La convergence des observations d’un forestier, Peter Wohleben et d’une scientifique de la British Columbia University au Canada, Suzanne Simard peut tous nous toucher et changer notre vision des forêts. Avec beaucouo de simplicité, ils montrent que la vie végétale est beaucoup plus intense que ce que l’or imagine généralement.
La première chose qu’ils nous apprennent c’est que les arbres communiquent par un réseau dense de mycorhizes : l’association symbiotique des champignons et des racines des arbres. Les champignons sont composés dans leur partie souterraine par des hyphes, des filaments très fins qui deviennent visibles une fois entrelacés et forment le mycélium. Ce mycélium colonise les racines des arbres environnants et finit par relier différentes espèces les unes aux autres, formant un réseau très fourni.
Ils s’échangent ainsi des nutriments, par le biais de ce réseau parfois appelé le World Wide Wood. Même deux espèces différentes interagissent, leurs racines étant en permanence connectées.
« Quand les arbres-mère sont blessés ou mourants, ils envoient aussi des messages de sagesse à la prochaine génération d’arbres (…) pas seulement du carbone mais aussi des signaux de défense. Et ces deux éléments ont augmenté la capacité de résistance des arbres récepteurs aux stress futurs », explique Suzanne Simard
Ces réseaux mycorhiziens ont des points nodaux, des hubs si l’on veut : les arbres les plus anciens ou « arbres-mère », qui sont une réserve de mémoire sur les maladies, les températures, les périodes de sécheresse ou de froid, en bref une réserve d’expérience de tout ce qui pourrait nuire à la forêt dans le futur. Ces connaissances sur les connexions qui relient les arbres entre eux, les constituant en système d’interdépendance, sont très mal connues de l’industrie forestière, et c’est un réel problème tant pour Peter Wohlleben que pour Suzanne Simard qui déplore la pratique de la coupe claire.
La déforestation est certes un problème épineux puisque chaque année dans le monde, environ 15 millions d’hectares de forêt disparaissent, mais la replantation est tout aussi problématique et ne peut être résumée à un chiffre qui indiquerait le nombre d’arbres plantés. Il s’agit trop souvent de replanter une ou deux espèces seulement, négligeant la biodiversité végétale initiale de la portion de forêt déboisée, favorisant la propagation de maladies ou l’absence de résistance aux changements climatiques.
Peter Wohlleben compare les monocultures et les forêts intactes, et le constat est assez flagrant : « Des recherches ont été faites sur des forêts de hêtres. Les chaudes journées d’été, celles laissées intactes sont plus fraîches de 3,5°C en moyenne que celles exploitées ». Peter Wohlleben et Suzanne Simard en sont convaincus, changer notre regard sur les forêts et surtout notre manière de les exploiter est capital avant qu’il ne soit trop tard.
L’industrie forestière doit donc profondément se renouveler afin de ne pas continuer à taper à l’aveugle dans une ressource beaucoup plus complexe en profondeur qu’en apparence. Il ne suffit pas de replanter n’importe comment après avoir déboisé, c’est tout le système d’exploitation qui doit être refondé, en supprimant notamment la pratique des coupes claires, désastreuse pour les écosystèmes.
Certains critiqueront l’anthropomorphisme apparent du documentaire mais peut-être qu’il faut à un certain moment dépasser des questions de forme pour s’intéresser au contenu des choses plutôt qu’à l’emballage. L’anthropomorphisme est évidemment un procédé rhétorique qui a pour but de rendre ce savoir scientifique très pointu beaucoup plus accessible.
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