Suite au communiqué anti-loup de la Commission européenne en date du 4 septembre 2023, nos associations dénoncent aujourd’hui des propos gravissimes et un message négatif pour la conservation de la biodiversité.
Ursula von der Leyen, présidente de la commission européenne, ne nous avait pas habitués à de telles déclarations d’un niveau rare d’ignorance et d’irresponsabilité. Sur quelle base scientifique se fonde-t-elle pour affirmer que le loup est un danger pour les humains ? Il y a 1000 loups en France, davantage en Allemagne, 2000 en Espagne, plus de 3000 en Italie, 3500 en Roumanie et d’autres populations importantes résident en Europe de l’Est, d’où l’espèce n’a jamais disparu. Si le loup s’attaquait aux humains, on le saurait depuis longtemps ! Même si un accident est toujours possible, comme avec n’importe quelle espèce animale sauvage comme domestique, il n’existe aujourd’hui aucun témoignage sérieux d’attaque de loup sur l’homme en Europe. Ces allégations alarmistes sont scandaleuses venant d’une responsable politique d’un tel rang.
Ursula von der Leyen lance-t-elle une vindicte personnelle contre le loup suite à la mort de son poney en septembre 2022 (tué par un loup) ou utilise-t-elle l’animal comme manœuvre politique pour s’assurer le renouvellement de son mandat en 2024 ? Il serait déplorable de la part d’une présidente de la Commission Européenne de mélanger ainsi affaire personnelle et intérêt général.
Quoiqu’il en soit, les lobbies et élus anti-nature désirant déclasser le loup depuis des années ont trouvé en elle une alliée de choix alors que jusqu’à présent la révision du loup n’était pas du tout à l’ordre du jour de la Commission. Même si les populations de loups sont en expansion grâce à une certaine dynamique démographique et à la présence de nombreuses proies sauvages, en particulier des ongulés, sur tout le territoire européen, l’espèce reste encore vulnérable compte-tenu de la pression politique et lobbyiste qui est exercée suite à son retour.
Ursula von der Leyen appelle ensuite les « autorités locales et nationales à prendre les mesures qui s’imposent. En effet, la législation européenne actuelle leur permet déjà de le faire », sous-entendu « vous pouvez tuer des loups ». En France, nos associations déplorent déjà depuis des années que les pouvoirs publics usent et abusent des exceptions permises par la Directive Habitat-Faune-Flore pour abattre des loups à outrance (jusqu’à 21 % de la population selon l’arrêté cadre) sans même respecter les conditions nécessaires et alors même que les scientifiques (rapport 2017 OFB / MNHN) ont alerté sur le trop grand nombre de tirs de loups pour garantir la conservation de l’espèce à long terme.
Rappelons que l’Italie et l’Espagne ont mis un terme à leur politique de tirs en constatant leur inefficacité. Seule la France maintient un niveau élevé de tirs : 200 loups peuvent être abattus cette année alors même que la population donne des signes de faiblesse (1)…
Enfin, si la Commission européenne envisage, sous l’impulsion de sa Présidente, de proposer une modification de la directive Habitat en vue de réduire, voire de supprimer les textes protecteurs du loup, elle s’expose à méconnaître gravement ses engagements internationaux, ainsi qu’à commettre une atteinte aux dispositions de l’article 191 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). En effet, l’Union européenne a signé la convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe, et doit, de ce fait, respecter ses engagements, dont la protection stricte du loup fait partie. Fort heureusement, l’infléchissement de la protection du loup à travers les textes nationaux comme européens n’est possible qu’en empruntant un chemin juridiquement long.
Alors Madame Von der Leyen, s’agit-il d’un effet d’annonce pour contenter certains lobbies ? Ou envisagez-vous de méconnaître les textes fondateurs que vous êtes censée respecter et protéger ? Vos seuls propos trahissent les engagements de l’Union européenne à l’égard de la protection de la biodiversité.
Nos associations continueront de soutenir qu’une cohabitation apaisée avec l’élevage et les humains est possible et que le retour du loup est une chance pour nos écosystèmes. Elles rappellent que seules les mesures de protection (berger, chiens de protection, filets électriques notamment) sont efficaces pour protéger les troupeaux.
(1) Les dernières données OFB montrent une croissance de la population de loups de seulement 0.73 % (alors qu’elle était de 12 % il y a 5-6 ans).
Les associations signataires : FERUS, ASPAS, SFEPM, le 11 septembre 2023