Kélian et Léo, 10 ans, Saint-Leu (Île de La Réunion), ont posé cette question au P’tit Libé. Ces jumeaux passent l’été sur leur île.
Depuis sept ans, il y a eu 21 attaques de requins sur les plages de la Réunion. Il s’agit d’une île située dans le sud-ouest de l’océan Indien. C’est à la fois un département français et une région d’outre-mer. Huit personnes sont mortes lors de ces attaques, des surfeurs pour la plupart. On en parle beaucoup lorsque ça arrive parce que c’est impressionnant et que ça fait peur. Mais pour Bernard Séret, spécialiste des requins, ce n’est pas de la faute de ces animaux marins. «Les humains sont bien responsables de la multiplication des attaques», affirme-t-il.
Animaux minuscules
A partir des années 1970, la population de la Réunion a augmenté. Cette île est trois fois plus petite que la Corse et on ne peut pas habiter partout en bord de mer. Les gens se sont donc installés «sur la partie de l’île où la mer est accessible pour se baigner, mais qui ne fait que 40 kilomètres de long», indique Bernard Séret. La zone concentre toutes les activités aquatiques (baignade, surf, pêche, voile). Sauf que c’est aussi là que se trouvent, tout près du bord de l’eau, les coraux. Ces animaux minuscules habitent en colonie et peuvent vivre des milliers d’années. Leurs squelettes durs forment ensuite une sorte de mur, ce qui fait une barrière de corail. De nombreux animaux (poissons, coquillages…) adorent y vivre. Les coraux ont donc un rôle très important et ils sont très exigeants : «Il leur faut de l’eau salée, propre, à une certaine température et avec assez d’oxygène», énonce Bernard Séret. Mais en s’installant à côté de là où les coraux se développent, les humains ne leur ont pas facilité la vie. L’eau douce qu’ils utilisent est reversée dans la mer, proche des coraux. Or, on l’a dit, ils n’aiment pas du tout l’eau dessalée !
«Grosses bêtes»
Bon, quel rapport avec les requins vous demandez-vous ? On y vient : les requins de récif, des petits requins qui mesurent entre 1,20 et 1,50 mètre et qui ne sont pas dangereux, aiment l’eau propre et oxygénée, donc adorent vivre dans les coraux. Mais voilà, comme l’eau n’est plus bien propre, ils sont partis. «Comme la nature n’aime pas le vide, les requins-tigres et les requins-bouledogues, qui étaient plus au large avant, sont venus occuper l’espace parce que ça ne les gêne pas d’aller dans l’eau dessalée et pas très propre.» Ces poissons sont très grands : un requin-bouledogue mesure jusqu’à 4 mètres et un requin-tigre peut atteindre les 6 mètres. «Ce sont de grosses bêtes qui peuvent faire mal. Comme il y a beaucoup de gens dans l’eau toute la journée, il y a plus d’attaques mais ça ne veut pas dire qu’il y a beaucoup de requins dangereux.»
On ne sait pas combien viennent près du bord de mer. «Les requins ne peuvent pas être très nombreux, car il n’y a pas assez de poissons dans les coraux pour les nourrir, explique Bernard Séret. Il y a eu des estimations mais elles ne sont pas précises, surtout qu’un requin voyage beaucoup. Ça ne sert à rien de les pêcher parce que d’autres reviendront !» Quand un requin attaque un humain, il ne sait pas ce que c’est. Il préfère les poissons mais s’il voit du mouvement ou entend un bruit dans l’eau, il se dit :«Tiens, il y a quelque chose là, je vais goûter…»
Audrey Morard/Libé 25 août