Biodiversité: que révèle le plus grand état des lieux mondial de la diversité génétique ?

Avec la diversité des espèces et celle des écosystèmes, la diversité génétique est l’une des trois composantes fondamentales de la biodiversité. La plus grande analyse menée à ce jour au niveau mondial révèle quelques « lueurs d’espoir » au milieu d’un déclin global (université de Sydney).

Le tétras cupidon (ou tétras des prairies) porte bien son nom. Qu’il s’agisse de ses sourcils – en réalité, des excroissances charnues appelées « caroncules » – ou des sacs vocaux que le mâle gonfle devant sa partenaire, ses appendices d’un jaune-orange vif font de lui un séducteur hors pair.

Cependant, la chasse, la conversion des prairies en cultures agricoles ainsi que la pression de pâturage accrue au niveau des prairies restantes ont déjà fait disparaître l’une des trois sous-espèces de cet oiseau endémique d’Amérique du Nord.

Depuis, grâce aux « translocations », c’est-à-dire aux transferts d’individus d’un site à l’autre, ainsi qu’à des mesures de restauration de l’habitat, l’une des deux dernières sous-espèces (Tympanuchus cupido pinnatus) a vu sa situation s’améliorer considérablement : c’est l’un des succès de conservation mis en exergue par les auteurs d’une étude internationale publiée le 29 janvier dans la revue Nature.

Des gènes variés pour s’adapter quand l’environnement change

Le bandicoot doré, un marsupial australien à l’allure de petit rongeur, le renard arctique, la cordulie de Hine (libellule américaine) et le chien de prairie sont également mentionnés par ces chercheurs pour avoir bénéficié d’actions en faveur de la diversité génétique – cette composante fondamentale de la biodiversité souvent éclipsée par celle des espèces.

Lorsqu’une population animale ou végétale se compose d’individus possédant des gènes variés, celle-ci se trouve davantage en capacité de s’adapter lorsque les conditions environnementales changent. À l’inverse, une diversité génétique faible est souvent synonyme de « mauvaise santé » au sein d’une espèce, conduisant parfois celle-ci jusqu’à l’extinction.

Pour dresser un état des lieux de la diversité génétique à travers la planète, les auteurs ont réalisé ce que l’on appelle une « méta-analyse » – le type d’étude procurant le plus haut degré de fiabilité.

Celle-ci a consisté à récupérer les données d’études antérieures et à les ré-analyser pour pouvoir les mettre sur le même plan, malgré des différences de méthodologie. Les auteurs ont ainsi rassemblé plus de 4 000 résultats provenant de près de 900 études scientifiques, couvrant plus de trois décennies (1985-2019) et portant sur 628 espèces d’animaux, de plantes et de champignons, terrestres ou marins.

2 populations sur 3 ont vu leur diversité génétique diminuer

Résultat : si les deux tiers des populations analysées ont vu leur diversité génétique diminuer, les autres ont en revanche bénéficié des nombreux efforts de conservation mis en œuvre jusqu’ici, notamment des translocations et de la restauration de l’habitat déjà mentionnées, mais également de la régulation des animaux domestiques retournés à l’état sauvage (féraux), tels que les chats harets.

« Il est indéniable que la biodiversité diminue à un rythme sans précédent dans le monde entier, mais il y a des lueurs d’espoir », souligne ainsi la Professeure Catherine Grueber, qui a supervisé la recherche, dans un communiqué de l’université de Sydney (Australie) où elle exerce. « L’action des défenseurs de l’environnement permet (…) de créer des populations génétiquement diversifiées, mieux à même de relever les défis futurs », ajoute-t-elle.

« Malgré les succès, nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers », nuance sa compatriote Robyn Shaw de l’université de Canberra, première auteure de l’étude. Parmi les populations dont la diversité génétique a décliné, « moins de la moitié a fait l’objet d’un quelconque plan de conservation », rappelle-t-elle.

Source GEO