Le projet BioTJet va raser des forêts des Pyrénées-Atlantiques pour faire voler des «avions verts»

Piloté par Elyse Energy et soutenu par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), le projet BioTJet entend créer une usine de biocarburant dans les Pyrénées-Atlantiques afin d’approvisionner le secteur aéronautique à partir de bois. Un objectif à priori vertueux qui ne va pas sans menacer la forêt du département, alerte l’association Canopée, spécialisée dans la défense des forêts.

Décarboner le transport aérien : depuis plusieurs années, politiques et pontes du secteur aéronautique semblent n’avoir plus que ces mots à la bouche pour envisager la transformation de ce secteur responsable, à lui seul, de 3 à 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Accueilli en grande pompe, ce projet pourrait à première vue sembler prometteur. Piloté par Elyse Energy, spécialiste des carburants bas-carbone, BioTJet vise à implanter une usine de production de biocarburants à base de bois à Pardies, sur le bassin de Lacq, site industriel qui s’est développé grâce à l’exploitation du gisement de gaz de Lacq et l’industrie chimique, ce qui ferait du site des Pyrénées-Atlantiques le premier site de production durable pour l’aviation en France.

Prévue à l’horizon 2028, avec un début de construction annoncé pour 2025, l’usine devrait permettre, en sus des 700 emplois directs et indirects créés, de “fournir aux acteurs du transport aérien un volume de biokérosène durable équivalent à 30% de la consommation annuelle d’un aéroport comme Bordeaux Mérignac”, annoncent les porteurs de projet.

Un projet en faveur d’une aviation dite “verte” qui, sans surprise, peine pourtant à remporter l’adhésion des associations de préservation de l’environnement, parmi lesquelles Canopée – Forêts vivantes. Spécialisée dans le plaidoyer pour la défense des forêts, l’association s’inquiète dans un récent rapport de la quantité de bois nécessaire à l’approvisionnement de l’usine, dont l’objectif annoncé est de produire 110.000 tonnes de biocarburant par an à compter de 2027. “D’après nos calculs, il faudrait récolter jusqu’à 400 000 tonnes de bois par an pour approvisionner l’usine, entame Bruno Doucet, chargé de campagnes pour Canopée. Alliance forêts bois [première coopérative forestière de France, d’ailleurs maintes fois épinglée par Canopée pour ses pratiques délétères, NDLR], qui a été pressentie pour effectuer ces récoltes, parle de 300 000 à 600 000 tonnes de bois par an, mais dans tous les cas, cela reste beaucoup trop.”

Et pour cause : “Si l’on additionne les 400 000 tonnes de bois qui seraient nécessaires à l’approvisionnement de BioTJet aux 200 000 tonnes de bois qui sont déjà prélevées chaque année dans le département, cela représente 4,2% du volume total du bois des forêts du département, alors même que les forêts ne croissent que de 2,8% par an, poursuit Bruno Doucet.

Si ce projet venait à voir le jour, et que la récolte devenait supérieure à l’accroissement des forêts, les forêts des Pyrénées-Atlantiques pourraient donc être amenées à disparaître peu à peu pour alimenter l’usine de biocarburant BioTJet.” Interrogés sur ces aspects, les porteurs du projet BioTJet que sont Elyse Energy, Avril, Axens, Bionext et IFP Investissements ont refusé de répondre à nos questions et nous ont renvoyés vers les communiqués de presse publiés au cours des mois précédents.

Source : La Relève et la Peste