… Dur : Pierre Rabhi, l’agroécologue – écrivain, fondateur du mouvement Colibris et de Terre & Humanisme, parfois un peu réac, est mort

Pierre Rabhi, de son nom d’origine Rabah Rabhi essayiste, romancier, agriculteur, conférencier et écologiste français, fondateur du mouvement Colibris et « figure représentative du mouvement politique et scientifique de l’agroécologie en France est né le en Algérie, et mort le Sa pensée est inspirée par le mouvement anthropomorphique dont il promeut l’application agricole pseudo-scientifique appelée « biodynamie ». Il est critiqué pour cela, ainsi que pour une proximité avec des penseurs aux idées conservatrices, pour une présence médiatique excessive, et pour une « forme d’écologie non politique, spiritualiste et individualiste…

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Ses mots :

« Il nous faudra sans doute, pour changer jusqu’aux tréfonds de nos consciences, laisser nos arrogances et apprendre avec simplicité les gestes qui nous relient aux évidences. Retrouver un peu du sentiment de ces êtres premiers pour qui la création, les créatures et la terre étaient avant tout sacrées. »

« Il est grand temps de reconnaître à la Nature le magistère absolu d’être la garante de toute vie de de notre survie. Oublier ce caractère irrévocable condamne nos efforts à n’avoir aucun lendemain… »

« La nature est par définition le complexe vivant dans lequel l’être humain doit enfin trouver sa juste place s’il ne veut être éradiqué par ses propres erreurs. »

 

Libération, 5 décembre 2021

C’était une figure, ses disciples diraient même un gourou, de l’agro-écologie. Un sage, un humaniste, un paysan écolo et l’un des inventeurs du concept de «sobriété heureuse», plus vendeur que celui de «décroissance». L’écrivain et philosophe Pierre Rabhi est mort à l’âge de 83 ans des suites d’une hémorragie cérébrale, a appris l’AFP samedi auprès de sa famille. Pour bien des écolos il était un des apôtres de la décroissance, un sage dont la voix humaniste portait au-delà des ghettos militants. Pierre Rabhi, «c’est ce paysan, penseur et écrivain, né en 1938 dans le sud algérien qui, pour s’affranchir de sa condition aliénante d’ouvrier spécialisé, a choisi en 1961 le retour à la terre», écrivait Libération en 2013. «Une prise de maquis physique, morale et éthique par rapport à une société que je considère comme ayant été une grande illusion», racontait-il en 2013 dans le film intitulé Au nom de la terre, qui lui était consacré.

Sandales aux pieds, pantalon de velours et bretelles, bouc bien taillé, Pierre Rabhi c’était «52 kilos tout mouillé» mais un vrai charisme et des formules qui faisaient mouche pour appeler à une «insurrection des consciences». Né en 1938 aux portes du Sahara, il est très tôt écartelé entre «modernité et tradition», quand son père le confie à une famille de colons français, afin de lui assurer une meilleure instruction. Rabah deviendra alors Pierre.

«Des déchirements, des ruptures, des souffrances, il y en a eu un bon paquet», confiait cet autodidacte, enraciné en Ardèche depuis 1961, après avoir quitté l’Algérie au début des «événements» et connu «l’incarcération» d’une vie parisienne. A l’usine, il rencontrera Michèle, secrétaire de direction et future mère de ses cinq enfants, avec qui il échafaude ce retour à la terre, dans une volonté de «désaliénation» car «nous ne sommes pas nés pour produire».

Pour acheter ce qui deviendra leur ferme, le frêle Pierre Rabhi, mû par «l’énergie tenace des gens du désert», se fera maçon, menuisier, ferronnier, ramasseur de truffes, ouvrier agricole… Il restera comme l’un des pionniers de l’agroécologie – pratique agricole visant à régénérer le milieu naturel en excluant pesticides et engrais chimiques. Une méthode appliquée dès les années 1980 en Afrique sub-saharienne, où il effectuera de nombreux séjours.

Référence dans le sérail écologiste et altermondialiste, celui qui fut l’ami de Thomas Sankara ou du légendaire violoniste Yehudi Menuhin a connu une certaine exposition médiatique en 2002, lors d’une éphémère candidature à la présidentielle pour, déjà, «introduire dans le débat l’urgence écologique et humaine». Il partagera par la suite son temps entre interviews, animation de ses fondations, conférences et rédaction d’ouvrages… Même si dans ce riche programme, le temps de jardinage n’était «pas négociable».

«Il y a une espèce d’inconscience, nous sommes dans une modernité aveugle, dans le sens où l’on ne voit plus que le gain financier», déclarait-il à l’AFP en octobre 2018.

