Les dégâts de la pêche industrielle ne cessent de s’intensifier. Alors que des chalutiers de misère pillent le golfe de Guinée et mettent en péril la pêche traditionnelle locale, d’autres navires high-tech et ultra subventionnés vident les mers du Nord à grands coups de senne.
Maxime de Lisle, militant des océans, raconte le massacre en cours.
Août 2021. Lever du jour, au large du Gabon. Le Bob Barker, navire de la flotte de l’ONG de défense des océans Sea Shepherd, intercepte un thonier espagnol remontant deux baleines dans ses filets. Contrairement à ce que prescrit la loi, le capitaine ne relâche pas immédiatement les mammifères, espèce protégée en pleine saison des amours. Il préfère garder l’autre butin piégé dans sa senne : plusieurs tonnes de thon. Enserrées dans les mailles, suffoquant, les baleines se débattent. Elles sont finalement relâchées par l’intervention conjointe des membres de Sea Shepherd et des autorités gabonaises. Quelques jours après, un arrêté ministériel est pris en urgence : le thonier est expulsé du Gabon et sa licence est révoquée pour violation de la réglementation. C’est une première. Un signal fort de ce petit pays (2,2 millions d’habitants) – pionnier de la lutte contre la surpêche – qui exprime avec courage sa ferme intention de préserver ses eaux des pilleurs, qui ne sont pas toujours ceux qu’on croit.
Ce thonier pêche pour fournir un marché européen très demandeur en thon. Pièce maîtresse de l’alimentation en France, il coche les trois critères magiques des choix de consommation : c’est bon, c’est pratique, c’est abordable. Il y a une boîte de thon dans la cuisine de 80 % des foyers français. On peut se demander si ce serait toujours le cas s’il était inscrit sur ces boîtes le message « peut contenir des traces de baleines » à côté de la liste…
Source : Socialter Par Maxime de Lisle, 18 janvier 2022