Mouches domestiques, papillons, libellules… Chaque année plus de 17 millions d’insectes franchissent le col de Bujaruelo, large de seulement 30 mètres, selon une étude publiée dans les Proceedings B de la Royal Society britannique.
« Un blizzard de papillons jaunes et blancs, comme une tempête de pétales » : plus de 17 millions d’insectes franchissent chaque année un col étroit des Pyrénées, selon une étude qui décrit pour la première fois en détail cette grande migration de la nature.
3.000 insectes à chaque minute dans la brèche
Par une chaude journée de septembre, dans le col de Bujaruelo à la frontière entre la France et l’Espagne, le scientifique britannique Will Hawkes s’est retrouvé enveloppé d’un nuage d’insectes qui bourdonnaient de manière « déterminée ».
A ses pieds, il a vu un « tapis vivant », raconte à l’AFP le chercheur à l’Université d’Exeter (Royaume-Uni), premier auteur de l’étude parue mercredi dans les Proceedings B de la Royal Society britannique.
Mouches domestiques, papillons, libellules… Chaque année plus de 17 millions d’insectes franchissent le col de Bujaruelo, large de seulement 30 mètres, selon les travaux menés par ce spécialiste des migrations d’insectes. Au plus fort de la vague, plus de 3.000 individus s’engouffrent chaque minute dans la brèche. En provenance d’Europe continentale, direction le Sud.
Le phénomène avait déjà été documenté en 1950 par le couple d’ornithologues britanniques Elizabeth et David Lack, qui avaient parlé de « migrants les plus remarquables de tous ».
Mais cette migration massive n’avait pu être quantifiée. C’est pourquoi chaque automne depuis 2018, l’équipe de chercheurs de Will Hawkes se rend au col de Bujaruelo, où elle a installé des caméras vidéo et des pièges sur le passage des insectes, afin de les comptabiliser et les identifier.
Un monde en déclin
La plupart (90%) sont des syrphes à ceinture, aux rayures oranges et noires. Ces insectes volants de la famille des mouches se nourrissent de pucerons et sont donc parfaits pour débarrasser les cultures ou les jardins des parasites, explique Will Hawkes.
Ce sont également de talentueux pollinisateurs, et parce qu’ils parcourent des centaines de kilomètres, ils pourraient s’avérer être de meilleurs pollinisateurs que les abeilles « relativement sédentaires », ajoute-t-il.
Leur nombre aurait décliné en raison du changement climatique, de l’usage des pesticides et de la perte d’habitat, avance le scientifique, qui s’appuie sur une étude allemande de 2020 pointant un effondrement de la population d’une espèce similaire.
Par le passé, la migration des syrphes ceinturés devait être encore plus spectaculaire, selon Will Hawkes. Le spectacle reste néanmoins « magique », commente-t-il, en recommandant de se rendre au col de Bujaruelo par une journée ensoleillée de septembre ou d’octobre. Surtout si le vent souffle au Sud.
Source : Sciences et Avenir