La ritournelle du colibri

En lui, le moine bouddhiste Matthieu Ricard voyait un «frère de conscience». Et il sera adulé par l’actrice Marion Cotillard ou Nicolas Hulot. «Une des rares personnes qui m’ont aidé à me construire»,confie l’ex-animateur de télévision.

Il fallait voir Pierre Rabhi raconter avec toujours la même énergie la légende amérindienne des colibris devant un parterre de groupies. «L’histoire dit qu’un jour il y a eu un grand incendie de forêt. Tous les animaux ont été découragés. Par contre le colibri ne renonce pas, il va prendre une goutte d’eau dans son bec et va la jeter sur le feu. Un moment le tatou lui dit: “colibri, tu ne vas quand même pas croire que c’est avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ?” Il répond: “je le sais mais je fais ma part”.» Il en fera une maxime – «chacun doit faire sa part» – et co-fondera le mouvement des Colibris avec l’écrivain militant Cyril Dion. «Je ne veux pas être un gourou», disait-il pourtant. De ses cinq enfants, seule Sophie marche dans son sillage. Elle a fondé en Ardèche un écovillage construit autour d’une école, La ferme des enfants, projet fragilisé par une crise interne.

Les ouvrages de Pierre Rabhi, innombrables, rencontrent à chaque fois un succès indéniable. A commencer par son livre-plaidoyer, Vers la sobriété heureuse, vendu à plus de 460 000 exemplaires depuis sa parution en 2010, selon son éditeur Actes Sud. «L’agroécologie est reconnue maintenant, même par les Nations unies, comme étant la bonne solution pour résoudre les problèmes de l’alimentation dans le monde», se réjouissait-il. Elle «a beaucoup bénéficié des avancées scientifiques en matière de compréhension des sols et de la vie biologique». Sans parti, militant de «la joie» plutôt que de «la décroissance», Pierre Rabhi rejetait catégoriquement la notion de «développement durable», «une niaiserie ajustée sur la croissance économique».

Certains, comme le site d’information Mediapart, ont pu s’interroger sur son «écologie inoffensive». Une autre enquête, intitulée «Le système Pierre Rabhi» et publiée en 2018 dans le Monde diplomatique, l’avait visiblement blessé et poussé ses amis, comme la journaliste Marie-Monique Robin, à le défendre publiquement.

Pourquoi les hommages à Pierre Rabhi ne font pas l’unanimité (Huffington Post)

Au milieu des hommages, plusieurs personnalités politiques et anonymes ont tenu à rappeler les propos contre le mariage pour tous ou la PMA du philosophe.

Les réactions sont mitigées. L’écrivain et philosophe Pierre Rabhi, pionnier de l’agroécologie en France et cofondateur du mouvement Colibris, est décédé samedi 4 décembre à l’âge de 83 ans.

Auteur notamment de Vers la sobriété heureuse, plaidoyer sur la joie de vivre dans la simplicité, vendu à plus de 460.000 exemplaires, ce militant de la cause écologiste est mort samedi des suites d’une hémorragie cérébrale, a indiqué à l’AFP son fils, Vianney.

L’annonce de son décès a suscité de nombreuses réactions dans la sphère politique et écologiste. Mais toutes n’ont pas été aussi positives que celle du candidat écologiste à la présidentielle, Yannick Jadot, qui a salué la mémoire de “l’un des grands précurseurs de l’agroécologie”.

De nombreux internautes s’étaient en effet offusqués des hommages politiques rendus à Pierre Rabhi. Parmi eux, la doctorante Marion Beauvalet s’est dite très ”étonnée de cette gauche qui multiplie les hommages enflammés à Pierre Rabhi, père d’une pensée plus proche du développement personnel que de l’écologie, également homophobe et réactionnaire”.

“Pierre Rabhi était un penseur homophobe qui considérait les homosexuels et les familles homoparentale comme anormal sans parler que pour lui la fonction de principale de la femme était une fonction reproductive et qu’il avait tout d’un gourou sectaire”, a écrit Maxime en réponse au tweet hommage d’Anne Hidalgo.

Des propos contre le mariage pour tous

Dans un livre d’entretiens paru en octobre 2013 aux éditions Actes Sud, intitulé “Pierre Rabhi, semeur d’espoirs” le philosophe s’était vivement opposé au mariage pour tous, estimant que “la validation de la famille homosexuelle était “dangereuse pour l’avenir de l’humanité”, car “par définition inféconde”.

Un “précurseur de l’écologie”, mais…

Mais au milieu des hommages, de nombreuses personnalités ont tenu à rappeler le conservatisme de Pierre Rabhi sur les droits des femmes ou encore l’homosexualité.

Ainsi, l’écoféministe Sandrine Rousseau a salué la mémoire d’un “précurseur incroyable de l’écologie, la sobriété heureuse et le colibri” mais un “conservateur sur les questions sociétales, l’homosexualité et les femmes”.

France Culture