Le Conseil de sécurité de l’ONU alerte sur les conséquences de la montée des eaux sur les populations des zones côtières et leurs moyens de subsistance.
La montée des océans était pour la première fois au coeur des discussions du Conseil de sécurité des Nations unies mardi. Et le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, n’a pas hésité à user de superlatifs pour alerter sur ses conséquences dramatiques pour la paix et la sécurité mondiale.
« La montée des eaux n’est pas seulement une menace en elle-même, c’est un amplificateur de menaces », a-t-il prévenu d’emblée. Le danger est « particulièrement aigu » pour les habitants des zones côtières peu élevées, soit une personne sur 10 dans le monde, a souligné le secrétaire général. Le rapport du GIEC publié il y a un an faisait en effet état d’un milliard de personnes qui pourraient vivre d’ici à 2050 dans des zones à risque de tempêtes et de submersions marines.
Ces populations n’auront d’autre choix que de se déplacer. « Nous serons les témoins d’un exode de masse de populations entières, d’une ampleur biblique et nous assisterons à une compétition toujours plus féroce pour l’accès à l’eau douce, à des terres et à d’autres ressources », a ajouté Antonio Guterres.
Il a insisté sur le fait que les conséquences seront universelles. « Quel que soit le scénario, des pays comme le Bangladesh, la Chine, l’Inde et les Pays-Bas sont tous à risque », a-t-il fait valoir. De Buenos Aires à Lagos, en passant par Le Caire, Jakarta, Bombay, Copenhague, Londres, Los Angeles, New York, le secrétaire général a énuméré les métropoles situées dans des zones à risque.
Risques pour les « greniers à blé »
Selon le GIEC, le niveau de la mer a déjà augmenté de 15 à 25 cm entre 1900 et 2018, et devrait encore augmenter de 43 cm environ d’ici à 2100 si la température monte de 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, et même de 84 cm dans un scénario à 3 °C ou 4 °C supplémentaires.
Des populations ont déjà dû se déplacer sur certains territoires insulaires comme les Fidji, le Vanuatu et les îles Salomon, a souligné Antonio Guterres. Csaba Korosi, président de la 77e session de l’Assemblée générale des Nations unies, a mis en garde contre les risques qui pèsent sur les « greniers à blé » du monde comme le delta du Nil, en Egypte, ou celui du Mékong, au Vietnam.
L’intrusion de l’eau salée rongera en effet des pans entiers de l’économie, en particulier l’agriculture, la pêche – avec un impact sur la délimitation des zones maritimes – et le tourisme, ont alerté les membres du Conseil de sécurité. Antonio Guterres a notamment cité le cas des Caraïbes où la montée des eaux a déjà détruit les moyens de subsistance de populations dépendantes de l’agriculture et du tourisme. En Afrique du Nord, la montée des eaux a contaminé des réservoirs d’eau douce et détruit des récoltes.
Face à ces défis, il faut un cadre juridique, qui doit inclure le droit des réfugiés, a souligné Antonio Guterres. « Les droits humains des personnes ne disparaissent pas parce que leurs maisons disparaissent », a-t-il fait valoir. La Commission du droit international, organe de l’ONU chargé de développer le droit international, a d’ailleurs ajouté le sujet de la montée des eaux à son agenda.
Source : Sophie Amsili / Les Echos, 16 février
Photo : le Parisien