Le rewilding consiste en la restauration en pleine nature d’espèces perdues. Il peut ainsi avoir des influences en cascade sur l’ensemble de l’écosystème. Et même atténuer le réchauffement climatique. C’est la conclusion d’une évaluation mondiale menée par des chercheurs britanniques.
En 1995, le loup gris a été réintroduit dans le parc national de Yellowstone (États-Unis). En quelques années, l’écosystème local s’est complexifié et enrichi. Et d’autres histoires de ce type plaident en faveur du rewilding. Mais qu’en est-il vraiment des bénéfices à l’échelle de la planète ? Des chercheurs de l’université du Sussex (Royaume-Uni) se sont posé la question. Leur conclusion : le rewilding peut aider à atténuer le changement climatique.
Le saviez-vous ?
Le rewilding, qu’est-ce que c’est ? En français, on devrait plutôt parler de réensauvagement. L’idée : réimplanter des espèces disparues, animales ou végétales avec pour objectif de laisser ensuite la nature reconstituer les écosystèmes.
Il peut aussi tout simplement s’agir de proscrire toute intervention humaine sur un écosystème afin de le laisser évoluer à son rythme et à son goût.
« L’essentiel à retenir ici, c’est que la nature est complexe. Elle a besoin de cette complexité pour prospérer », explique Chris Sandom, biologiste, dans un communiqué de l’université du Sussex. Pour prospérer et trouver un équilibre.
Imaginez par exemple de vastes troupeaux d’herbivores se régalant de la végétation d’une région. Ce serait plutôt une bonne nouvelle dans une région comme l’Arctique. Une étude menée par des chercheurs de l’université d’Oxford (Royaume-Uni) l’a récemment montré. Introduire à grande échelle des herbivores dans la toundra pourrait permettre de restaurer les steppes du passé, empêcher la réduction de l’albédo de l’Arctique, éviter la fonte du pergélisol — qui pourrait libérer une quantité colossale de carbone dans l’atmosphère — et atténuer ainsi, de manière économiquement viable, le réchauffement climatique. D’autant que les grands herbivores participent à la dispersion des graines des arbres qui contribuent le plus largement au stockage du CO2.
Le castor est l’une des espèces maîtresses des opérations de rewilding car il joue un rôle écologique de premier plan sur les bords des cours d’eau. Après plusieurs années de débats sur la question, il a par exemple été réintroduit avec succès en différents endroits de l’Écosse. © Cszmurlo, Wikipedia, CC by-2.5
Dompter la complexité de la nature
Mais la nature est complexe, soulignait Chris Sandom. Ainsi, une population trop importante d’herbivores dans une région peut nuire à la santé et à la résilience de l’écosystème. En s’attaquant aux arbres, ces animaux empêchent leur croissance et limite le stockage du CO2, nuisant ainsi à notre climat. D’autant que les ruminants, surtout, sont réputés émettre du méthane, un puissant gaz à effet de serre. Il est donc indispensable de réintroduire également des prédateurs qui vont contrôler les populations d’herbivores.
Les chercheurs de l’université du Sussex indiquent ainsi que, en Europe ou en Amérique du Nord, rétablir des populations de loups — qui ont disparu avec le temps — permettrait de réduire le nombre des gros herbivores (les cerfs, par exemple, qui eux, n’ont pas disparu) et donnerait à la végétation l’occasion de se développer. Le tout avec un effet positif, bien sûr, sur le réchauffement climatique.
Mais il faut rester prudent, car réintroduire dans une région toutes les espèces qui y ont évolué un jour pourrait avoir un effet pervers. En Afrique, par exemple, où les herbivores pourraient prendre le dessus et nuire à la croissance des arbres dans la savane. Car les populations de grands herbivores — tels les éléphants — s’avèrent limitées par la disponibilité en nourriture plus que par la présence de prédateurs.
Se concentrer sur des études de cas locaux
« À l’avenir, les travaux de recherche devraient se concentrer sur l’étude de cas locaux et inclure les questions de faisabilité sociale et écologique de la réintroduction d’espèces ainsi que les effets de telles opérations sur le climat ou sur d’autres problématiques », conclut Owen Middleton, chercheur à l’université du Sussex.