Fort de ses 112.0000 hectares de vignes, le vignoble bordelais est engagé depuis plus de 20 ans dans la préservation de l’environnement, de la biodiversité et dans la réduction des intrants phytosanitaires. En 2017, le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) a financé une étude coordonnée par la LPO Aquitaine, en collaboration avec Eliomys et l’ INRA (équipe Santé et Agroécologie du Vignoble). L’objectif ? Étudier la prédation des chauves-souris sur les tordeuses de la grappe, ces fameux papillons ravageurs de la vigne. Les résultats sont éloquents :
Les chauves-souris augmentent leur activité de chasse en présence des ravageurs
Sur 23 parcelles de vignes girondines et à l’aide d’ultrasons enregistrés, l’activité des chauves- souris a été observée suivant la présence ou non des papillons ravageurs. Sur les 22 espèces connues à ce jour en Gironde, 19 ont été « contactées » au moins une fois dans les vignobles, témoignant ainsi d’une grande diversité chiroptérologique. Plus étonnant encore : certaines espèces augmentent de façon significative leur activité de chasse lorsque celles-ci sont confrontées à l’émergence des papillons ravageurs.
Les analyses moléculaires confirment la prédation des ravageurs par les chauves-souris
Et pour s’assurer que ce phénomène n’est pas uniquement lié à la présence concomitante d’autres insectes, le régime alimentaire des chauves-souris a été minutieusement étudié, via des analyses génétiques de leur guano (fèces). Pour ce faire, des outils moléculaires ont été mis en place par L’INRA, qui s’est également appuyé sur des guanos témoins issus de chauves-souris recueillies par le centre de soins de la LPO Aquitaine et nourries avec des papillons ravageurs. Ainsi, la présence d’ADN des tordeuses de la vigne a été mise en évidence dans une grande partie des guanos de chauves-souris issues des milieux viticoles. Et ce, même avec des taux d’infestation des vignes faibles. Ces résultats attestent donc de façon formelle, et pour la première fois, la capacité des chauves-souris à se nourrir d’Eudémis et de Cochylis, des ravageurs qui, en cas de pullulation, contraignent les viticulteurs à l’emploi d’insecticides.
La suite : une alternative possible, mais avec de nombreuses questions à élucider
Cette étude est un bel exemple de collaboration possible entre acteurs de la filière viticole, de la recherche et du monde associatif, pour permettre à la biodiversité de jouer pleinement son rôle dans l’équilibre, la productivité et la résilience des agrosystèmes. Si désormais la preuve est faite que les chauves-souris sont des alliées pour les viticulteurs, il reste à estimer les effets de la prédation des ravageurs et les dégâts infligés aux raisins. Mieux appréhender l’utilisation de l’espace viticole par les chauves-souris permettra d’accompagner efficacement les viticulteurs dans l’aménagement de leur vignoble. Puissent les chauves-souris jouer pleinement leur rôle régulateur.
Contact presse :
Yohan Charbonnier – Chargé de mission scientifique LPO Aquitaine
yohan.charbonnier@lpo.fr www.lpoaquitaine.org
Sara Briot-Lesage – CIVB
sara.briot-lesage@vins-bordeaux.fr