Cette chasse avec des pièges englués fait face à des contestations et des interrogations, y compris de la Commission européenne.
Avec délicatesse, et fierté, Daniel Portalis extraie de grands coffrets en bois les baguettes recouvertes de glu, appelées gluaux. Longues de quelque 70 centimètres, fines, elles sont destinées à être fixées sur des branches d’arbres, d’arbustes ou au sommet de grandes perches basculantes (quatre mètres de haut), appelées cimeaux, que l’on redresse afin que les gluaux se trouvent au niveau de la cime des arbres.
Grives et merles noirs se posent sur des pièges englués. Ils sont décollésà l’aide de solvants. Puis utilisés pour attirer d’autres oiseaux, qui sont tirés par les chasseurs.
Le principe de cette chasse à la glu est simple : grives (quatre espèces sont ciblées : la grive musicienne, draine, mauvis, litorne) et merles noirs se posent sur ces pièges englués. Le chasseur vient les décoller et les nettoyer à l’aide de cendres ou, plus souvent, d’un dissolvant. Le petit oiseau – la taille varie de vingt à trente centimètres selon l’espèce, et le poids n’excède pas 100 grammes – est alors mis en cage. Il servira d’appelant pour attirer, en chantant, d’autres grives, et permettre aux chasseurs de les tirer. Cette chasse se pratique de l’aube, une heure avant le lever du soleil, jusqu’à 11 heures.
Des hauteurs du quartier de Sainte-Mitre, la vue sur Marseille et la Méditerranée est superbe et les randonneurs, vététistes et coureurs adorent en arpenter les chemins. Sur ces 1 200 hectares du domaine de l’Etoile, Daniel Portalis ainsi qu’une cinquantaine d’autres chasseurs à la glu s’adonnent à cette chasse « traditionnelle » que seuls cinq départements en France ont le droit de pratiquer (Alpes-de-Haute-Provence, Alpes-Maritimes, Bouches-du-Rhône, Var et Vaucluse).
C’est là que son poste de feu, une cabane en bois camouflée sous les branches, est installé.
« J’ai toujours chassé au poste depuis que j’ai 16 ans. J’ai une quarantaine d’appelants en cage à la maison et je viens le plus souvent possible ici », explique Daniel Portalis, 66 ans.
Depuis le 12 décembre, il ne peut plus utiliser ses gluaux, la période pour cette chasse étant terminée – elle débute en septembre. La date de clôture varie selon les départements, la plus tardive étant fixée au 16 décembre dans le Vaucluse.
Jugée « cruelle » par les écologistes, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) en tête, la chasse à la glu fait l’objet de nombreuses contestations devant la justice. La France doit aussi répondre à la Commission européenne, qui lui demande des informations dans une démarche précontentieuse. L’article 9 de la directive européenne de 1979, « concernant la conservation des oiseaux sauvages », prévoit des dérogations pour certaines espèces, à certaines conditions, dont notamment le contrôle des « moyens, installations ou méthodes de capture ou de mises à mort autorisés »….
Voir l’article de Par Rémi Barroux dans Le Monde/15 décembre