Les Echos : ce que la France entend défendre à Charm el-Cheikh

Emmanuel Macron doit s’exprimer ce lundi lors du sommet mondial sur le climat de l’ONU. Paris entend tout faire pour que les pays maintiennent le cap de leurs engagements climatiques, malgré un contexte géopolitique tendu.

A l’Elysée, on l’assure : « C’est une COP importante. » Avant tout parce que le sommet mondial sur le climat organisé par l’ONU, qui s’est ouvert ce week-end dans la station balnéaire deCharm el-Cheikh en Egypte, est « un moment de la mise en oeuvre de l’Accord de Paris », dont la France se veut garante depuis sa signature en 2015. Emmanuel Macron est sur place pour le rappeler, à l’occasion du « sommet des leaders » qui réunit plus d’une centaine de chefs d’Etat et de gouvernement.

Il doit s’exprimer ce lundi après-midi. Avec dans ses bagages pour la COP27, plusieurs grandes priorités : notamment la sortie du charbon, le lien entre climat et nature, l’agriculture ainsi que la relance du « partenariat sur les forêts et sur la protection des réserves de carbone ». Un événement doit d’ailleurs y être consacré en sa présence.

Le chef de l’Etat arrive toutefois dans une ambiance géopolitique qui a peu à voir avec celle qui régnait il y a un an, à l’ouverture de la grand-messe précédente, à Glasgow. Car la guerre menée par la Russie en Ukraine a remis les questions de sécurité énergétique au centre du jeu, et beaucoup de pays dans le monde sont en train de faire des choix structurants en la matière. C’est un moment charnière, juge-t-on à l’Elysée. L’un des enjeux majeurs de cette COP27 sera donc que les pays maintiennent le cap de leurs engagements climatiques.

« Nous serons très attentifs à ce qu’il n’y ait pas de reculade sur l’atténuation [la réduction des émissions de gaz à effet de serre, NDLR] par rapport à Glasgow », indique un proche des négociations. Au passage, la France entend bien rappeler qu’elle-même « tient ses objectifs climatiques et poursuit sa transition », tout comme le fait l’Union européenne.

« Nous devons tous – en particulier les principaux pays émetteurs, c’est-à-dire ceux du G20 – accroître nos efforts pour atteindre une limite de 1,5 °C [de réchauffement]», presse la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, chargée des négociations climat pour la France, dans une tribune au « Monde » publiée dimanche avec plusieurs dirigeants politiques internationaux.

« Juste part »

Alors que les appels des pays du Sud se font de plus en plus pressants pour que les pays développés gonflent leur soutien financier afin de leur permettre de lutter contre le réchauffement et ses effets dévastateurs, l’Elysée affirme que la France sera « au rendez-vous de la solidarité » avec les pays pauvres et les pays émergents. Dans la droite ligne, précise-t-on, du « nouveau contrat entre le Nord et le Sud » qu’Emmanuel Macron a jugé « urgent de bâtir » lors d’un discours devant l’Assemblée générale des Nations unies fin septembre.

Les financements, dont ceux de l’adaptation au changement climatique que les pays riches s’étaient engagés l’an passé à doubler, sont à la traîne. La France, elle, « tient sa juste part », assure la présidence française : 6 milliards de dollars seront mobilisés chaque année jusqu’en 2025, dont plus de 2 milliards pour l’adaptation.

A la COP27, Paris compte donc surtout plaider auprès des autres grandes puissances économiques pour qu’elles tiennent leurs propres engagements. Dans une tribune publiée vendredi par le « Guardian », Emmanuel Macron, avec le président sénégalais et président de l’Union africaine Macky Sall et le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, insistent : « tous les pays doivent honorer le plus vite possible leurs engagements relatifs au financement de l’action climatique ».

La France se dit aussi « ouverte » à la discussion sur l’un des sujets devenus au fil des COP l’un des plus épineux entre le Nord et le Sud : la compensation financière des « pertes et dommages » qui désignent les dégâts climatiques irréversibles subis par les pays les plus vulnérables, que ni l’atténuation ni l’adaptation ne peuvent empêcher.

Pour autant, aux yeux de Paris, créer « encore » une nouvelle facilité, comme le réclament les pays du Sud, ne serait pas forcément ce qu’il y a de plus « pertinent ». La France a travaillé sur des « solutions » à l’image des systèmes d’alerte précoce, explique l’Elysée, qui souligne que « l’argent existe déjà dans d’autres fonds ».

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Les Echos, lundi 7 novembre 2022

Photo : Emmanuel Macron à la COP26, à Glasgow en Ecosse, en novembre 2021 (Andy Buchanan/AFP)