Censée structurer l’agriculture des 10 prochaines années en accélérant notamment la transition agroécologique, la loi d’orientation agricole (LOA) qui vient d’être votée à l’Assemblée nationale est un échec et une menace pour la protection de la biodiversité de notre pays. Estimant qu’une agriculture ne peut produire en fragilisant la protection du vivant, la LPO appelle les Sénateurs à modifier le texte et contrer les reculs environnementaux majeurs proposés par cette loi.Le statut des espèces protégée fragilisée
L’article 13 qui a été (adopté à une voix près !) s’attaque à la dépénalisation des atteintes aux espèces et habitats protégés. En exonérant de sanctions pénales les auteurs d’infraction au code de l’environnement, cet article constitue une grave régression environnementale. Cet article restreint en effet la qualification de délit aux seuls faits commis de manière intentionnelle, que ce soit par des agriculteurs, des forestiers, des chasseurs ou des promoteurs d’énergie.
Concrètement, les atteintes commises par négligence ou imprudence ou dans le cadre de travaux, ne seront plus sanctionnées. A travers cet article, on assiste à la fragilisation de la protection des espèces protégées puisqu’elle permet une interprétation contestable de la directive Oiseaux et de l’ensemble des infractions qui sont aujourd’hui poursuivis au titre de la destruction d’espèces ou d’espaces protégés. La LPO appelle donc à la suppression de cet article, qui remplace également les sanctions pénales par de simples sanctions administratives.
La fin de la protection des haies ?
Habitats indispensables à la survie de nombreuses espèces sauvages, les haies limitent l’érosion des sols, participent au stockage du carbone, régulent la ressource en eau, fournissent de l’ombre pour le bétail, tout en ayant un effet coupe-vent. Depuis 1950, près de 70% des haies ont disparu des bocages français. Alors que plus de 20.000 km de haies disparaissent encore chaque année à cause de l’agriculture intensive, la loi d’orientation agricole propose de réduire les sanctions en cas de destruction. Cette annonce vient faucher les ambitions de la Stratégie nationale biodiversité 2030 et de son « plan haie ». La LPO appelle à prioriser la conservation des haies existantes, au-delà de la plantation de nouvelles. On sait en effet qu’il faut au moins 30 ans à une haie pour retrouver ses fonctions écosystémiques.
Un choc de simplification, au profit notamment des méga bassines !
Alors que les projets de méga bassines sont de plus en plus contestés dans notre pays, la loi d’orientation agricole, au nom du choc de simplification, prévoit de limiter les procédures de référé suspensif afin d’en faciliter l’installation. Dans un contexte de changement climatique et de raréfaction de l’eau, l’accaparement de cette ressource au profit d’une poignée d’agro industriels a pour effet d’accentuer l’asséchement des bassins versants, mais également la dynamique d’accaparement des terres et donc les inégalités au sein du monde agricole. Il ne s’agit en rien d’un projet d’avenir. La LPO demande, au contraire, que ces projets puissent faire l’objet d’un débat de société plus vaste et d’une évaluation des installations déjà en cours, avant d’envisager toute accélération des procédures.
En résumé, la LPO estime que la loi d’orientation agricole, telle qu’elle est proposée actuellement, est un projet qui favorise une agriculture productiviste au détriment de l’agroécologie mais surtout au détriment de l’ambition climatique et environnementale. La LPO souhaite alerter les Sénateurs sur ces reculs environnementaux majeurs et appelle à une modification rapide du texte.
Pour Allain Bougrain Dubourg, président de la LPO : « Cette loi d’orientation agricole se résume à un rendez-vous raté avec une agriculture plus respectueuse de l’environnement. Une agriculture qui serait plus à même de pouvoir encaisser les nombreux défis liés aux changements climatiques. Pire, elle fragilise un peu plus la protection de la biodiversité, la protection des habitats et des espèces. Enfin elle ne résout en rien le manque de moyens financiers dont sont victimes les paysans les plus démunis. »
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