amélioration de la situation du thon rouge
Autres victimes des humains : les requins et raies (qui font partie de la même famille), dont une réévaluation globale a montré que 37 % des 1 200 espèces étudiées sont désormais menacées. Toutes les espèces ainsi classées font face à la surpêche ; 31 % sont également confrontées à la dégradation ou la perte d’habitat et 10 % à des conséquences du changement climatique, toujours selon l’UICN.
« Bien trop de requins et de raies sont tués et les mesures contre la surpêche sont terriblement inadéquates » avec une exploitation « souvent légale même si elle n’est pas soutenable », selon un membre de l’université canadienne Simon-Fraser, auteur d’une étude sur laquelle est basée cette réévaluation. Or la dernière évaluation, menée en 2014, estimait alors que 24 % des espèces étudiées étaient en danger.
La « liste rouge » relève toutefois une amélioration de la situation de plusieurs espèces de thon : l’UICN se félicite de voir « quatre espèces de thon pêchées commercialement en voie de récupération grâce à la mise en œuvre de quotas régionaux » élaborés par des organisations spécifiques. Sur les sept espèces les plus pêchées, ces quatre ont ainsi vu leur classement redescendre dans la liste. Le thon rouge de l’Atlantique a même effectué un redressement spectaculaire, passant directement de « en danger » à « préoccupation mineure », trois catégories en dessous. Mais l’organisation prévient « qu’en dépit d’une amélioration globale, de nombreux stocks régionaux de thon restent appauvris ».
« Ces évaluations sont la preuve que les approches de pêche durable fonctionnent, avec des bénéfices énormes à long terme pour l’activité économique et la biodiversité », selon Bruce Collette, président à l’UICN du groupe spécialisé sur les thons.
L’organisation a d’ailleurs aussi présenté son nouveau « statut vert des espèces », destiné à mesurer la régénération des espèces et connaître l’impact des programmes de conservation. Il compte pour l’instant 181 espèces évaluées, encore loin de la « liste rouge » à laquelle il sera par la suite intégré. Malgré tout, la nouvelle « liste rouge » « montre que nous sommes tout près d’une sixième extinction de masse », insiste Craig Hilton-Taylor, responsable de son élaboration. « Si l’augmentation se poursuit à ce rythme, nous serons bientôt confrontés à une crise majeure. »