L’ours polaire est une espèce iconique de l’Arctique au point que les autres animaux qui peuplent la région semblent parfois relégués au second plan. Pour Rémy Marion, fondateur de l’association Pôles Actions, il faut désormais attirer le regard du grand public sur d’autres espèces.
Souvent, l’ours polaire (Ursus maritimus) – une espèce vulnérable selon l’Union internationale pour la conservation de la nature – fait l’objet d’études scientifiques. Il est régulièrement cité auprès du grand public pour parler du changement climatique et de ses conséquences. Mais sa situation est-elle la pire ? Doit-il être et rester l’un des seuls porte-drapeaux de l’Arctique ? Avant de faire un point sur la situation de cette espèce lors du colloque « La nature arctique dans un climat d’urgence »* dont Sciences et Avenir est partenaire, l’aventurier et fondateur de l’association Pôles d’Actions, Rémy Marion, répond à ces questions.
Sciences et Avenir : L’ours polaire est une espèce iconique, pourquoi selon vous ? Rémy Marion : Pour différentes raisons. Tout d’abord, l’ours est emblématique dans la culture humaine, notamment les ours bruns. L’ours polaire l’est donc devenu par extension. Ce phénomène s’est accentué en 2006 avec le film d’Al Gore, « Une vérité qui dérange ». Cette espèce a toutes les qualités : elle est élégante, belle. L’ours polaire est grand. Mais selon moi, il prend désormais trop de place au niveau de la communication alors que c’est loin d’être l’espèce la plus menacée de l’Arctique. Des parcs animaliers tel que Marineland l’instrumentalisent : ils communiquent sur l’extinction de l’espèce, alors que c’est faux, simplement pour faire du profit. Je trouve cela abominable.
Des menaces pèsent-elles néanmoins sur ces animaux ? Leur population décroît-elle ? Certaines populations d’ours polaires font bien sûr face à des menaces bien réelles. Il y a de la pollution, c’est indéniable. Cette espèce subit aussi un dérangement à cause des exploitations minières et pétrolières. Enfin il y a la chasse et les problèmes liés au réchauffement climatique. Mais attention, l’aire de répartition de l’ours polaire n’est pas du tout uniforme : ces animaux vivent correctement dans certaines zones et dans des conditions plus difficiles ailleurs.
Ainsi, les populations ne font pas face aux mêmes menaces et ne courent pas les mêmes risques face aux changements. A la fin de années 70, ils étaient entre 7000 et 8000 individus. Dans les années 50, les Russes ont commencé à les préserver et en 1976, l’espèce était intégralement protégée même si certaines populations autochtones peuvent encore légalement la chasser. En 2017, on comptait environ 26.000 ours polaires selon les chiffres officiels. Donc la population a augmenté et il est donc faux de dire qu’elle a globalement baissé. Par contre, dans certaines zones comme au nord de l’Alaska, elle a effectivement sûrement déclinée.
photo : Ours polaires photographiés au Canada © SIPA