Des groupes de dauphins mâles s’allient avec d’autres groupes pour former des alliances plus grandes, qui elles-mêmes coopèrent entre elles : c’est la découverte réalisée par une équipe internationale menée par des chercheurs de l’université de Bristol (Royame-Uni).
Ce qui différencie l’humain des autres animaux, c’est… » : Si une phrase commence ainsi, il y a de fortes chances pour que la suite finisse par se trouver battue en brèche par de nouvelles découvertes scientifiques sur le comportement animal.
Ainsi, longtemps considérées comme le propre de l’Homme, les alliances sociales à plusieurs niveaux – un groupe s’allie avec un autre pour former un groupe plus grand, et ainsi de suite – existent en réalité chez au moins une autre espèce de mammifère, à savoir : le grand dauphin de l’océan Indien, ou grand dauphin de l’Indo-Pacifique (Tursiops aduncus).
En analysant les données comportementales de quelque 122 grands dauphins de Shark Bay en Australie, une équipe de chercheurs de l’université de Bristol (R.-U.), de l’Université de Zurich (Suisse) et de l’Université du Massachusetts (Etats-Unis) est parvenue à reconstituer les « réseaux sociaux » – au sens de relations de coopération entre les individus – des cétacés.
Un avantage pour la reproduction des dauphins mâles
Selon leurs résultats, publiés dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), les dauphins forment des alliances dites « de premier ordre », avec deux ou trois mâles. Ces groupes s’associent entre eux pour former des alliances de « deuxième ordre », composées de quatre à quatorze mâles. Si ces « super-groupes » peuvent entrer en compétition pour les femelles, il leur arrive parfois de coopérer, constituant alors des alliances de « troisième ordre » – jusqu’à une cinquantaine d’individus au total.
De plus, les scientifiques ont montré que la durée pendant laquelle les super-groupes de dauphins mâles fréquentaient les femelles dépendait du fait d’appartenir ou non à des alliances de troisième ordre. Autrement dit, les liens sociaux complexes confèrent un avantage aux mâles pour la reproduction.
« Non seulement nous avons montré que les grands dauphins mâles forment le plus grand réseau d’alliance à plusieurs niveaux connu en dehors des humains, mais aussi que les relations de coopération entre les groupes – en dehors de la simple taille de l’alliance – permettent aux mâles de passer plus de temps avec les femelles, augmentant ainsi leur succès reproductif« , affirme le Dr Stephanie King, auteure principale et chercheuse à l’université de Bristol, citée dans un communiqué.
Mieux connaître le dauphin pour mieux comprendre l’humain
Ces résultats remettent par ailleurs en cause l’hypothèse selon laquelle les alliances sociales à plusieurs niveaux n’auraient pu émerger chez l’humain qu’en lien avec deux caractéristiques préalables : l’évolution des liens de couples, et la participation des mâles aux soins parentaux.
« Cependant, nos résultats montrent que les alliances intergroupes peuvent émerger sans ces caractéristiques, à partir d’un système social et d’accouplement qui ressemble davantage à celui des chimpanzés« , contredit Richard Connor, professeur à l’université du Massachusetts, qui a co-dirigé l’étude.
Il est rare qu’un département d’anthropologie mène des recherches sur des espèces autres que les primates, observe pour sa part le professeur Michael Krützen, co-auteur de l’étude et directeur de l’Institut d’anthropologie de l’Université de Zurich. Mais notre étude montre qu’il est possible d’obtenir des informations importantes sur l’évolution de caractéristiques que l’on considérait auparavant comme propres à l’homme, en examinant d’autres taxons très sociaux et dotés d’un gros cerveau (par rapport au poids de l’animal, NDLR). »
Source : GEO.fr /