A quelques mois des élections européennes, l’écologie est devenue une préoccupation majeure des citoyens, au même titre que l’emploi ou le pouvoir d’achat.
C’est la pétition française la plus signée de l’histoire, et il faut s’en réjouir. Lancée le 17 décembre par quatre ONG, « L’Affaire du siècle », qui vise à attaquer l’Etat en justice pour « inaction climatique », a recueilli en ce début 2019 environ 2 millions de signatures en ligne. On peut contester la démarche, estimer qu’il est d’autres moyens de mettre le gouvernement face à ses responsabilités. Mais l’émergence de la justice climatique, plus qu’une prise de conscience, est un moment de cristallisation. Le sentiment collectif que le dérèglement climatique est déjà là. L’évidence qu’il faut agir de toute urgence. A quelques mois des élections européennes, l’écologie est devenue une préoccupation majeure des citoyens, au même titre que l’emploi ou le pouvoir d’achat. Des jeunes en premier lieu, dont l’avenir est en jeu.
Changement drastique de nos modes de vie
Il était plus que temps. Selon le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié en octobre 2018, toute augmentation des températures au-delà de 1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels aggraverait considérablement les impacts sur l’environnement que nous observons déjà partout dans le monde – jusqu’à provoquer, peut-être, un effondrement de notre civilisation. Or, limiter cette hausse à 1,5°C suppose non seulement une immense volonté politique, mais aussi un changement drastique de nos modes de vie. Objectif démesuré ? Raison de plus pour redoubler d’imagination. Et pour donner la parole aux philosophes, historiens, économistes et naturalistes, de plus en plus nombreux à s’être emparés de la question écologique.
Faut-il renoncer au progrès ? Les modèles alternatifs locaux sont-ils transposables à grande échelle ? Comment imposer la contrainte écologique dans les politiques publiques ? Articuler l’urgence écologique et la réduction des inégalités ? Quelles nouvelles solidarités construire entre nous et avec la nature ? Les réponses de la philosophe Isabelle Stengers, de l’ancien ministre délégué au développement Pascal Canfin, de l’économiste Eloi Laurent, de la primatologue Jane Goodall et de bien d’autres, réunies dans ce numéro spécial, le confirment toutes : un autre monde est possible. Alors place à l’action, et bonne année 2019 !
Par Catherine Vincent/Le Monde, 6 janvier
Illustration : Sarah Bouillaud pour LE MONDE